Oscar du meilleur scénario adapté en 2020, «Jojo Rabbit» de Taika Waititi, qui sera diffusé ce mardi soir sur Canal+, traite du nazisme à travers les yeux d’un enfant allemand. Une comédie satirique drôle et dérangeante, où le rire devient une arme.
«Avoir un bon copain/ Voilà c’qui y a d’meilleur au monde», chantait Henri Garat en 1930. Mais quand ce meilleur ami s’appelle Adolf Hitler, cela a de quoi rendre perplexe.
Dans «Jojo Rabbit», adapté du roman «Le ciel en cage» de Christine Leunens et prix du public au Festival international du film de Toronto en 2019, Johannes Betzler (Roman Griffin Davis) voue un culte au Führer. Ce garçon solitaire d’une dizaine d’années s'est créé un monde imaginaire alors que la Seconde Guerre mondiale sévit hors des murs de sa maison. En apparaissant d’une manière clownesque dans sa chambre d’enfant, Adolf Hitler, interprété par le réalisateur néo-zélandais d’origine juive et maori, prend des allures de Charlie Chaplin. Il délivre au jeune Viennois de nombreux conseils comme son père, absent, aurait pu le faire.
Sans percevoir la haine qui l’entoure, ce petit blondinet, victime d’humiliations à répétition, rejoint une subdivision des Jeunesses Hitlériennes. Son rêve. Ce séjour à la campagne s’apparente davantage à camp scout où l’on joue avec des grenades – quitte à se blesser – et où les livres sont brûlés dans la joie et la bonne humeur. Le tout sous le regard désabusé du capitaine Klenzendorf, totalement ahuri et alcoolique, remarquablement incarné par Sam Rockwell. Mais toutes les croyances de Jojo inculquées par les adultes vont être balayées quand il découvre que sa maman Rosie (Scarlett Johansson), qu’il chérit tant, cache Elsa (Thomasin McKenzie), une adolescente juive au sein même de leur habitation. L’amour pourra-t-il bouleverser les convictions de Jojo ?
Taika Waititi, à qui l’on doit «Boy» (2010) et «Thor : Ragnarok» (2017), tourne en ridicule les grandes figures de la Gestapo pour les rendre plus humaines, et dénonce, avec brio, les ravages d’une guerre sur une jeunesse encore malléable. Alternant drame et comédie et multipliant les anachronismes en reprenant par exemple un tube des Beatles, le cinéaste, épaulé par un brillant casting, souhaitait prouver que «les enfants ne naissent pas avec la haine en eux, ils y sont formés». Un constat malheureusement intemporel.