Principalement utilisé pour espionner les conjoints, les «Stalkerware», aussi appelés «Spouseware», ont connu ces dernières années une hausse inquiétante de leur usage.
Un an après sa création, la Coalition contre les stalkerwares établit un premier bilan ce jeudi 10 décembre, à l'occasion de la journée internationale de la lutte contre les violences sexistes. Il en ressort notamment que ce type de logiciels espions se répand et après avoir connu un boom de 67 % de leur utilisation entre 2018 et 2019 au niveau mondial, 2020 voit leur nombre se stabiliser alors que l'année était synonyme de confinement. Reste qu'entre janvier et octobre inclus, plus de 48 500 logiciels de ce type ont été installés dans le monde.
A quoi sert un Stalkerware ?
Le mot stalker (harceleur en anglais) est ici utilisé pour désigner un logiciel que l'on installe sur le smartphone d'une autre personne à son insu. Ce dernier va alors envoyer un certain nombre d'informations à la personne qui l'a installé. Les stalkerwares vont être capables de révéler les SMS, les contenus des messageries, les listes d'appels, géolocaliser la personne pour la suivre à la trace et suivre toute son activité numérique. Un système espion qui est régulièrement employé par des hommes pour suivre leurs conjointes. «Sept femmes sur dix ayant été victimes de stalkerwares sont également victimes dans des affaires de violences domestiques», rapporte le Centre Hubertine Auclert, qui œuvre pour l'égalité hommes-femmes.
Comment sont-ils installés ?
«Il s'agit de logiciels simples d'utilisation et assez simples à trouver sur Internet. On peut en trouver avec des abonnements à 25-30 dollars/mois», explique Arnaud Dechoux, responsable des affaires publiques chez Kaspersky. Cet expert en cybersécurité souligne d'ailleurs que ces logiciels sont plus souvent répandus sur les mobiles sous Android. «Sur iPhone, il est plus complexe de les installer. Toutefois, ces derniers ne sont pas épargnés. Des revendeurs proposent même des iPhone avec des stalkerwares déjà installés et des hommes les offrent en "cadeau" à leur compagne», prévient-il.
Comment savoir si son mobile est concerné
Lors d'une conférence en ligne diffusée ce 10 décembre et disponible en replay ici, Kaspersky a d'ailleurs mis en avant plusieurs indices pour savoir si un logiciel espion, par définition discret et qui fonctionne en arrière-plan, se trouve dans un smartphone. Ainsi, il convient de faire attention à plusieurs signes. Le premier est de prêter attention à sa batterie. Si celle-ci à tendance à se vider plus rapidement que d'habitude, c'est peut-être parce qu'un logiciel de ce type fonctionne en arrière-plan. Si votre portable disparaît quelques heures et que vous finissez par le retrouvez, il a peut-être été faire un tour chez un «installateur». Vérifiez également la liste des logiciels installés dans les réglages et pas seulement sur les écrans d'accueil. Ceux-ci se cachent souvent sous des noms anodins. Si vous n'avez pas souvenir d'avoir installé vous même une appli, il s'agit peut-être d'un stalkerware. Enfin, certaines applications et solutions antivirus et de protection globale sont capables de détecter certains logiciels espions de ce type.
Que faire pour s'en prémunir ?
«De manière générale, ne vous séparez jamais de votre portable et ne partagez jamais de mots de passe ou le code de votre téléphone avec d'autres membres de votre famille. De même, évitez l'accès de votre mobile grâce à vos empreintes digitales car quelqu'un pourrait attendre votre sommeil pour utiliser votre doigt et déverrouiller le mobile», conseille Arnaud Dechoux. Créez des mots de passe forts et différents pour chaque compte. En outre, vérifiez régulièrement les applications installées sur votre mobile. Dans le doute, reconfigurez votre smartphone avec les réglages d'usine, afin de repartir à zéro.
La question délicate de leur suppression
Si vous avez trouvé un logiciel de ce type dans votre smartphone, ne songez pas tout de suite à l'effacer. Car la personne qui l'a installé en sera automatiquement notifiée, avec le risque de pousser un conjoint violent à s'en prendre à vous. Les associations et la police peuvent vous prendre en charge sur ce point. Plusieurs organismes peuvent accueillir les victimes de violences conjugales et les épauler.
Les forces de l'ordre à l'écoute
En outre, les forces de l'ordre sont également formées pour ces sujets. Kaspersky a d'ailleurs mis au point un logiciel, appelé TinyCheck, pour débusquer les stalkerwares. Utilisé par les forces de l'ordre par le biais d'un Raspberry Pi (un petit ordinateur), TinyCheck peut mettre en évidence ces espions numériques et notamment alimenter un dossier dans une affaire judiciaire. Pour rappelle, utiliser un stalkerware à l'insu d'une personne relève de la violation de la vie privée et reste puni par la loi.