Rien ne va plus pour Martin Fourcade qui a connu mercredi une journée noire en se classant 39e de l'Individuel des Mondiaux de biathlon remporté par l'Allemand Arnd Peiffer, une prestation catastrophique à l'image de sa saison.
Les statistiques sont cruelles : jamais le Français de 30 ans n'avait été aussi mal classé dans une course aux Championnats du monde. C'est dire la gravité de la situation. Le quintuple champion olympique attendait pourtant beaucoup de cette épreuve au long cours (20 km avec 4 passages au tir), qui demande une gestion précise de l'effort et aurait dû théoriquement lui convenir. Mais il a été une nouvelle fois rattrapé par son faible niveau de l'hiver.
Avec quatre fautes à la carabine et surtout une incapacité à retrouver ses sensations sur les skis, cet Individuel, disputé qui plus est sous de fortes rafales de vent et une neige abondante, a constitué un calvaire pour celui qui a écrasé la discipline durant 7 ans avant de connaître cette saison une spectaculaire baisse de régime. Impossible dans ces conditions d'aller titiller les meilleurs et de lutter pour une place sur le podium.
Fourcade termine ainsi à 5 min 46 secondes de Peiffer, victorieux devant le bulgare Vladimir Iliev et le Norvégien Tarjei Boe. Autant dire, une éternité pour un biathlète de sa trempe.
«J'en ai marre»
La pause de six semaines que s'était accordée le Français à partir de fin janvier n'a donc pas eu le don de le rebooster. Bien au contraire.
«C'est très frustrant et c'est difficile, a-t-il déclaré. Sportivement, c'est compliqué et j'ai envie de tourner la page de cette saison. C'est difficile de se prendre ça à la figure à chaque course et j'en ai marre. J'ai du mal à enchaîner les courses et ça me coûte physiquement, ça ne répond pas comme je veux donc on se met à se poser beaucoup de questions dans sa tête. Il y a une espèce de résignation et un cercle vicieux.»
Même le staff tricolore, longtemps adepte de la méthode Coué concernant son leader, est bien obligé de reconnaître que le mal est bien profond.
«Il ne trouve pas les solutions et on ne trouve pas non plus les solutions, a admis Vincent Vittoz, l'entraîneur des Bleus. La première semaine de la compétition, il réagissait bien mais on a vu après le sprint (samedi, ndlr) des difficultés à récupérer et on a revécu ce que l'on avait vécu en début de saison. Le mois de février n'a pas été suffisant pour enrayer cette mauvaise passe.»
«Il est perdu»
«Il y a des problèmes de récupération et chaque course lui coûte physiquement et mentalement, a ajouté le technicien et ex-fondeur, arrivé cette saison à la tête des Bleus. L'Individuel lui tenait à coeur et il est parti vite mais dès les premiers intermédiaires, il s'est rendu compte qu'il n'était pas dans le bon tempo, en ayant pourtant beaucoup donné. Il est perdu et il manque de confiance. C'est une grosse déception.»
Signe de son désarroi, Fourcade a avoué que sans le relais, prévu samedi, la question d'arrêter les frais et la saison dès à présent se serait posée alors qu'il reste encore quatre épreuves individuelles au programme d'ici la fin de l'exercice 2018-2019 (une mass start aux Mondiaux dimanche et 3 courses à Oslo lors de la dernière étape de la Coupe du monde du 22 au 24 mars).
«Je me concentre sur le relais aujourd'hui et je fais comme depuis le début des Championnats, je prends les courses les unes après les autres, a-t-il expliqué. Cette course je ne la fais pas pour moi sinon je ne serai sans doute pas là samedi. Je la fais pour l'équipe. Malgré mon hiver compliqué, j'ai ma place et une responsabilité dans cette équipe.»
Seule maigre consolation pour le Français dans cette journée à oublier au plus vite: son record du nombre de victoires sur une saison (14) tient toujours. Le Norvégien Johannes Boe, assuré de lui succéder au palmarès de la Coupe du monde et seulement 9e de l'Individuel mercredi, n'a pas été capable de l'égaler et reste bloqué à 13 succès. Pas sûr toutefois que cela efface ses déboires actuels.