Pour Mounia Youssef, photographe et artiste libano-togolaise résidant et travaillant au Bénin, les cheveux «sont les reflets de l'âme», et surtout une revendication de la féminité et de l'identité noire, dont elle a fait son combat.
Ainsi, ses dessins, illustrations et portraits, photographiés entre le Bénin, le Togo et le Ghana de 2016 à 2019 honorent et font la part belle aux cheveux afro, sous toutes leurs formes.
Ils sont exposés jusqu'à la fin de l'année à Grand Popo, dans le sud-ouest du Bénin, petite ville côtière où l'émancipation des femmes est loin d'être un pari gagné.
Dans les allées du centre culturel Villa Karo, des dessins très stylisés et minimaliste présentent des portraits de femme, toutes tenant fermement le célèbre peigne afro, devenu au fil du temps le symbole du mouvement des droits civiques aux Etats-Unis et du Black Power.
Sur d'autres toiles, des slogans féministes, pour certains empruntés à la communauté noire américaine («More power to Women all over the world», «Emancipate Yourself from Beauty Slavery», ou «Ne nous libère pas, on s'en charge») sont imprimés et retravaillés.
Changer comportements et mentalités
Pour Mounia, l'art, «de la photographie au graphisme», est avant tout une «revendication».
Et pour elle, glorifier les cheveux naturels afro tend à «créer des interrogations» qui, elle l'espère, pourront «changer les comportements et les mentalités».
«L'art a un grand impact sur les individus dans la société dans laquelle nous vivons. Les choses changent grâce à l'art, les mentalités changent», défend-elle.
Dans la salle d'exposition, de nombreuses femmes, mais aussi des hommes, des étudiants et de jeunes enfants.
Ghislain Tomedé a convié ses élèves d'un centre de formation en sport et en art.
«C'est positif pour nous d'amener les enfants ici», assure-t-il. «A travers ces photographies et ces impressions, ils découvrent la beauté du naturel. Ils comprendront que pour se faire désirer et belle, on n'a pas besoin d'additifs».
Cette exposition peut «aider les jeunes filles à comprendre pourquoi il faut rester naturel et garder son identité», applaudit la curatrice Georgette Ablavi.
Et le discours prend forme. Océane Francisco, 14 ans, est déjà une adepte. «Quand je vois les femmes africaines avec leurs cheveux naturels, je suis très fière», se targue l'adolescente.
En rencontrant des dizaines d'élèves, majoritairement des filles, pour un atelier d'échanges sur la beauté nature, Mounia veut "dès à présent semer des graines pour que les enfants fleurissent et donnent de bons fruits".
«Je ne suis pas dans un positionnement de jugement, tout le monde est libre de faire ce qu'il veut», souligne-t-elle toutefois.