Le parquet de Paris a requis le renvoi en procès contre le réalisateur Christophe Ruggia. Le réalisateur avait été mis en examen, le 16 janvier 2020, pour agressions sexuelles sur mineure de 15 ans par personne ayant autorité sur Adèle Haenel.
Nouveau rebondissement dans l’affaire Adèle Haenel. Le parquet de Paris a requis le renvoi en correctionnelle contre le réalisateur Christophe Ruggia pour agressions sexuelles aggravées sur l'actrice, quand elle était jeune adolescente, a appris l'AFP de sources proches du dossier jeudi, confirmant une information de RMC.
«Nous ne souhaitons pas faire de commentaire», ont réagi Mes Fanny Colin et Orly Rezlan, avocates du réalisateur jointes par l'AFP, au sujet de ce développement concernant le dossier qui avait provoqué un séisme en 2019 dans le cinéma français, resté jusque-là imperméable au mouvement #MeToo.
Selon ces sources proches du dossier, deux circonstances aggravantes sont retenues par le parquet : la minorité d'Adèle Haenel au moment des faits reprochés, à partir de ses 12 ans, et la position d'autorité de Christophe Ruggia, qui est le premier réalisateur à l'avoir fait tourner dans le film «Les Diables» (2002).
Alors âgé de 36 à 39 ans, il l'a reçue tous les samedis après-midi pendant près de trois ans, de septembre 2001 à février 2004. Les réquisitions évoquent un «caractère systématique» des attouchements lors de ces «visites».«Il commençait à me caresser les cuisses en remontant vers mon sexe, comme ça, l'air de rien. Il touchait alors aussi mon sexe, il m'embrassait dans le cou (...) et il touchait ma poitrine», a raconté Adèle Haenel devant les enquêteurs. Le parquet souligne aussi des «épisodes de chantage affectif lors de festivals à Marrakech et Yokohama».
Coup de pied dans la fourmilière
Refusant dans un premier temps de saisir la justice, Adèle Haenel avait finalement porté plainte quelques jours après l'ouverture d'une enquête préliminaire par le parquet de Paris, le 6 novembre 2019. Après la déflagration des accusations, Christophe Ruggia s'était décrit comme «sans doute le premier admirateur d'Adèle Haenel» et avait réfuté «les gestes physiques et le comportement de harcèlement sexuel dont elle (l)'accuse». Il avait reconnu avoir «commis l'erreur de jouer les pygmalions (...). Emprise du metteur en scène à l'égard de l'actrice qu'il avait dirigée et avec laquelle il rêvait de tourner à nouveau», avait-il écrit. Il avait été mis en examen le 16 janvier 2020 pour «agressions sexuelles sur mineur de 15 ans par personne ayant autorité sur la victime», et placé sous contrôle judiciaire.
Adèle Hanel avait en quelque sorte fait entrer, fin 2019, le mouvement #MeToo dans le cinéma français, resté jusque-là éloigné de cette libération de la parole, malgré de premières accusations retentissantes, comme celles, en 2018, visant le cinéaste et producteur Luc Besson, écartées depuis par la justice française. Adèle Haenel a plusieurs fois dénoncé «la complaisance généralisée du métier vis-à-vis des agresseurs sexuels», y compris lors d'une sortie fracassante contre Roman Polanski lors de la cérémonie 2020 des César.
Depuis, de nouvelles plaintes continuent de ponctuer l'actualité. Mardi, c'est Judith Godrèche qui a dénoncé des abus sexuels entre 1986 et 1992 de la part des réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon, qui contestent les accusations. Une enquête est ouverte à Paris.