Son torse nu et son allure dégingandée restent aussi célèbres que son nom. Depuis près de quarante ans, James Osterberg, alias Iggy Pop, s’impose comme l’une des figures incontournables de la scène rock internationale. Sur scène, il exulte, prêt à toutes les folies pour enthousiasmer ses fans survoltés. Iggy Pop fait figure de légende dans l’univers punk-rock.
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Grandeur et décadence
A l’instar de Mick Jagger, leader des Rolling Stones, ou d’Ozzy Osbourne (Black Sabbath), Iggy Pop a mené une existence «sexe, drogue et rock’n roll». Pourtant, rien ne prédestinait ce fils de professeur d’anglais à embrasser une telle carrière. Elevé à Ann Arbor, dans la banlieue de Detroit aux Etats-Unis, l’adolescent se passionne très tôt pour la musique. Au début des années 1960, il devient le batteur officiel des groupes The Iguanas et The Prime Movers. Mais il faut attendre 1967 pour voir Iggy Pop troquer sa baguette pour un micro, et connaître ses premiers succès.
Vidéo : « I Wanna Be Your Dog » des Stooges
Le musicien et désormais chanteur s’associe en effet aux frères Scott et Ron Asheton pour créer un groupe aujourd’hui culte et influent, The Stooges. Avec notamment le guitariste James Williamson, les rockers signent les tubes « I Wanna Be Your Dog » et « 1969 » et enchaînent les albums et les tournées. Le troisième album des Stooges, Raw Power, fut enregistré en 1972 à l’initiative de David Bowie, qui eut la bonne idée de tendre une main au groupe qui était alors au plus mal. « Search & Destroy », « Gimme Danger », « Penetration » et « Death Trip » sont les premières pierres de l’édifice punk que parachèveront trois ans plus tard les Sex Pistols. Raw Power est un concentré de rock rageur brutal habité par une énergie animale, avec des rythmes à faire vibrer les côtes, des guitares tranchantes, une noirceur absolue et des paroles délivrées par une voix de stentor. «Le disque le plus violent de tous les temps», écrivit Philippe Manœuvre. Mais Iggy Pop, adepte du «stage diving» («plongée de la scène»), s’enfonce dans la drogue et la dépression. Accro à l’héroïne, il se retrouve à dormir dans la rue. En 1974, les Stooges se séparent, laissant l’Iguane seul face à ses démons.
Vidéo : « Search and Destroy » des Stooges
Un ange gardien nommé Bowie
Alors en cure en hôpital psychiatrique, Iggy Pop rencontre la star androgyne David Bowie. L’interprète de Ziggy Stardust le soutient, l’encourage et le pousse à se lancer dans une carrière solo. Ensemble, ils partent pour Berlin dans le cadre de la tournée Station to Station, du nom du dixième album de David Bowie. En 1977, Iggy Pop revient sur le devant de la scène avec la sortie de trois albums baptisés The Idiot, Lust For Life et Kill City. Et dans l’ombre se cache toujours son ami producteur et collaborateur, David Bowie. L’ex-leader des Stooges renoue avec le succès grâce à Blah Blah Blah (1986), Instinct (1988), American Caesar (1993) ou encore Naughty Little Doggie (1996).
Vidéo : « Nightclubbing » d’Iggy Pop
En parallèle de sa carrière musicale, l’icône du punk-rock s’essaie au cinéma. Il apparaît dans Cry-Baby (1990) de John Waters avec Johnny Depp, The Crow : City Of Angels (1996) de Tim Pope, Dead Man (1995) et Coffee And Cigarettes (2004) de Jim Jarmusch. Il signe même certaines bandes originales de film, dont le célèbre titre In The Death Car, entendu dans Arizona Dream (1993) d’Emir Kusturica.
Vidéo : Iggy Pop dans Coffee and Cigarettes de Jim Jarmusch
La soixantaine épanouie
Après une séparation de près de trente ans, les Stooges se reforment en 2003 avec Mike Watt pour bassiste, lequel remplace Dave Alexander. Plus unis que jamais, ils reviennent sous le nom Iggy and the Stooges et se lancent à l’assaut des scènes du monde entier avec la même fougue et la même énergie. Quatre ans plus tard, ils donnent une suite à leur précédent album, Raw Power (1973), et sortent The Weirdness.
Le groupe revient en mars 2010 avec une compilation inédite : Move Ass Baby. Les fans y ont découvert quatorze morceaux inédits enregistrés à Detroit en 1973, quelques mois avant leur séparation. Le groupe y fait des reprises du bluesman et guitariste américain Bo Diddley, de Bob Dylan, du groupe rock Cream (avec Eric Clapton à la guitare) ou encore du bluesman Paul Butterflied. D’autres morceaux complètent l’album : « Old King », « Live Forever », « I Come From Nowhere » ou « Wild Love ». La plupart de ces titres restaient inconnus jusqu’à maintenant et, semble-t-il, le groupe ne les avait jamais enregistrés officiellement. En prime, un morceau solo du guitariste du groupe à ses débuts, James Williamson.
Vidéo : « Les Feuilles mortes » d’Iggy Pop
En 2009, l’inoxydable Iggy Pop est de retour avec un nouvel album. C’est en partie influencé par La possibilité d’une île de Houellebecq, «un très bon livre qui parle de la mort, de sexe, de la fin de la race humaine et de trucs assez drôles», explique le «parrain du punk», que Préliminaires a vu le jour. Juste après avoir fini la lecture du roman de Michel Houellebecq, le rocker a été sollicité pour participer à la bande originale d’un documentaire consacré à l’écrivain. Mais l’«iguane», qui dit s’être senti très proche du personnage central du livre, un entertainer (homme de spectacle) sur le déclin, a poussé plus loin le projet pour livrer un album complet. Préliminaires «dévoile mon amour pour la culture française», commente-t-il.
Vidéo : « I Want to go to the Beach » d’Iggy Pop
C’est donc dans la langue de Molière qu’Iggy Pop ouvre son album avec une reprise des Feuilles mortes, de Prévert et Kosma. Musicalement – serait-ce lié au décès du guitariste Ron Asheton des Stooges ? – le chanteur surprend son monde, plus calme, voire plus dépressif que jamais, l’apothéose de mélancolie étant atteinte sur un émouvant « I Want to go to the Beach ». Préliminaires le voit donc abandonner la furie des guitares punk-rock pour une ambiance baignée d’influences blues (« He’s dead/she’s alive ») et jazzy. En témoigne le titre aux cuivres très New Orleans « King of the Dog », bien moins enragé que son célèbre « I Wanna be Your Dog », créé il y a plus de quarante ans avec les Stooges.
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