Alors que le corps de Lina, disparue dans le Bas-Rhin le 23 septembre 2023, est découvert ce mercredi 16 octobre par les gendarmes, l’auteur supposé du meurtre, Samuel Gonin, s’est suicidé en juillet dernier après la saisie de son véhicule. Dans ce cas, quelles sont les suites judiciaires dans ce dossier ?
Le parquet de Strasbourg a annoncé, ce mercredi 16 octobre, la découverte du corps sans vie de Lina, disparue depuis le 23 septembre 2023, dans la Nièvre. Dans cette affaire, plusieurs éléments accablent Samuel Gonin, principal suspect dans le meurtre de l’adolescente.
Parmi ces éléments figure, d'abord, le véhicule volé, une Ford Puma, conduit par Samuel Gonin avant le drame. Celui-ci se trouvait en effet sur le lieu exact de la disparition de l’adolescente, le 23 septembre 2023, et a été filmé par des caméras de vidéosurveillance ce jour-là.
Après la localisation du véhicule, les investigations ont permis de constater que Samuel Gonin avait pris soin de désactiver le GPS de la Ford Puma, compliquant ainsi sa traque. Plus encore, lors d’une conférence de presse, tenue jeudi 19 septembre 2024, le procureur de la République de Strasbourg, Alexandre Chevrier, a révélé que des affaires appartenant à la victime ont été retrouvées dans le sac à main présent dans la boîte à gants du véhicule volé.
Une action publique qui pourrait être éteinte avec le suicide du principal suspect
Parmi ces affaires figuraient un miroir, des faux-cils, la coque de téléphone ainsi que les écouteurs de Lina. Le téléphone de la victime n’a, quant à lui, pas été retrouvé. Surtout, le procureur de la République a fait savoir que dans le coffre de la voiture se trouvaient «deux cordes». Sur l’une d’elles, les enquêteurs ont identifié le profil génétique de l’adolescente. Sur l'autre, celui de Samuel Gonin.
Néanmoins, l’enquête a pris un autre «virage» lorsque l’on a appris que le principal suspect dans cette affaire s’est suicidé le 10 juillet à Besançon, laissant derrière lui une lettre adressée à ses filles et dans laquelle Samuel Gonin affirme avoir «perdu (s)on honneur, (s)a dignité, (s)on humanité».
Mais dans ce cas, et avec le suicide du principal suspect, comment la famille de Lina peut-elle obtenir justice ? En effet, il faut savoir que trois principes, conjointement liés, empêchent la tenue d’un potentiel procès si l’implication de Samuel Gonin dans la disparition de l’adolescente de 15 ans venait à être prouvée par l’enquête.
D’abord, l’article 6 du Code de procédure pénale stipule qu’une action publique peut être éteinte après la mort du prévenu. Puis, l’article 121-1 du Code pénal ajoute le fait que seules les personnes physiquement responsables d’un crime peuvent être jugées. Sans oublier également que la présomption d’innocence impose que toute personne reste innocente tant qu’elle n’est pas jugée.
Dans le cas de l’affaire Lina, «s’il y a des complices, ces derniers vont être poursuivis. Parallèlement, concernant Samuel Gonin, l’instruction déterminera s’il est, ou non, impliqué dans la mort de Lina. Si son implication est avérée, l’action publique est perdue» puisque celle-ci est éteinte par le décès du principal suspect, conformément à l'article 6 du Code de procédure pénale.
Un «préjudice d’affection»
Concrètement, «l’ordonnance de non-lieu est prise lorsque l’on considère que l’on ne retrouve pas l’auteur. Par conséquent, l’instruction est clôturée. Ainsi, on peut ordonner un non-lieu, sous réserve d’une réouverture sur charges nouvelles», a affirmé, à CNEWS, Me Sylvie Noachovitch, avocate pénaliste, ajoutant que Samuel Gonin «sera toujours présumé innocent, de toute façon, puisqu’il n’y aura pas de jugement à son encontre».
Que reste-t-il donc à la famille de Lina ? En effet, s’il n’est pas possible de poursuivre pénalement quelqu’un qui est mort, et encore moins ses héritiers, les proches de l’adolescente de 15 ans «peuvent saisir la commission des indemnisations des victimes d’infractions (CIVI) pour être reconnus comme victimes».
«À partir du moment où l’on considère que Samuel Gonin est l’auteur du meurtre, ils sont reconnus comme victimes. La commission des indemnisations des victimes pourrait les indemniser de leur préjudice moral, aussi appelé préjudice d’affection», a précisé l’avocate pénaliste.
Comme l’on peut lire sur le site de l’Association Victimes de France (AVIF), le préjudice d’affection «vise à indemniser les proches qui ont subi une perte à cause du décès de la victime directe. Ceci inclut également l’impact pathologique avéré que le décès peut avoir sur certains proches».
«Très souvent, la commission ordonne une expertise psychologique de la famille pour évaluer le degré de souffrance. En général, chaque parent pourrait percevoir environ 50.000 euros. Mais cela peut être au-delà ou en deçà de cette somme, en fonction du préjudice», a ajouté Me Sylvie Noachovitch.