Sans prononcer une seule fois le mot, François Hollande a lancé mardi un débat national sur l'euthanasie.
Lors d'une visite dans une maison médicale dédiée à la fin de vie, le président s’est demandé s'il n'était pas temps d'"aller plus loin dans des cas exceptionnels, quand la douleur est irréversible et appelle un acte médical assumé". Rendant hommage à la loi Leonetti de 2005 qui prévient l'acharnement thérapeutique sans pour autant permettre un geste médical pour provoquer la mort, il a annoncé qu'il confierait une mission de concertation sur ce dossier à Didier Sicard, président d'honneur du comité national consultatif d'éthique.
En France, la question de l’euthanasie reste encore largement controversée.
Les pour
L'Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) a salué l'annonce du président mais a dit s'inquiéter des pressions possibles des opposants à l'euthanasie. L'ADMD demande ainsi "de ne pas céder à la pression des lobbies pro-life, ultra-religieux (...) et d'entendre le combat des associations laïques qui demandent le respect absolu des volontés des patient, fussent-ils âgés, malades ou en fin de vie, mais qui demeurent des citoyens à part entière".
Pendant la campagne, cette association avait lancé une campagne controversée montrant notamment Nicolas Sarkozy ou Marine Le Pen sur leur lit de mort avec la question : "Doit-on vous mettre dans une telle position pour faire évoluer la vôtre sur l'euthanasie ?"
Jean-Luc Romero, président de l'Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité, a cependant indiqué qu’il n'approuvait pas la nouvelle mission Sicard. Selon lui, la problématique de la fin de vie est "une question citoyenne intime et pas une question médicale". Il dénonce le choix du Professeur Sicard pour mener ce débat.
Les contre
Les opposants à l’euthanasie n’ont pas manqué de réagir.
Le député-maire UMP de Rueil-Malmaison, Patrick Ollier, s'est déclaré "fermement opposé" à une réforme de la loi Leonetti sur la fin de vie. "Ouvrir le débat sur l'euthanasie sans employer le terme peut paraître habile, mais cela représente un débat qui va fracturer la société française", estime l'ancien ministre dans un communiqué. "Aller plus loin, c'est-à-dire franchir la limite en autorisant un acte médical assumé pour provoquer la fin de vie est un débat qui ne semble pas s'imposer aujourd'hui"poursuit-il.
Alliance VITA, un organisme engagé dans la sensibilisation en faveur des soins palliatifs, contre l’acharnement thérapeutique et l’euthanasie, a indiqué être prête à participer à la concertation sur le thème de la fin de vie. Elle précise toutefois que l’intervention, du chef de l’Etat reste ambigüe. Je rappelle que le mouvement des soins palliatifs estime clairement l’euthanasie incompatible avec les soins palliatifs indique ce groupe dans un communiqué.
De son côté, Mgr André Vingt-Trois, président de la Conférence des évêques de France, a affirmé que la question posée mardi par François Hollande sur la fin de vie était "une bonne question" à laquelle on ne répondrait pas forcément "positivement".
La position des candidats pendant la campagne présidentielle
Durant la campagne présidentielle, la question de l'euthanasie opposait de manière tranchée les candidats de droite hostiles à tout changement de la loi Leonetti et ceux de gauche favorables à une évolution vers une "aide active à mourir". Ainsi Nicolas Sarkozy, François Bayrou et Marine Le Pen s’étaient déclarés opposés à une évolution législative sur la fin de vie.
François Hollande n'avait quant à lui pas pris l'engagement de légaliser l'euthanasie, mais il avait proposé dans son programme que "toute personne majeure en phase avancée ou terminale d'une maladie incurable, provoquant une souffrance physique ou psychique insupportable (...) puisse demander, dans des conditions précises et strictes, à bénéficier d'une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité".
Une proposition approuvée par une grande majorité des Français. Selon un sondage Harris Interactive publié en mars dernier, 91 % des Français approuvaient la proposition du candidat socialiste de légaliser l’euthanasie dite "active".
Malgré tout, la question de la fin de vie n’avait pas été évoquée lors du discours de politique générale de Jean-Marc Ayrault, provoquant la déception des défenseurs du droit à mourir.
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