Une «patate tatare», un des plus beaux buts du tournoi, et un cocktail vice-culot: Benjamin Pavard et Lucas Hernandez ont dynamité la hiérarchie et dynamisé les couloirs de l'équipe de France, mais restent perfectibles avant d'affronter l'Uruguay vendredi en quarts de finale du Mondial-2018.
Face à l'Argentine en 8es de finale à Kazan, capitale du Tatarstan, «le jeu dans les couloirs a été intéressant, avec l'arrière gauche Lucas Hernandez qui centre pour l'arrière droit Benjamin Pavard et ça fait but à l'arrivée. Ces joueurs-là ne sont pas bridés. On est l'équipe qui a le plus centré en poules, par contre, on a raté beaucoup de centres, à cause de problèmes techniques», a pointé Guy Stéphan, l'adjoint du sélectionneur Didier Deschamps.
Dans un quart de finale qui s'annonce irrespirable, les centres à destination du jeu aérien d'Olivier Giroud pourraient servir à faire sauter le verrou «charrua». Tel est l'axe de progression des deux joueurs de 22 ans, plutôt défenseurs centraux en club, qui devraient honorer leur dixième sélection seulement, vendredi à Nijni Novgorod. «Ils ont su saisir leur chance et ça se passe plutôt bien pour eux», a noté Stéphan.
Les deux latéraux pressentis pour être titulaires avant la préparation au Mondial ont laissé passer le train russe. Benjamin Mendy n'est plus que l'ombre du geek rigolard qu'il était, tandis que Djibril Sidibé, tout en admettant sa «frustration», fait bonne figure, préférant mettre ses «états d'âme de côté». Et voilà Pavard et Hernandez qui s'installent.
Aboubés par Thuram
Deux latéraux qui inversent la hiérarchie dans une phase finale, ça rappelle forcément l'Euro-1996, lorsque Eric Di Meco et Jocelyn Angloma étaient déposés par Bixente Lizarazu et Lilian Thuram pour des lendemains qui allaient chanter.
Ce dernier, justement, avait remarqué les deux latéraux actuels à l'Euro-2015 des U19. Chez Hernandez, «on voyait une grande détermination et une force de caractère, ça se percevait dans son jeu. Pour Pavard, ça ne se percevait pas tout de suite. Mais à son âge, il avait une très grande intelligence de jeu, et c'était un joueur très technique», a confié à l'AFP le champion du monde 1998.
Cette «patate tatare» signée Pavard a rappelé l'improbable doublé de son illustre aîné contre la Croatie en demi-finales du Mondial remporté en 1998. Or, cette demi-volée, «c'est un geste qu'il maîtrise totalement. Mais moi, jamais je n'aurais rêvé marquer un but comme Pavard !», lance Tutu dans un rire. Ajoutant : «Je tiens à le féliciter, mais pas que pour son but : pour tout ce qu'il fait; défensivement il est très bon».
La cote du joueur né à Maubeuge et sous contrat jusqu'en 2021 avec Stuttgart a explosé. «Nous n'allons définitivement pas vendre Benjamin Pavard pour 50 millions cette année, nous tenons fermement à ce qu'il joue une saison de plus avec nous», a dit le directeur sportif de son club, Michael Reschke, dimanche dans la presse locale (Stuttgarter Nachrichten et Stuttgarte Zeitung).
A la gloire de Pavard
Le Ch'ti a changé de dimension; oubliées les railleries à la «Jeff Tuche» suscitées par sa chevelure bouclée; désormais, une chanson à sa gloire, sur l'air du tube marseillais «on va tout casser chez toi», fait les délices d'Internet : «Benjamin Pavard /Je n'crois pas qu'vous connaissez / Il sort de nulle part / Une frappe de bâtard / On a Benjamin Pavard !»
Hernandez, lui, «va très certainement s'imposer en équipe de France très prochainement», avait annoncé le président de la Fédération (FFF) Noël Le Graët juste avant le Mondial. Et la France du foot de découvrir un défenseur dur sur l'homme et qui revendique son vice, «de temps en temps, j'en rajoute un peu».
«C'est vrai qu'il a cette grinta, cette agressivité. C'est un des joueurs qui comprend le mieux, quand l'adversaire décale le ballon sur son côté gauche, qu'il doit le harceler et cadrer, dans ce domaine-là il est très bon», abonde Stéphan.
«Avec lui, tu peux partir à la guerre. C'est la mentalité Atlético», insufflée par son entraîneur Diego Simeone, avait synthétisé son coéquipier Antoine Griezmann.