Catapulté grand espoir du tennis à ses débuts, le Letton Ernests Gulbis a longtemps gâché son talent avant de lui faire honneur cette année en accédant pour la première fois aux demi-finales d'un tournoi du Grand Chelem, mardi à Roland-Garros.
En 2008, trois ans après ses débuts professionnels, le jeune Gulbis, alors âgé de 19 ans, était entré dans la lumière en se hissant en quarts de finale du tournoi de la Porte d'Auteuil. Tout le monde parlait alors d'un prodige.
Mais, le Letton a mis six ans avant de confirmer son formidable potentiel, faisant le plus souvent parler de lui par son côté fêtard, son comportement volcanique sur les courts et ses déclarations décapantes devant les journalistes.
"Cela a été long parce que je ne mangeais pas bien. Tout le monde parle de ce régime alimentaire sans gluten mais moi le mien était rempli de gluten. J'adore le ketchup, la malbouffe. J'ai seulement trouvé le bon équilibre il y a deux ans", a-t-il expliqué mardi après avoir écœuré le Tchèque Tomas Berdych (6e), en trois sets (6-3, 6-2, 6-4).
Entre le quart de finale d'il y a six ans et cette demi-finale qu'il disputera vendredi face au N.2 mondial Novak Djokovic, Gulbis a, à l'image de son hygiène de vie alimentaire, mis à mal son talent tennistique.
- Capable du meilleur comme du pire -
Durant cette période de lente maturation, il n'a guère brillé dans les tournois majeurs, ne dépassant quasiment jamais le deuxième tour. Capable du meilleur comme du pire, il a vu ses résultats prendre la forme d'une courbe sinusoïdale.
En 2010, il remporte son premier titre à Delray Beach, fait chuter Roger Federer et prend un set à Rome à Rafael Nadal, le roi de la terre battue, avant qu'une blessure aux adducteurs ne viennent contrarier ses plans.
Un an plus tard, il progresse au classement ATP en atteignant le 21e rang, avant de reculer en fin d'exercice à la 61e place.
En 2012, le Letton va encore faire preuve d'une déconcertante irrégularité, frôlant tantôt la perfection à Wimbledon (victoire en trois sets contre Berdych) et le ridicule en s'inclinant en Coupe Davis contre le 544e joueur mondial.
Mais sa rencontre avec Günther Bresnik, ancien coach de Boris Becker, va le remettre sur les rails. L'Autrichien, réputé pour son autoritarisme, réussira à canaliser le chien fou balte en lâchant un peu de lest quand il le faut.
Après une saison sans titre en 2012, Gulbis remporte deux nouveaux trophées l'année suivante à Saint-Pétersbourg, puis Delray Reach. Il enchaîne début 2014 en s'imposant à Marseille puis à Nice, juste avant son arrivée à Roland-Garros, pour atteindre le meilleur classement de sa carrière (17e).
Sur la lancée de son succès sur la Côte d'Azur, il traverse les trois premiers tours des Internationaux de France sans trop de problèmes puis s'offre le scalp de Federer en huitièmes au terme d'un combat en cinq manches.
- Bris de raquette -
Tancé par le public du Central qui lui préférait le seigneur helvète, le Letton perdra un instant son sang-froid, en martyrisant une raquette, mais jamais son jeu.
"Je voulais montrer du respect au court central de Paris, c'est pour cela que je l'ai cassée !", dira-t-il, badin, en conférence de presse, l'endroit où il aime décidément faire parler de lui.
Sa sortie sur les femmes, qu'il juge plus utiles au foyer, restera d'ailleurs dans les annales de ce Roland-Garros.
Mardi, juste après sa victoire contre Berdych, Gulbis, sourire jusqu'aux oreilles et un brin plaisantin, était surtout pressé de célébrer son succès comme il se doit.
Attention tout de même car Djokovic, qui avait stoppé son aventure parisienne il y a six ans, lui, ne plaisantera pas.