A l'approche des fêtes, voici une sélection des meilleurs mangas à (s')offrir pour découvrir l'incroyable diversité des sujets traités par des auteurs japonais, toujours aussi prolifiques et imaginatifs.
Si vous aimez l’Histoire de France : "Innocent"
© 2013 by Shin-ichi Sakamoto/SHUEISHA Inc.
Charles-Henri Sanson est bourreau. Une charge qui, au XVIIIe siècle, était encore attribuée par le roi de France et qui échoit à sa famille depuis déjà plusieurs générations pour faire appliquer les peines sur la place publique. Mais le jeune homme (qui a réellement vécu entre 1739 et 1806) assure cette fonction à contrecœur, considérant les peines (décapitations, écartèlement…) comme le témoin de la barbarie humaine, surtout lorsque celles-ci s’appliquent à des innocents.
Pourquoi on aime : Magistral tant dans le ton que dans la forme, "Innocent", s’il poursuit dans cette voie, pourrait devenir un des chefs d’œuvre du manga. A commencer par le travail dantesque opéré sur le dessin par Shin’ichi Sakamoto (primé au Japon) qui place cette série très loin devant la concurrence.
On apprécie également de redécouvrir l’Histoire de France sous un angle méconnu, surprenant mais très violent. A ce titre, cette œuvre sans compromis s’adresse à un public averti. Mais au-delà de la cruauté liée à l’histoire de notre système judiciaire, Innocent invite à suivre le regard d’un homme, celui du bourreau du roi de France, décidé lui aussi à faire entrer son pays dans un nouveau monde.
"Innocent", de Shin’ichi Sakamoto, éd. Delcourt.
Si vous aimez le romantisme : "Le club des divorcés"
© by Kazuo Kamimura/Kamimura Kazuo Office
A 25 ans seulement, Yuko est tenancière d’un bar à hôtesses à Tokyo. Son nom, le Club des divorcés, attire de nombreux hommes à la recherche de l’amour ou d’une histoire d’un soir. Elle même divorcée dans le Japon des années 1970, Yuko est partagée entre l’idée de reconstruire sa vie avec un autre homme, sa fille qu’elle voit peu en raison de son travail nocturne et son business qui souffre de la crise.
Pourquoi on aime : Le grand Kazuo Kamimura, auteur de "Lady Snowblood", "Lorsque nous vivions ensemble" ou encore "Le fleuve Shinano", pose ici son trait délicat et poétique sur la vie d’une femme à une époque où la gent féminine souffrait de nombreux préjugées et du poids des traditions. Les jeunes divorcées avaient ainsi peu de chance de refaire leur vie dans une société japonaise essentiellement patriarcale. Une superbe fable romantique servie par l’un des maîtres du Gekiga, le manga à destination d'un public plus mûr.
"Le club des divorcées", de Kazuo Kamimura, éd. Kana.
Si vous aimez l’ambiance steampunk : "Levius"
Levius est un adolescent pensif, laconique et peu démonstratif. Pourtant, lorsqu’il monte sur un ring pour se battre, il a l’œil du tigre et brille telle une étoile aux yeux des spectateurs de boxe mécanique. C’est à travers ce sport de combat – qui implique que les adversaires possèdent des membres biomécaniques capables de booster leurs technique - que le mangaka Haruhisa Nakata nous invite à découvrir un monde différent du notre, où la révolution industrielle du XIXe siècle aurait ouvert la voie à diverses expérimentations scientifiques.
Pourquoi on aime : "Levius" a, a priori, toutes les caractéristiques du manga déjà lu et relu : un adolescent tourmenté, un sport de combat, le passage à l’âge adulte et un méchant arrogant. Et pourtant, le manga de Haruhisa Nakata a tout pour devenir culte tant il se révèle prometteur après avoir bouclé la lecture du premier tome. D’abord par son parti pris graphique étonnant, mêlant les effets de flou et des scènes d’actions aux cadrages singuliers. Ensuite par ses personnages attachants, grâce à une histoire très mûre qui prend le contre-pied des mangas calibrés pour plaire à un large public. Enfin, son ambiance sombre et son univers steampunk ouverts à toutes les sciences promettent de nombreuses surprises à l’avenir.
"Levius", de Haruhisa Nakata, éd. Kana.
Si vous aimez les classiques : "Arsène Lupin"
© 2013 Takashi Morita / Originally Published by HERO'S INC.
On ne présente plus Arsène Lupin, le plus célèbre des gentlemen cambrioleurs, dont les aventures ont été écrites par Maurice Leblanc. L’auteur a garni des pages entières de ses récits trépidants (17 romans et 39 nouvelles) entre 1905 et 1941.
Kurokawa vient de publier le premier tome (Tome 2 disponible le 10 décembre) de ses aventures en version manga. Cette première histoire adapte une pièce de théâtre écrite par Maurice Leblanc appelée "Le Diadème de la Princesse de Lamballe", où Arsène met en place un plan audacieux pour voler les œuvres d’arts d’un richissime bourgeois.
Pourquoi on aime : Arsène Lupin fête ses 110 ans cette année et il n’a pas pris une ride. La Belle Époque française revit brillamment sous le trait vif et détaillé de Takashi Morita. Le mangaka insuffle ainsi une fantaisie bienvenue pour faire revivre cet anti-héros intemporel, malfaiteur et bienfaiteur à la fois. En outre, les Japonais ont déjà montré à diverses reprises ("Lady Oscar", "Rémi sans Famille", "Les Misérables"…) leur capacité à coucher sur des planches de BD nos plus grands classiques avec brio.
"Arsène Lupin", de Takashi Morita, éd. Kurokawa.
Si vous aimez les animaux : "Chi, une vie de chat"
© Konami Kanata / Kodansha Ltd.
A tous ceux qui croient que s’adonner à la paresse est le hobby n°1 de tous les chats, lisez "Chi", il vous prouvera le contraire. Le manga dont le 12ème et dernier tome vient d’être édité chez Glénat, met en scène le petit matou malicieux Chi Yamada. Le titre de la mangaka Konami Kanata narre les pérégrinations de ce petit félin dans un monde d’humains décidément très bizarres.
Pourquoi on aime : Plébiscitée par le public (un million d’exemplaires vendus), la série de Konami Kanata se révèle très attachante. Si elle s’adresse principalement aux enfants (7-12 ans), sa lecture intéressera également leurs parents et les amoureux des animaux, grâce à un trait mignon et un humour omniprésent.
"Chi, une vie de chat", de Konami Kanata, éd. Glénat.
Si vous aimez les super-héros : "Last Hero Inuyashiki"
© Hiroya Oku / Kodansha Ltd.
Que feriez-vous si à 58 ans des entités extraterrestres vous dotaient (à votre insu) d’un nouveau corps entièrement robotisé et indestructible ? C’est à cette question que Hiroya Oku, auteur du célèbre manga "Gantz", tente de répondre dans "Last Hero Inuyashiki".
Raillé par sa famille qui le traite comme un moins que rien, considéré comme un employé sans ambition à qui les médecins ont diagnostiqué un cancer en phase terminale, M. Inuyashiki avait tout pour partir sans que personne ne le pleure. Et pourtant, l’homme va vivre un soir une rencontre du troisième type qui va radicalement changer sa fin de vie, en lui donnant véritablement une seconde chance et tous les pouvoirs.
Pourquoi on aime : Anti-super-héros par excellence, Inuyashiki n’a rien d’attachant ni d’admirable à première vue. Et pourtant, c’est là tout l’attrait de suivre le parcours de ce petit homme vieillissant et lâche qui va faire le choix de s’opposer au mal grâce à ses nouveaux pouvoirs.
Quelque part entre "Breaking Bad" et "Superman", "Last Hero Inuyashiki" entre en résonnance avec la société japonaise actuelle. Vieillissante, celle-ci accorde de moins en moins d’importance à ses aînés jugés si gênants et déconnectés d’un monde high-tech en mouvement. En faisant de ce senior un robot ultrapuissant, Hiroya Oku remet les jeunes à leur place en les obligeant à réviser leur arrogance et surtout à se demander : quels vieux seront-ils demain ?