Les autorités ont appelé au calme mercredi et condamné les violences qui ont secoué des quartiers de Nantes après la mort mardi soir d'un jeune homme de 22 ans tué par un policier lors d'un contrôle.
Trottoirs jonchés de cendres, vitrines de magasins brisées, centre commercial à demi calciné... dans les trois quartiers du Breil, Dervallières et Malakoff, qui jouxtent le centre-ville, les habitants étaient indignés mercredi matin après la mort dans la nuit d'un jeune originaire de Garges-lès-Gonesse (Val d'Oise), touché par le tir d'un policier.
Le contrôle de police s'est déroulé "aux environs de 22H00" dans le quartier du Breil, dans lequel régnait "un climat de tension particulier" depuis une semaine après le mitraillage d'une façade par des hommes armés, a précisé lors d'une conférence de presse mercredi soir le procureur de Nantes, Pierre Sennès.
Le contrôle a été effectué par six CRS. L'homme a donné une fausse identité, et les policiers l'ont invité à les suivre pour vérifier son identité au commissariat, a-t-il expliqué.
Le conducteur aurait alors "cherché à se soustraire à ce contrôle en opérant à vive allure une marche arrière, dans une démarche de fuite", a-t-il précisé. Le procureur a noté qu'il était possible que le fait que l'homme soit sous le coup d'un mandat d'arrêt (délivré contre lui en juin 2017 pour "vol en bande organisée, recel et association de malfaiteurs") puisse expliquer "la logique de fuite".
ci-dessus
Un policier a alors suivi le véhicule avant de faire feu une seule fois sur le chauffeur, l'atteignant au cou, a relaté le procureur. Selon des sources proches du dossier, le conducteur aurait tenté de "prendre la fuite en reculant sur un fonctionnaire de police", ce que n'a pas confirmé le procureur qui s'est refusé à répondre à toute question.
Touché à la carotide, le conducteur est mort à l'hôpital vers 22H30. Le SRPJ de Nantes et l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) ont été saisis.
- "enquête approfondie" -
ci-dessus
"Nous sommes conscients que cette affaire est particulièrement grave", a souligné M. Sennès. Il a promis à la famille du jeune, qui, selon lui, appelle au calme dans les cités "une enquête approfondie" qui devra notamment déterminer "si l'usage de l'arme par le policier était ou non légalement fondée".
Un appel à témoins a été lancé par les enquêteurs et l'IGPN et la PJ ont déjà réalisé "de nombreuses auditions" mercredi, a-t-il ajouté.
Mercredi soir, une marche rassemblant environ 200 personnes a eu lieu de Garges-lès-Gonesse jusqu'au commissariat de Sarcelles, la commune voisine. Il y a eu "quelques tensions sur place", mais "pas d'exactions notables" à part "quelques jets de projectiles", a précisé à l'AFP une source policière. La manifestation était en cours de dispersion depuis 21H30, a ajouté la préfecture.
Mercredi matin, devant le 68 rue des Plantes où s'est déroulé le contrôle, le muret d'une maison était complètement défoncé et des restes de grenades tirées par les forces de l'ordre jonchaient le sol.
Interrogés par l'AFP, les habitants remettaient fortement en question la version de la légitime défense donnée initialement par la police. Selon une femme qui a filmé la scène il n'y avait "pas de CRS derrière la voiture, il n'a écrasé personne. Il y a eu un seul coup de feu". Une autre assure qu'il "était à l'arrêt" et "a donné ses papiers".
- "inadmissible" -
"Dans tous les quartiers de France, c'est comme ça. La facilité pour la police, c'est tirer. C'est inadmissible", lâche une habitante, les larmes aux yeux, tirant une poussette.
ci-dessus
Aussitôt après les faits, au Breil, les policiers ont essuyé des tirs de projectiles et de cocktails Molotov. Une trentaine de voitures et une vingtaine de locaux et bâtiments, dont une mairie annexe et deux centres commerciaux, ont été incendiés ou dégradés, selon la police. Le calme est revenu vers 3H00.
Mercredi vers 17H00, un regain de tensions a été observé dans le quartier du Breil avec la mise à feu d'un véhicule sur un parking. Un journaliste a été frappé au ventre et au visage par un homme seul. Les forces de l'ordre ont fait usage de grenades lacrymogènes et on essuyé quelques jets de pierre.
En déplacement au Breil, la maire PS de Nantes, Johanna Rolland, a estimé que la priorité était "le retour au calme".
Le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, a condamné "avec la plus grande fermeté" ces violences tandis que la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, appelait aussi "au calme", tout comme Nicole Klein, la préfète de Loire-Atlantique qui a précisé qu'un dispositif "conséquent" de forces de l'ordre était "mis en place 24H/24H".
L'IGPN avait fait état la semaine dernière d'une plus grande utilisation de certaines armes par les policiers, comme le pistolet automatique, avançant pour la première fois le chiffre des personnes tuées lors d'interventions policières, soit 14 morts recensés depuis juillet 2017.
asl-grd-aag-we-tll/jcc