L'Autorité de la concurrence a sanctionné mercredi d'une amende de 79 millions d'euros une entente sur les prix organisée pendant près de huit ans par les quatre principaux distributeurs de produits chimique en France, Brenntag, Univar, Solvadis et Caldic Est.
Les quatre groupes, qui représentent 80% du marché de la distribution de produits intermédiaires de la chimie en France, ont "restreint la concurrence en se répartissant les clients et en se coordonnant sur les prix", a indiqué l'autorité devant la presse.
L'entente portant sur la distribution de produits très couramment utilisés, comme la soude, la javel ou des solvants, a touché potentiellement des milliers de victimes, de grands groupes industriels aux petites entreprises comme des teintureries, ou même des centres hospitaliers entre 1998 et mi-2005.
La collusion a été organisée dans quatre régions, le Nord, l'Ouest, la Bourgogne et Rhônes-Alpes, touchant la majorité des bassins industriels français, à part l'Ile-de-France et le Sud-Ouest.
Les représentants des quatre sociétés se réunissaient secrètement dans des hôtels ou des restaurants pour se répartir la clientèle et se coordonner sur les prix, indique l'enquête de la concurrence.
Une source citée par l'autorité précise qu'une ligne de "téléphone portable dédiée à la concertation" avait été mise en place de façon officieuse.
Brenntag écope de l'amende la plus lourde, 47,8 millions d'euros, à cause de "circonstances aggravantes" pour avoir été considéré comme l'initiateur de l'entente et appartenir à un grand groupe international, l'allemand Brenntag AG. Sa société mère DBML au moment des faits a reçu une amende de 5,3 millions.
Brenntag a contesté mercredi "la qualification juridique des faits et le calcul de l'amende" et indique envisager de faire appel, selon un communiqué.
La multinationale Univar écope, elle, de 15,2 millions d'euros d'amende, et Caldic Est, appartenant au néerlandais Caldic BV, de 1,3 million.
Le groupe Solvadis, entre-temps racheté par un fonds d'investissement, a lui été exempté de sanction pour avoir été le premier à informer en 2007 l'autorité de la concurrence de cette entente, dans le cadre d'une procédure de clémence.
En revanche, sa société mère au moment des faits, GEA Group, a écopé de 9,4 millions d'amende.
Brenntag et Univar, s'étaient également auto-dénoncés en 2007 en entamant des procédures de clémence auprès de l'autorité. Mais leur initiative arrivant au deuxième et troisième rangs, ils n'ont vu leur sanction réduite respectivement que de 25% et 20%.
Il s'agit de la septième fois seulement que l'autorité de la concurrence prend une décision de clémence.
Cette procédure débouche sur une exonération de sanction si un groupe donne des informations pertinentes, coopère à l'enquête sans en informer les autres membres de l'entente, et met fin aux pratiques incriminées.
L'entente avait été mise en place dans un contexte de guerre des prix, qui avait diminué les marges de ces sociétés, et à la suite de l'application de la directive Seveso 2, qui avait contraint les groupes chimiques à des investissements importants pour améliorer les conditions de stockage de ces substances.