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Brésil : le dernier homme d'une tribu d'Amazonie meurt du Covid-19

Aruka aura passé toute sa vie à lutter pour sa survie. [Capture YouTube / Rede Amazônica].

Il avait survécu aux massacres et autres expéditions punitives qui ont presque exterminé son peuple, mais c'est finalement le coronavirus qui a eu raison de lui. Aruka, le dernier représentant masculin de la tribu autochtone des Juma, au Brésil, est mort des suites du Covid-19.

Aruka est décédé à la mi-février dans un hôpital situé au nord de l'Amazonie, mais son décès n'a été médiatisé dans la presse internationale que très récemment.

Comme l'expliquent les médias brésiliens, la disparition de ce chaman, dernier à avoir enseigné les savoirs ancestraux du peuple des Juma, en Amazonie brésilienne, porte un coup sévère à l'histoire de cette tribu autrefois majeure.

Si personne ne sait précisément quel âge avait Aruka - on dit qu'il avait entre 85 et 90 ans à la fin de ses jours - seules restent à présent ses trois filles, les dernières à même de pouvoir faire vivre la mémoire de leur père et perpétuer l'héritage de leur peuple.

Décrits pour la première fois au XVIIIe siècle par des explorateurs européens, principalement portugais et espagnols, les Juma comptaient à l'époque de 12.000 à 15.000 hommes, femmes et enfants.

Une vie passée à survivre

Mais les maladies des colons, les diverses exactions, puis la déforestation et enfin le SARS-CoV-2 les ont pratiquement réduits à néant. Et pour Aruka, le virus a été le clap de fin d'une vie passée synonyme de lutte constante pour ne pas mourir.

En 1964, Aruka et six autres membres de la tribu furent ainsi les seuls à échapper à une chasse à l'homme lancée par des milices à la solde d'entreprises peu scrupuleuses, avides d'exploiter de nouvelles parcelles de la forêt amazonienne.

Avant cela, ils furent une soixantaine de Juma à être exterminés dans le dernier massacre sanglant qu'ait connu la tribu au XXe siècle. Aruka était alors encore un jeune homme rapporte l'agence de presse portugaise Lusa. Bien des années plus tard, sous Lula en 2004, il fut également celui qui réussit à délimiter les terres autochtones. Une victoire inespérée et négociée pied à pied au cours des années.

Aujourd'hui, à l'ère du coronavirus, l'une des principales préoccupations des autorités brésiliennes est de faire tout leur possible pour protéger ces populations indigènes, très vulnérables aux maladies respiratoires et plus à même de développer des formes graves du Covid-19.

«Au Brésil, la bataille contre le coronavirus est perdue»

Mais les nouvelles sur le front de la pandémie sont loin d'être bonnes. Ce dimanche 28 février, la situation sanitaire continuait de se dégrader rapidement au Brésil. Le nombre de décès, qui était déjà énorme ces dernières semaines, de l'ordre de 1.000 par jour, est récemment passé à plus de 1.500 par vingt-quatre heures.

Les hôpitaux de plusieurs grandes villes sont saturés et la campagne de vaccination patine. Selon les estimations, moins de 5% de la population a été vaccinée en six semaines.

A Manaus, capitale de l'Etat d'Amazonie, un épidémiologiste répondant au nom de Jesem Orellana, a même eu ces mots, terribles, au micro de RFI : «Cette bataille est perdue, sans aucun doute. Le Brésil n’arrive à régler ni le problème de transmission du coronavirus, ni à réaliser une campagne de vaccination de masse efficace».

Selon le recensement de 2010, le Brésil comptait environ 900.000 autochtones ou indigènes issus de 305 groupes ethniques, soit 0,47% de la population totale du pays. Autant de peuples fragiles et désarmés à qui le coronavirus pourrait porter un coup décisif.

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