Un maillot de bain en fourrure sur la plage de Copacabana, impensable? A voir. L'industrie de la fourrure, un moment paralysée par les mouvements de protection des animaux, est passée à l'offensive pour attirer plus de clients, conquérir de nouveaux marchés et redorer son image.
"En 2010, les ventes mondiales de fourrure représentaient 15 milliards de dollars, c'est 70% de plus en dix ans", se félicite le Britannique Mark Oaten, président de la Fédération internationale de l'industrie de la fourrure (IFTF).
"Il y a dix ans, vous achetiez un manteau en fourrure pour le garder 20 ans, aujourd'hui la fourrure se porte par touches, elle est colorée et de plus en plus légère", dit-il dans un entretien à l'AFP.
Si les consommateurs n'en achètent pas autant, ils en achètent régulièrement.
Surtout, à l'image du luxe, la fourrure a conquis de nouveaux territoires comme la Chine, avide du luxe occidental haut de gamme.
En terme de recettes, l'Asie vient même de dépasser l'Europe, avec 6 milliards de dollars en 2010 contre 4,5 milliards, devant la Russie 3 et l'Amérique du nord 1,5.
M. Oaten voit encore de belles années se profiler grâce à la Chine et son vaste marché intérieur, mais aussi la Turquie, les Emirats ou encore le Brésil, en plein boom économique.
"Nous suivons les clientèles riches où qu'elles se trouvent sur la planète alors qu'avant on associait fourrure et pays froids", dit encore le patron de l'IFTF, qui veut "désaisonnaliser" la fourrure. Au Brésil, "nous ne vendrons pas le manteau de grand-mère mais de la mode", explique Mark Oaten, expliquant ainsi le passage de l'ombre à la lumière de la fourrure.
A la fin des années 80, rappelle Philippe Beaulieu, patron de la Fédération française, "on n'a pas su anticiper les mouvements anti-fourrure, s'adapter aux nouveaux modes de consommation". Résultat en France, 30% à 40% d'entreprises en moins.
Aujourd'hui, il y en a 200 mais "leur chiffre d'affaires est reparti à la hausse depuis 5 ans, sans retrouver le niveau des années 70", dit-il.
Pour en arriver là, les créateurs, poussés par les éleveurs danois de Saga Furs notamment, ont appris à travailler la fourrure par petites touches, la tricoter, tandis que les innovations technologiques (le laser par exemple) ont fait le reste.
La fourrure, devenue un tissu comme la soie ou le velours, a même fait son apparition dans les collections de printemps-été.
Parallèlement, l'IFTF mène une campagne pour redorer l'image d'une "industrie controversée" selon l'expression de Mark Oaten qui a fait du label OA (Origine assurée) un cheval de bataille.
Le label entend assurer le bien-être des animaux (taille des cages, conditions sanitaires et d'abattage etc). Il assure aussi la traçabilité des peaux, du producteur au détaillant.
De nombreux pays appliquent déjà ces normes, très contrôlées, comme le Danemark, la Finlande, le Canada ou la France, mais pas la Chine, pays où ça va "prendre un certain temps", regrette Philippe Beaulieu.
En attendant, le président de l'IFTF explore d'autres pistes pour voir la fourrure investir les maisons (canapés, coussins etc), les hommes l'adopter, et communiquer, une première.
L'IFTF va faire de la publicité, qui paraîtra bientôt dans l'hebdomadaire britannique The Economist. Elle sera axée sur le poids économique d'une filière qui emploie près de 2 millions de personnes dans le monde et peut rapporter gros (1er poste d'exportation du Danemark par exemple). "Notre industrie se porte bien partout malgré la récession", insiste M. Oaten.
D'autres campagnes sont programmées mais rien pour convaincre les associations d'arrêter leurs manifestations. "Il y aura toujours des végétariens", conclut M. Oaten.