Le palmarès du World Press Photo 2022 a été dévoilé ce jeudi 7 avril à La Haye, aux Pays-Bas. La Canadienne Amber Bracken a remporté le World Press Photo de l'année, le prix le plus prestigieux de ce concours pour un(e) photojournaliste.
Chaque année, le jury de de cette compétition de renommée mondiale dédiée au photojournalisme et à la photo documentaire, récompense les meilleures œuvres photographiques soumises à son expertise dans quatre catégories. Pour cette édition 2022 du World Press Photo, ce ne sont pas moins de 64.823 images qui ont été déposées par 4.066 photographes venus de 130 pays.
Cette année, une nouvelle stratégie régionale a été mise en place afin de désigner par différents jurys des gagnants régionaux (Afrique, Asie, Europe, Amérique centrale et du nord, Amérique du sud, Asie du sud-est et Océanie) dans le but d'apporter un meilleur équilibre géographique.
Ce sont donc parmi les 24 gagnants régionaux dans chacune des quatre catégories du concours que le jury a sélectionné les 4 lauréats finaux. Chacun d'entre eux a reçu une récompense de 6.000 euros et verra son travail exposé à Amsterdam à partir du 15 avril, avant que l'exposition ne soit montrée dans le monde entier.
Voici les gagnants :
world press photo - photo de l'année
© Amber BRACKEN / The New York Times / World Press Photo / AP
Publié par le New York Times, ce cliché de la photographe documentaire canadienne, Amber Bracken, a été primé par les membres du jury de la plus haute distinction de la compétition.
Sur la droite de cette image, se trouvent des croix auxquelles ont été pendues des robes de petites filles, érigées le long d'une autoroute de Colombie-Britannique en mémoire des enfants indigènes décédés au pensionnat de Kamloops, une petite ville canadienne.
Sur la gauche de la photo, un arc-en-ciel plonge près du lieu où a été découvert en mai 2021, un charnier regroupant les restes de quelque 215 enfants autochtones pris en charge par cet ancien pensionnat.
«Cette image représente un moment calme de réflexion (...) sur l'histoire de la colonisation non seulement au Canada, mais dans le monde entier», a déclaré la jurée Rena Effendi, photojournaliste azerbaïdjanaise.
Cette macabre découverte a été la première d'une série qui a forcé les Canadiens à affronter leur passé colonial. De nombreuses enquêtes sur ces anciens pensionnats réservés aux enfants autochtones sont en cours à travers le pays. Les autorités canadiennes estiment que plus de 4.000 enfants pourraient être portés disparus.
«Je n'ai pas l'impression que c'est une photo qui pourrait m'appartenir», a déclaré Amber Bracken à l'AFP. «C'était une représentation de quelque chose qui a été créé par la communauté pour honorer et se remémorer leurs enfants perdus», a-t-elle indiqué.
world press photo - série de l'année
© Matthew ABBOTT / National Geographic / Panos Pictures / World Press Photo / AP
Le premier prix dans la catégorie Série de l'année a été remis à Matthew Abbott, réalisateur australien de documentaires pour son reportage sur le peuple Nawarddeken, propriétaire traditionnel d'Arnhem, dans le nord de l'Australie. Ce reportage met en évidence comment ces aborigènes vivent et utilisent le feu pour protéger efficacement leur environnement contre le changement climatique.
«C'est une histoire ancienne. En 2008, alors que je vivais et travaillais à Arnhem, j'ai été invité à faire une sortie dans la brousse avec le peuple Nawarddeken. C'était ma première rencontre avec celui-ci et j'ai pu observer à quel point, il prenait soin de la nature. Plus de 10 ans plus tard, je suis revenu sur place, cette fois avec National Geographic, pour réaliser un reportage sur la manière dont les aborigènes Nawarddeken brûlent leurs terres de manière concertée et réfléchie afin de prévenir les incendies de forêts destructeurs. Tout ce processus aboutit à sauver l'environnement», a confié Matthew Abbott sur le site du World Press Photo.
world press photo - projet à long terme de l'année
© Lalo de ALMEIDA / Folha de Sao Paulo / Panos Pictures / World Press Photo / AP
Le prix Projet à long terme de l'année a été décerné au Brésilien Lalo de Almeida. Intitulée «Amazonian Dystopia», son œuvre en noir et blanc qui s'étend sur plus de 12 ans, témoigne de la déforestation ininterrompue de l'Amazonie,soulignant les effets dévastateurs sur l'écosystème et les conditions de vie des populations indigènes locales.
«Vous ne pouvez pas séparer les questions environnementales et sociales comme s'il s'agissait de deux choses différentes. Vous voyez que la majorité des villes qui ont des niveaux élevés de déforestation ont également les niveaux de pauvreté les plus élevés. Ce sont donc des éléments complètement liés : la pauvreté, la violence, la dégradation de l'environnement et la déforestation», a déclaré Lalo de Almeido sur le site du World Press Photo.
world press photo format libre de l'année
© Isadora ROMERO / World Press Photo / AP
La photographe équatorienne Isadora Romero est la lauréate du prix de la catégorie Format Libre de l'année. Ce prix récompense sa vidéo intitulée «Blood is a seed» composée à partir de photos numériques et argentiques organisées en séquences accompagnés d'extraits audio. Cette œuvre composite interroge sur les conséquences de la colonisation telles que la perte des savoirs agricoles ancestraux, la disparition des semences traditionnelles, les migrations forcées, dont la photographe a pu être témoin lors d'un voyage dans le village de ses ancêtres d'Une en Colombie.