Au sixième jour du 70e Festival de Cannes, les festivaliers ont vu plus de la moitié des longs métrages en compétition. Trois d'entre eux font figure de favoris.
Pour la plupart déçus par «Happy End» de Michael Haneke ou «Okja», la fable de Bong Joon-Ho, dont ils attendaient beaucoup, les festivaliers se sont en revanche entendus sur trois longs métrages qui devraient logiquement se retrouver au palmarès.
120 battements par minute
Montré au jury le troisième jour de la compétition, le film sur les années Sida et le combat d'Act Up-Paris de Robin Campillo est celui qui a recueilli le plus d'avis favorables au célèbre Palmomètre jusqu'ici. Le coeur de la presse et des festivaliers a battu à l'unisson pour ce film choc qui se double d'une ode au courage et à la tolérance.
La mise en scène réussit le pari de compiler avec beaucoup de fluidité une belle histoire intime et la fresque d'un combat d'une communauté stigmatisée à l'heure où les pouvoirs publics ne s'intéressaient pas à la maladie ni au sort des séropositifs. Sans doute que le jury sera lui aussi touché par ce film essentiel à l'heure où les communautés LGBTI se battent encore dans de nombreux pays pour leurs droits.
Faute d'amour
Premier film vu par la presse mercredi 17 mai, «Faute d’amour» a été apprécié à sa juste valeur. Et surtout il n'a pas été détrôné de sa deuxième place malgré le grand nombre de films vu depuis par les festivaliers. Réalisé par le Russe Andrey Zvyagintsev, ce film d'auteur désespéré sur un couple qui se déchire et dont le fils disparaît a mis tout le monde d'accord quant à la virtuosité de sa mise en scène.
Le cinéaste russe, connu des festivaliers pour avoir montré à Cannes «Le Bannissement» et «Léviathan», fait le portrait d'une Russie qui abandonne son peuple et ses enfants. Un constat implacable auquel sera peut-être sensible le jury de Pedro Almodovar qui ainsi pourrait rappeler au monde entier que le cinéma sert également à montrer le monde tel qu'il est et à tirer des sonnettes d'alarme.
Le Redoutable
Très attendue par les festivaliers, la projection sur la Croisette du «Redoutable», le biopic de Michel Hazanavicius sur Jean-Luc Godard, avait quelque chose d'ironique. La symbolique serait encore plus forte si Almodovar décidait de remettre la Palme d’or à cette comédie burlesque et intelligente bien accueillie par les festivaliers et par la presse.
Le réalisateur de «The Artist» fait sienne la grammaire filmique godardienne pour raconter un Godard mi-réel mi-fantasmé. S'il n'était consacré par la récompense ultime, le film pourrait permettre en revanche à Louis Garrel d'obtenir le prix d'interprétation masculine qui jusqu'ici n'a pas réellement de rival sérieux. A part peut-être Jean-Louis Trintignant dans «Happy End» de Michael Haneke.