Avec son premier long-métrage «Les misérables», Ladj Ly a connu un incroyable succès critique et public. Diffusée ce mardi sur Canal+ dans le cadre d'une soirée spéciale, cette œuvre forte sur les violences policières dans les banlieues a permis au réalisateur de rentrer dans la cour des grands.
Le jeune homme s’est fait connaître il y a plus de dix ans, alors qu’il filmait les émeutes de Clichy-Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, après la disparition de Zyed Benna et Bouna Traoré, électrocutés dans un transformateur. Cette banlieue où les jeunes s’opposent parfois aux forces de l’ordre, et inversement, Ladj Ly la connaît bien puisqu’il y vit depuis toujours et cumule les souvenirs dans la cité des Bosquets.
C’est là que le réalisateur, nommé deux fois aux César en 2018 - notamment pour le documentaire «A voix haute, la force de la parole» coréalisé avec Stéphane de Freitas - a tourné «Les misérables» qui reprend la trame de son court-métrage du même nom.
En compétition en mai 2019, sur la Croisette, face à des œuvres des grands Pedro Almodovar, Quentin Tarantino ou Ken Loach, ce long-métrage, qui a reçu le prix du jury ex-æquo avec «Bacurau», relate le parcours chaotique de «Pento» (Damien Bonnard) qui débarque dans le 9-3 au lendemain de la victoire des Bleus. Il rejoint la Brigade Anti-Criminalité (BAC) de Montfermeil et fait la connaissance de Chris et Gwada. L’équilibre est fragile dans ce secteur. Les dérapages sont fréquents. Et chaque altercation peut être filmée.
«Je dédie ce film à tous les misérables de France et d'ailleurs. Mon film parle des rapports entre les différentes communautés dans ce territoire. Le seul ennemi en commun qu'il y a entre ses habitants et les policiers, c'est la misère», a déclaré Ladj Ly, lors de la cérémonie de clôture, conscient qu’il y aurait un avant et un après Cannes, tant l’événement est une incroyable vitrine pour les stars montantes du 7e art.
Ce fut pour lui l'occasion également de présenter indirectement au monde entier l’école de cinéma Kourtrajmé qu'il a fondée en novembre 2018, avec son collectif du même nom. Un collectif créé en 1995 avec quelques amis d'enfance comme Kim Chapiron et Romain Gavras.
On set with my childhood friend @ladjly, we did the same photo (slide 2) when we were 18 and today he is shooting his first fiction film « Les Misérables » in the same hood.... #kourtrajme pic.twitter.com/JMCUlg6PQm
— JR (@JRart) 12 septembre 2018
La formation est complètement gratuite et accessible à tous, sans conditions d’âge ou de diplôme. L’école forme à tous les métiers du cinéma : la post-production, l’écriture du scénario et bien sûr la réalisation. Et Ladj Ly espère qu'un jour ces apprentis cinéastes monteront, eux aussi, les mythiques marches rouges du Palais des Festivals.
Sorti le 20 novembre 2019, «Les Misérables» a été vendu depuis dans plus d'une cinquantaine de territoires à travers le monde - Amazon a par ailleurs acquis les droits pour une exploitation aux Etats-Unis -, a obtenu le prix d'Ornano-Valenti 2019 au 45e Festival du cinéma américain de Deauville. Le film a également été récompensé de quatre Césars, dont celui du meilleur film. Pour un premier essai, c'est un coup de maître pour Ladj Ly.