Il avait notamment incarné le frère Luc dans «Des hommes et des dieux» de Xavier Beauvois, rôle pour lequel il avait reçu le César du meilleur acteur dans un second rôle en 2011. Le comédien Michael Lonsdale est mort ce lundi à l'âge de 89 ans.
L’homme à la chevelure et à la barbe blanche est décédé à son domicile, à Paris, a précisé son agent Olivier Loiseau à l'AFP. En soixante ans de carrière, il a incarné plus de 200 rôles au cinéma, jonglant entre les films expérimentaux et populaires, au théâtre ou encore à la télévision. Baptisé à 22 ans, cet acteur à la foi chrétienne chevillée au corps a obtenu en 2011 un César du Meilleur acteur dans un second rôle pour son interprétation de Frère Luc, moine libre et héroïque, assassiné à Tibéhirine dans «Des hommes et des dieux», Grand Prix à Cannes en 2010.
A plusieurs reprises, il a endossé la soutane («Le Procès» d'Orson Welles, 1962), la robe de bure («Le Nom de la rose» de Jean-Jacques Annaud, 1986), arboré la pourpre des cardinaux («Galileo» de Joseph Losey, 1974), allant jusqu'à interpréter l'archange Gabriel dans «Ma vie est un enfer» de Josiane Balasko (1991).
Eclectique, il a porté bien d'autres habits. Tour à tour policier, assassin, vice-consul, chapelier, juge ou duc, il a incarné aussi le «méchant» dans un James Bond («Moonraker», 1979) et s'est prêté, les fesses à l'air, à une séance sadomasochiste dans «Le Fantôme de la liberté» de Luis Bunuel.
Vieillard courbé et doté d'un bouc généreux, ce célibataire sans enfant apparaissait encore en 2015 dans un film de Bouli Lanners, «Les Premiers Les Derniers», puis l'an dernier dans un court métrage pour l'Opéra de Paris, «Degas et Moi», d'Arnaud des Pallières.
marguerite duras était fan de cet homme timide
A voir ce géant barbu au moelleux vocal stupéfiant, on imagine mal des débuts laborieux. Car s'il veut croire en son étoile, d'autres ne voient chez lui qu'un jeune homme timide.
Né à Paris le 24 mai 1931, d'une liaison entre un officier anglais et une Française, Michael Lonsdale, parfaitement bilingue, est élevé à Londres, puis au Maroc où, en 1942, les soldats américains lui font découvrir les films de John Ford, Cukor ou Hawks. Revenu à Paris en 1947, cet élève rétif, sans même le certificat d'études, ne sachant rien de Molière ou de Racine, fréquente son oncle Marcel Arland, directeur de la NRF (revue littéraire éditée par Gallimard). Il rattrape rapidement ses lacunes.
Il s'inscrit aux cours de la professeure de renom Tania Balachova qui l'aide à dépasser sa grande timidité. Il y rencontre notamment Delphine Seyrig, Jean-Louis Trintignant, Stéphane Audran. Le voilà sur les planches en 1955 dans «Pour le meilleur et pour le pire» de Clifford Odets. Il se passionne pour les expériences radicales : le metteur en scène Jean-Marie Serreau le retient pour «L'Avenir est dans les œufs» et «Amédée ou Comment s'en débarrasser» d'Eugène Ionesco. Vient Samuel Beckett («Comédie», «Va et vient»), qui lui fait découvrir les silences, ces contrepoints qui renforcent le poids des mots.
Il devient l'acteur fétiche de Marguerite Duras («L'Amante anglaise»), sa complice avec laquelle il partage des fous rires.
De François Truffaut à Louis de Funès
Au cinéma, Michael Lonsdale multiplie les expérimentations : il tourne avec Jean-Pierre Mocky («Snobs !»), Orson Welles («Le Procès»), François Truffaut («La Mariée était en noir», «Baisers volés»), Louis Malle («Le souffle au cœur»), Jacques Rivette («Out 1») encore Jean Eustache («Une sale histoire»).
Il donne la réplique à Louis de Funès dans «Hibernatus» (Edouard Molinaro) et s'amuse dans «Le mystère de la Chambre jaune» (Bruno Podalydès), avec Catherine Breillat («Une vieille maîtresse»), ou encore avec le jeune Pio Marmaï («Maestro»).
Artiste-peintre, ce grand connaisseur de Saint-John Perse et Saint Jean de La Croix, prête sa voix à d'innombrables documentaires, livres-audio, lit et enregistre Montaigne, Nietzsche, Proust, ou Saint François d'Assise.
Eveillé à la foi par une marraine aveugle, il rejoint le Renouveau charismatique en 1987 et fonde «Magnificat» un groupe de prière destiné aux artistes.