«Taxe» sur les clubs trop dépensiers, «plafond» sur les salaires et les indemnités... Pour tenter de juguler l'incroyable inflation des prix des transferts, les instances comme l'UEFA et des économistes proposent plusieurs pistes de régulation.
L'objectif: maintenir un «équilibre compétitif» entre les équipes, plus menacé que jamais.
Le bilan de l'année 2017 en matière de mercato est sans appel: les clubs de foot ont dépensé un montant record de 6,37 milliards de dollars (5,1 Mds d'euros) en indemnités de transfert, selon un rapport de la Fifa dévoilé mardi. Un chiffre en hausse de plus de 30% !
En cause, «l'effet multiplicateur» des transactions faramineuses sur la niche des superstars comme Neymar, devenu cet été le joueur le plus cher de l'histoire (222 M EUR), alors que plus de 80% des mouvements de joueurs se réalisent sans indemnités.
Et sous l'impulsion des recrutements spectaculaires de Philippe Coutinho à Barcelone (160 M EUR) et de Virgil Van Dijk à Liverpool (84 M EUR, défenseur le plus cher de l'histoire) cet hiver, l'année 2018 est sans doute déjà partie pour exploser le record...
Dès lors, quelles mesures mettre en place pour réguler un marché qui ne cesse de s'emballer, sous l'effet de puissants investisseurs étrangers, comme à Manchester City ou au PSG, qui ne lésinent pas sur les moyens alloués au mercato ?
'Taxe de luxe'
Le président de l'UEFA Aleksander Ceferin, tout en admettant que l'instance «n'avait pas de stratégie concrète» dans ce domaine par le passé, a proposé fin janvier la création d'une «taxe de luxe» pour y remédier.
Son principe ? «Si un club dépense plus qu'il ne doit, il va payer une taxe sur la différence. Ce n'est pas un impôt pour le gouvernement, mais pour l'UEFA. Nous devons encore décider comment nous redistribuerons cet argent», a-t-il expliqué dans la presse suisse.
Dans quel but ? Maintenir «l'équilibre concurrentiel entre les équipes», l'enjeu le plus important du football moderne selon lui.
Pour l'économiste Arnaud Chéron, cette piste sonne comme un aveu d'impuissance du fair-play financier (FPF), instrument mis en place par l'instance européenne en 2011 pour assainir les comptes des clubs.
«D'un point de vue financier stricto sensu, les choses ont largement évolué dans le bon sens. Par contre, cela n'a pas empêché la concentration des talents --ce qui reste le problème de fond-- dans certains clubs qui arrivent à respecter les règles du jeu en matière de finances», grâce notamment à l'explosion des droits TV, explique-t-il à l'AFP.
Un mix 'salary et transfer cap' comme panacée ?
Dans une étude originale publiée mi-janvier, Arnaud Chéron et son équipe de chercheurs de l'Edhec Business School proposent de leur côté de plafonner à la fois le salaire et l'indemnité de transfert à l'embauche d'un joueur pour faire baisser les prix.
Un «salary cap» seul, comme en NBA, «serait relativement inopérant» en raison d'un marché du travail différent, et pourrait même entraîner des effets pervers redoutables. Selon leurs projections, l'économie réalisée sur les salaires par le club acheteur va être compensée par une hausse de l'indemnité de transfert. Soit le contraire de l'objectif de départ !
«Avec un 'cap' à 12 millions d'euros annuel, qui intègre à la fois le montant du salaire et de l'indemnité de transfert, on serait en mesure de réduire les dépenses des indemnités de transferts de l'ordre de 25%, à tout niveau de transferts, petits comme importants», assure M. Chéron, qui s'est basé sur les données de la Serie A italienne pour établir ce résultat.
«Très contraignante» de l'aveu même du chercheur, la mesure est-elle réellement applicable ? Si l'on se réfère au contrat de cinq ans de Neymar au PSG, le club parisien est parti pour débourser environ 80 millions (indemnité de transfert plus salaire) chaque année. Très loin du plafond de 12 M EUR...
«Peut-être que notre proposition est un peu brutale (rires), admet M. Chéron, mais il nous semble que c'est le moyen le plus direct pour essayer de réguler le marché des superstars et de faire en sorte que les clubs de moyenne gamme soient en mesure de s'attacher les services de certains talents, et ce faisant, rééquilibrer les championnats nationaux».
«Cela demande un choix politique qui peut être relativement fort», ajoute-t-il. L'appel est lancé.