Après un mois de février plutôt calme au rayon des nouveautés manga, mars promet de contenter les fans et les amateurs de bonnes BD. Sept séries, inédites ou rééditées, méritent toutes leur attention ce mois-ci.
Slam Dunk
© 1993 by Takehiko Inoue and I.T. Planning, Inc.
Tout bon manga portant sur un sport commence par une rivalité… sur fond d’amitié inavouée. Et celle des collégiens Hanamichi Sakuragi et Kaede Rukawa a su marquer durablement les fans du genre. Les éditions Kana rééditent ce mois-ci Slam Dunk, manga qui est au basket ce que Captain Tsubasa (Olive et Tom en France) est au football.
A la fois rebelle et malchanceux en amour, le jeune Hanamichi entend séduire celle qu’il considère comme la seule fille digne d'intérêt, la belle Aruko Hakagi. Toutefois, ce géant au cœur d’artichaut va tomber de haut lorsqu’il découvre que celle-ci n’a d’yeux que pour le beau Kaede Rukawa, champion de basket du collège. De cet imbroglio amoureux naîtra la passion du dribble, des shoots et des dunks.
Pourquoi il faut le (re)lire :
Manga phare des années 1990 avec 120 millions d’albums vendus dans le monde, Slam Dunk est devenu culte pour les amateurs de basket. A l’époque le jeune mangaka Takehiko Inoue faisait montre d’un talent impressionnant, se surpassant tomes après tomes à l’instar des joueurs qu’il mettait en scène, au fil de planches d’une qualité indéniable pour un shônen. L’auteur, qui sera par la suite multiprimé pour son autre grand œuvre Vagabond (éd. Delcourt/Tonkam), déroule un récit passionnant. Et ce qui part d’une rivalité amoureuse pour la douce Aruko Hakagi, mènera le duo Hanamichi-Rukawa à des duels mémorables sur le parquet.
Kana prend ici la sage décision de rééditer un classique du manga sportif, avec pour modèle la Star Edition japonaise. Celle-ci a pour particularité de rassembler la totalité de la série sur 20 tomes (au lieu des 31 originaux), dont chacun correspond à un arc narratif complet.
Slam Dunk – Star Edition, de Takehiko Inoue, éd. Kana, tomes 1 et 2 disponibles
Errance
© 2017 Inio Asano
Fukazawa Kaoru a su faire de sa passion pour le manga, son métier. Problème, cet auteur, devenu célèbre, est aujourd'hui en panne d'inspiration. Sa «muse» est partie et avec ce départ arrive l'éternelle remise en question d'un artiste et de sa capacité à rebondir. C'est sur ce postulat que commence Errance, dernier manga du très talentueux Inio Asano. Un récit que l'auteur japonais de 38 ans rapproche de sa propre vie, autour d'une histoire métaphysique, en miroir de sa propre vie.
Pourquoi il faut le lire :
Considéré comme l'un des meilleurs mangaka de sa génération, Inio Asano (Bonne Nuit PunPun et Dead Dead Demon's Dedededestruction) marque une pause introspective dans sa brillante carrière. Errance est donc le récit semi-autobiographique d'un auteur à l'approche de la quarantaine. Cette mise en abyme captivante, portée par des planches sublimes, exprime le spleen qui habite un jour tout artiste, partagé entre l'envie de plaire à un public toujours plus large et celle qui pourrait le conduire à produire une œuvre sans compromis. Superbe.
Errance, de Inio Asano, éd. Kana, récit en un tome disponible le 15 mars.
La lanterne de Nyx
NYX NO LANTERN © 2016 Kan Takahama
Miyo possède un don : celui de connaître l’histoire d’un objet en l’effleurant des doigts, un pouvoir spécial qui lui permet aussi de lire l’avenir. La vie de cette jeune japonaise modeste, orpheline et analphabète, va basculer le jour où elle trouve son premier travail chez un brocanteur aux goûts exotiques. Dénommé Momotoshi, cet iconoclaste au passé mystérieux, se plaît à parcourir l’Europe pour en ramener toutes ses excentricités et inventions.
Prenant place dans le Japon de la fin du XIXe siècle, La Lanterne de Nyx témoigne d’un pays dont la curiosité commençait à s’ouvrir vers le Vieux Continent, alors en pleine révolution industrielle. Commence alors le récit passionnant de cette jeune ingénue qui témoigne des trésors que l’homme a été capable de d’imaginer et de créer.
Pourquoi il faut le lire :
Avec La Lanterne de Nyx, la mangaka Kan Takahama livre l’un des mangas les plus intéressants de ce début d’année, développant son talent sur des cases d’une belle délicatesse et sur grand format. Entre récit historique et aventure shojo, elle trouve ici un compromis intéressant et singulier pour éviter les écueils d’une énième histoire d’amour mielleuse. Surtout, Kan Takahama offre au catalogue des éditions Glénat, un manga attachant qui se plaît à dépeindre, avec une certaine mélancolie, ce qu’il y a de mieux en l’humanité : son imagination débordante. Une vraie réussite.
A noter, l'autrice a déjà profité de la traduction de deux oneshots déjà très remarqués en France : Le Dernier Envol du Papillon ainsi que Tokyo, Amour et Libertés. Tous deux parus chez Glénat.
La Lanterne de Nyx, de Kan Takahama, éd. Glénat, tome 1 disponible
Le bateau de Thésée
© 2019 Toshiya Higashimoto. All rights reserved. First published in Japan in 2017 by Kodansha Ltd., Tokyo. Publication rights for this french edition arranged through Kodansha Ltd., Tokyo.
Peut-on vivre en endossant moralement la responsabilité de son père, condamné pour le massacre de 21 personnes ? C’est sur cette question, en forme de critique acerbe d’une société japonaise sévère sur ce sujet, que Le Bateau de Thésée débute. Le nouveau manga des éditions Vega plonge dans la quête de rédemption menée par Shin Sano, pour réhabiliter son père, emprisonné à vie à la suite d’une enquête qui comporte de nombreuses zones d’ombre.
Le jeune homme se lance dans une investigation qui le mènera sur les traces de son enfance sur l’île d’Hokkaido. Lieu où il a grandi avec sa mère, tout en étant jugé par le regard des autres, en raison des actes criminels présumés de son géniteur. A ce passé douloureux se mêle un autre combat, celui que Shin mène pour conserver la garde de son enfant, alors que sa femme est morte en couche.
Pourquoi il faut le lire :
Récit tragique et enquête policière s’entrecroisent dans Le Bateau de Thésée. Les éditions Vega donnent à lire un récit qui s’annonce passionnant. Au crayon, Toshiya Higashimoto livre des planches claires et précises, tout en offrant un regard intimiste sur le destin de cette famille déchirée, toujours jugée par la société. Avec sa narration en miroirs, où l’auteur renvoie tour à tour aux événements du passé, tout en explorant le présent, Le Bateau de Thésée dénote dans le paysage des mangas souvent aseptisés, en interrogeant les fondements de la société japonaise, parfois en décalage avec le monde actuel.
Le bateau de Thésée, de Toshiya Higashimoto, éd. Vega, tome 1 disponible.
Bip-Bip Boy
PIKO PIKO SHOUNEN © Rensuke Oshikiri 2009 by Ohta Publishing Co., Tokyo
Des salles d’arcades aux consoles, en passant par les jeux électroniques, Rensuke Oshikiri a consacré sa vie à explorer les jeux vidéo. Dans Bip-Bip Boy, le mangaka se raconte à travers différentes saynètes bourrées d’humour, où il dépeint tour à tour sa vie de «loser» en amour, mais de «winner» manettes en main.
De cette passion débordante, il nous offre une folle traversée des années 1980, 1990 et 2000 en poussant le bouton «power» des Game & Watch, Famicom, PC Engine, Game Boy, Super Famicom, Saturn, PlayStation et Xbox 360, dans le pays qui a su propulser pixels et polygones du «simple» jeu pour enfant au rang d’art universel.
Pourquoi il faut le lire :
Bip-Bip Boy est le nouveau pari des éditions Omaké Books, qui éditent ici leur premier manga. Et la maison fondée par le journaliste Florent Gorges, spécialiste de l’histoire des jeux vidéo, trouve ici un récit taillé sur mesure pour les amoureux de ce loisir culturel. Page après page, Rensuke Oshikiri renvoie aux (vieux) joueurs les moments cocasses que beaucoup d’entre eux ont vécus durant leur jeunesse.
Que ce soit l’envie irrépressible d’acheter une console qu’on ne possède pas encore ou les rivalités entre vétérans des salles d’arcade, l'auteur - également derrière la série High Score Girl (Netflix) - dépeint avec justesse une vie dédiée à l’un des meilleurs divertissements du monde. Une lettre d’amour et d’humour adressée au monde du jeu vidéo, que tout gamer se doit de lire, avec une nostalgie certaine au fond du cœur.
Bip-Bip Boy, de Rensuke Oshikiri, éd. Omaké Books, tome 1 disponible.
Persona 3
© ATLUS © SEGA All rights reserved. © Shuji SOGABE 2007-2008
Chaque jour, après minuit, sonne une 25e heure. Cachée de tous, celle-ci ouvre une dimension parallèle qui libère ses monstres, ceux de nos cauchemars. Un temps qui n’échappe pas à certains individus dotés d’un pouvoir extraordinaire, leur permettant de voyager dans ce monde parallèle et d’y défier ces entités.
C’est sur cette légende urbaine que se fonde la série de jeux vidéo Persona, que les adeptes de jeux de rôle japonais connaissent bien. Conçu comme le pendant cross media de cette saga, le manga Persona 3 adapte l’un des meilleurs épisodes. On y découvre ici le quotidien du jeune Minato, qui devra s’allier avec un groupe de justiciers noctambules pour défaire ces créatures nocturnes.
Pourquoi il faut le lire :
Alors que le 5e opus canonique de cette saga a cartonné auprès de gamers (plus de 2,2 millions d’exemplaires vendus dans le monde), les éditions Mana Books font le choix d’éditer les mangas dérivés de cette série vidéoludique. Persona 3 se livre donc enfin dans une version française de qualité, servie par les dessins chiadés de Shuji Sogabe. La trame scénaristique reste la même que celle du jeu d’origine, et livre en filigrane une réflexion sur la quête d’identité liée à l’adolescence. Quand le récit surnaturel croise la chronique sociale.
Persona 3, de Shuji Sogabe, éd. Mana Books, tome 1 et 2 disponibles le 21 mars.
Félin pour l'autre
Nekottake ©2016 Wataru Nadatani/Shogakukan
A la fois rois des câlins et capables de cultiver une certaine distance avec les humains, les chats fascinent et savent se faire désirer. Et si ces petites boules de poils aiment à se lover tout contre leur maîtres et même des inconnus, elles n'accordent même pas un regard au jeune Kensuke Fuji. Un comble pour cet adolescent fou des chats, qui va s'efforcer de tout faire pour enfin pouvoir les carresser...
Félin pour l'autre !, nouveau manga des éditions Doki-Doki, dépeint le quotidien de ce passionné qui se liera d'amitié avec le «maître-chat», Jin Nekoya. Un excentrique qui lui enseignera les secrets du comportement animalier à travers un «art-martial» spécial : le Byôken-dô (la Voie du Chat).
Pourquoi il faut le lire :
Les situations cocasses s'enchaînent dans Félin pour l'autre ! et les amis des bêtes devraient craquer pour ce manga amusant. Sur sa planche à dessins, Wataru Nadatani se plaît à jouer au chat et à la souris, avec une galerie de personnages et d'animaux tous plus loufoques et attachants les uns que les autres. Une aventure fraîche et distrayante pour celles et ceux qui veulent faire du langage félin, leur langue vivante n°1.
Félin pour l'autre !, de Wataru Nadatani, éd. Doki-Doki, tome 1 disponible.