De loin, on dirait un jouet télécommandé. De près aussi: une aile orange bricolée avec son hélice sur le nez. Sauf que ce petit drone qui survole les champs pour les photographier est en passe de devenir le meilleur allié de l'agriculteur.
Avec ses 2,20 m d'envergure et ses deux petits kilos, l'appareil d'Airinov, la start-up de trois jeunes gens (très) diplômés en informatique notamment, est capable de livrer un diagnostic agronomique pointu et de guider le cultivateur vers une utilisation optimale, ni trop, ni trop peu, des intrants.
"On fait l'état d'état des lieux d'une culture à l'instant T: on est capable de descendre jusqu'à 1,5 cm de résolution", explique le PDG, Florent Mainfroy.
Comme ceux utilisés à des fins militaires, le drone entièrement automatique et guidé par GPS est lâché au-dessus de la parcelle, à 150 m de hauteur environ: muni de capteurs et d'une caméra ventrale, il effectue ses clichés en un seul passage.
A ce stade, il mesure l'état du couvert végétal d'après le taux de chlorophylle de la plante. En réalité ce qu'il cherche à capter, c'est la lumière réfléchie par la plante - la réflectance - qui renseigne sur l'état de la photosynthèse et l'hygrométrie. Ce qui permet aussi de mesurer les différences singulières d'une terre à l'autre en cas de remembrement.
De ces relevés, les agronomes - de l'Inra, l'Institut national de la recherche agronomique, et d'InVivo AgroSolutions, les partenaires - déterminent quel est l'exact dosage d'azote à apporter à la culture.
Pour leur première saison de récoltes et leurs 200 premiers clients, les drones d'Airinov se sont concentrés sur les cultures de colza. Mais on peut choisir de mesurer d'autres variables agronomiques, relève Romain Faroux, le directeur commercial.
Si le siège est à Paris, c'est grâce aux origines de ce dernier, dont les parents sont céréaliers dans la Vienne, qu'Airinov a pu mener ses expérimentations en plein champ, sur l'exploitation familiale.
"Les satellites étaient déjà largement utilisés en agriculture de précision. Le drone apporte un surcroît de souplesse" souligne Romain Faroux.
Il lui faut moins d'une heure pour photographier une centaine d'hectares (facturés 15 euros l'ha). Et contrairement aux satellites, les nuages ne le gênent pas. "Seule la pluie l'empêche de voler" précise le jeune homme.
On est loin du tracteur de son père. Le clivage est pourtant beaucoup moins générationnel qu'attendu: "Beaucoup d'agriculteurs qui comptent passer bientôt la main au fils s'équipent en outils informatiques et électroniques. Ca correspond aussi à une démarche constructive par rapport à l'environnement".