L'enseignement de la "morale laïque" doit être harmonisé pour enseigner aux enfants les principes et comportements du "vivre ensemble", à l'issue d'une réflexion engagée à la demande du ministre de l'Education nationale, Vincent Peillon.
"Il y a eu beaucoup de petits dispositifs. Je veux créer un consensus car cela va très au delà du clivage gauche-droite", a-t-il expliqué mercredi lors de sa conférence de presse de rentrée.
La laïcité à l'école est régulièrement chahutée par diverses polémiques, comme celui des "mamans accompagnantes" voilées lors de sorties scolaires ou la question de la viande halal à la cantine.
"La laïcité, ce n'est pas la simple tolérance, ce n'est pas +tout se vaut+, c'est un ensemble de valeurs que nous devons partager", a dit M. Peillon. "Pour les partager, il faut qu'elles nous soient enseignées et qu'elles soient apprises (...) Il faut reconstruire entre les enfants de France du commun", a ajouté cet agrégé de philosophie.
Le ministre a fixé "une très grande ambition" à la mission qui sera installée à la rentrée et prendra "trois, quatre, cinq mois", pour "déboucher sur une refonte des programmes qui, elle-même, prend un peu de temps".
Les différents programmes scolaires enseignent les règles qui permettent de "vivre ensemble" mais "de manière peu cohérente, sans réelle progression", selon le ministère qui cite notamment l'instruction civique et morale à l'école primaire, l'éducation civique au collège, ou l'éducation civique, juridique et sociale (ECJS) au lycée.
"La laïcité, qui est le cadre même de ces règles, est en réalité très peu présente dans les programmes", ajoute le ministère .
Quelle morale partagée dans une société pluraliste ?
En février, l'ancien ministre Luc Chatel et le Haut conseil à l'intégration (HCI) avaient installé une mission "Pédagogie de la laïcité" afin de donner aux personnels éducatifs "les outils conceptuels et pédagogiques nécessaires pour mieux s'approprier le principe de laïcité".
Le sociologue Jean Baubérot a accueilli avec enthousiasme la décision de M. Peillon.
"D'une manière générale, il me semble qu'il y a des mesures actuellement qui montrent qu'on est en train de repartir du bon pied au sujet de la laïcité", a-t-il dit à l'AFP, citant la mission présidée par Didier Sicard sur la fin de vie. "C'est une question complexe et fondamentale qui touche à la laïcité car il y a notamment l'Eglise catholique qui est à fond contre".
Il y a également la promesse de François Hollande d'ouvrir le mariage aux homosexuels : "là aussi, l'Eglise catholique à le droit de dire son opposition, mais la loi est pour tous", ajoute M. Baubérot.
M. Peillon lance une "troisième initiative qui remet la laïcité sur ses fondements au lieu d'en faire soit une laïcité positive à la Sarkozy, mais qui était néo-cléricale, soit une laïcité répressive à la Sarkozy-Guéant", estime M. Baubérot.
La mission devra réfléchir au contenu : "Que peut être la morale partagée dans une société pluraliste et où il y a plusieurs morales convictionnelles différentes ?", dit-il.
"Il ne s'agit pas de porter atteinte à ces morales convictionnelles mais de trouver le fondement partagé qui peut être enseigné sans porter atteinte à la pluralité des morales convictionnelles", ajoute le spécialiste de la laïcité.
Par ailleurs, sur la forme, "on ne peut pas enseigner la morale comme on enseigne une règle de grammaire", estime Jean Baubérot.
De fait, indique le ministère, la réflexion portera sur les modalités d'enseignement qui concernent tous les professeurs et toutes les disciplines et va "donc nécessairement poser la question de la formation des enseignants".