Michel De Jaeghere est le directeur du Figaro Hors-Série dont le nouveau numéro – Tolkien l’enchanteur - est consacré à l’univers du créateur de Bilbo le Hobbit.
Pourquoi avoir choisi de consacrer ce dernier hors-série à John Ronald Reuel Tolkien, l’auteur de Bilbo le Hobbit ?
L’adaptation au cinéma du Seigneur des Anneaux, et maintenant de Bilbo le Hobbit, a sensibilisé un très grand nombre de Français à l'oeuvre de Tolkien. Ce nouveau numéro du Figaro hors-série leur est destiné, qu’il s’agisse du public inconditionnel ou de ceux qui l'ont découvert par les films de Peter Jackson. De prime abord, on pourrait croire qu’il s’agit d’un univers enfantin, d’un « Harry Potter avant la lettre », avec ses monstres, ses dragons et ses magiciens à chapeaux pointus. Mais si les romans de Tolkien se rattachent certes à l’ « Heroic Fantasy », on y trouve aussi une profondeur, une ampleur, qui en font une œuvre littéraire à part entière.
Pourquoi les romans de Tolkien et leur adaptation au cinéma fédèrent un public aussi large ?
Cela tient probablement à la profondeur morale de l'œuvre. Les personnages de Tolkien ne sont pas tout d’une pièce, mis à part quelques « méchants » comme Soron qui incarne le mal absolu. Pour les autres, Tolkien met en scène la liberté humaine. Ses héros sont partagés, confrontés à des cas de conscience. Ils doivent choisir entre le bien et le mal, mais aussi entre plusieurs apparences de bien ou de moindre mal. Le monde de Tolkien est complexe et touche aux grandes questions qui sont au centre de la condition humaine. Le dépassement de soi y affronte l’égoïsme, et le dévouement l’appétit de pouvoir.
Du point de vue littéraire, c’est aussi une œuvre remarquable ?
C’est un conte fantastique d'une construction exceptionnelle. Le Seigneur des Anneaux et Bilbo le Hobbit ne sont que les parties émergées d’une œuvre immense. Dans des notes, qui n’ont été publiées qu’après la mort de Tolkien – le Silmarillon et l’Histoire de la Terre du Milieu – il avait imaginé et écrit toute l’histoire antérieure aux épisodes qu’il raconte dans ses romans. Il leur confère ainsi une profondeur historique, sans nul équivalent dans la littérature fantastique, qui permet de saisir la piété filiale des héros et l’attachement qu’ils portent à leurs ancêtres.
Dans ses films, Peter Jackson a-t-il été fidèle à l’œuvre de Tolkien ?
On reprochera toujours au cinéma d’imposer ce que la littérature permet d’imaginer. Certains puristes pourront donc éprouver ici et là quelques réticences au regard de l’œuvre sur laquelle ils ont rêvé. Mais l’adaptation demeure remarquable. Les batailles sont homériques. Les paysages d’une beauté à couper le souffle. C’est un très beau spectacle porté par une volonté de fidélité exceptionnelle au roman de Tolkien.
Le Figaro Hors-Série, "Tolkien l'enchanteur", décembre 2012. En kiosque.
Et aussi sur DirectMatin.fr :