Dans le sud de la Chine, à Yulin, le festival de la viande de chien a débuté ce jeudi 21 juin 2018, faisant la colère des défenseurs des animaux.
Depuis 2009, chaque année, les étals des bouchers se remplissent de dizaines de carcasses d'animaux à la peau jaune, les crocs serrés comme dans un ultime rictus.
L'an dernier, des rumeurs d'interdiction de l'événement avaient circulé sans guère effrayer vendeurs ni consommateurs. Cette année, les restaurateurs semblent plus discrets, mijotant le canidé en cuisine plutôt qu'en pleine rue, et proposant sur leur menu une «viande savoureuse» dont la nature ne trompe personne. L'animal entier est vendu pour 88 euros.
La consommation de viande de chien est très minoritaire en Chine mais reste populaire localement, notamment dans la région du Guangxi. Elle est tolérée par les autorités et ne fait l'objet d'aucune réglementation sanitaire.
«C'est très bon», assure un habitant du nom de Chen, nullement effrayé par l'amoncellement des carcasses. «Ce sont tous des chiens errants. Ce n'est pas la même chose que des animaux domestiques», affirme-t-il, sans s'offusquer d'une telle hécatombe en pleine année du Chien d'après le zodiaque chinois. «Vous ne mangez pas de poulet pendant l'année du coq ni de porc quand c'est l'année du cochon?», s'amuse-t-il.
Mais dans un pays où avoir un chien était qualifié de «bourgeois» et donc interdit à l'époque maoïste (1949-1976), de plus en plus de citadins possèdent désormais un animal domestique et voient d'un mauvais oeil les traditions de Yulin.
Une pétition rassemblant 235.000 signatures venues du monde entier a été adressée récemment au gouvernement chinois afin de réclamer l'interdiction de la manifestation. Selon l'association de défense des animaux Humane Society, des milliers de chiens sont sacrifiés lors du festival, soit une petite partie des 10 millions qui seraient avalés chaque année en Chine.
Des militants de la cause animale avaient l'habitude de racheter des chiens afin de les arracher à leur triste sort. Ils semblent avoir décidé de changer de tactique en faisant pression sur les autorités dans l'espoir d'obtenir une interdiction pure et simple.
Face à des habitants déterminés à défendre leurs coutumes alimentaires, «on aurait dit que plus il y avait de militants plus les gens mangeaient de chiens», reconnaît Zhang Huahua, une enseignante à la retraite venue de la province voisine du Guangdong et militante de la cause animale. La sexagénaire a passé une bonne partie de son temps à discuter avec des cadres locaux des questions d'hygiène alimentaire et de protection des animaux. Pour elle, les choses vont dans la bonne direction.
Une association hongkongaise baptisée Animals Asia Foundation a ouvert un site internet qui permet à tout un chacun de dénoncer des restaurants servant de la viande de chien. Pas moins de 1.300 ont été signalés dans 153 villes de Chine et plus de 200 ont fait l'objet soit d'une fermeture, soit d'un avertissement, ou encore d'une interdiction de vendre du chien, selon l'association.
Ailleurs en Asie, la consommation semble en perte de vitesse. Un tribunal sud-coréen vient de juger illégal d'abattre des chiens pour leur viande, une décision susceptible aux yeux des défenseurs des animaux de constituer un premier pas pour rendre la consommation des canidés hors la loi.
L'an dernier, Taïwan a banni la consommation, l'achat et la possession de viande de chien ou de chat, les contrevenants s'exposant à une amende de plus de 7.000 euros.