"Fraude et triche ne riment pas obligatoirement avec paris sportifs", assure mercredi dans un entretien exclusif à l'AFP l'Anglais Lee Simmonds, responsable des paris au PMU, à une semaine du début de l'Euro-2012.
Pour l'ancien "trader" de la célèbre enseigne britannique de paris Ladbrokes, aujourd'hui âgé de 36 ans, l'évènement pourrait signifier un million de paris et 7 à 8 millions d'euros d'enjeux rien que pour l'opérateur français des jeux et sur son marché national.
Q: Quel sera le volume total des paris sur l'Euro 2012?
R: "L'Euro-2012 donnera lieu au plus grand volume de paris jamais enregistré sur le marché français jusqu'ici, même s'il est très difficile d'imaginer précisément ce que cela représentera. Néanmoins, pour le PMU qui pèse entre 22 et 23% du marché français, nous prévoyons que cela attirera presque un million de paris, ce qui devrait correspondre à 7 à 8 millions d'euros d'enjeux".
Q: Comment est déterminée la cote des Bleus?
R: "Pour le titre, la cote actuelle de la France est de 13,00 contre 1. En se rapprochant de la compétition, elle va changer. Celle de l'Espagne est de 3,2. Les facteurs importants retenus par nos coteurs, ou traders, sont évidemment la forme actuelle de l'équipe, les joueurs sélectionnés et ceux que les parieurs soutiennent réellement. Sa victoire contre l'Allemagne en février a eu peu d'impact car c'était un événement isolé. Si la France bat l'Angleterre, sa cote diminuera encore davantage. Mais, comme je suis Anglais, je peux vous dire que cela ne se produira pas. Si la France gagnait l'Euro, ce serait formidable pour le pays... et forcément moins pour les opérateurs vu que le parieur joue contre nous. Bon, cette réflexion est surtout valable pour les paris pris avant le début de la compétition, car ensuite la cote est adaptée".
Q: Comment les bookmakers ont-ils préparé l'Euro 2012?
R: "L'Euro est en réalité un peu plus facile à gérer que les championnats nationaux. En L1, il y a 20 équipes qui ont des effectifs importants et il y a des joueurs que même les supporters ne connaissent pas. Pour l'Euro, en revanche, il n'y a que 16 équipes à étudier, avec toutes 23 joueurs de très grande qualité, et donc bien connus".
Q: Quel pays a une "bonne cote"?
R: "Si vous êtes en quête d'un gagnant, il y a le Portugal à 16,00. Il est dans le même groupe que l'Allemagne. Ce ne sera pas facile de sortir en tête. Mais s'il y parvient, il aura un quart de finale facile. Cela dit, la Grèce a bouleversé tous les pronostics en 2004 alors qu'elle avait une cote de 41,00. Pour les candidats au titre de meilleur buteur, il y a Van Persie ou Ronaldo, mais je penche plutôt pour Podolski, malgré sa côte de 24,00. C'est une valeur sûre, toujours présent dans les grands rendez-vous de l'Allemagne".
Q: L'affaire des paris truqués qui éclabousse l'Italie peut-elle faire des victimes collatérales?
R: "Les scandales de ce genre sont évidemment un vrai problème. Mais, au-delà de l'image des paris, ils nuisent surtout à l'image du sport en général. Car fraude et triche ne riment pas obligatoirement avec paris sportifs. Cela dit, aussi paradoxal que cela puisse paraître, de telles révélations envoient un signal positif: elles confirment que l'étau se resserre autour des tricheurs et que les contrôles sont efficaces".
Q: Comment lutter efficacement contre la fraude?
R: "La fraude et les matches truqués sont un risque réel, que nous surveillons avec la plus grande attention. Pour notre part, nous travaillons avec Paddy Power, l'un des meilleurs opérateurs qui soient pour l'organisation et la surveillance des paris sportifs. A la moindre anomalie relevée, la prise de paris est suspendue et l'Arjel (Autorité de régulation des jeux en ligne, autorité administrative indépendante spécialement prévue pour réguler les jeux d'argent sur internet en France, ndlr) est informée immédiatement. Mais la fraude s'organise le plus souvent par le biais d'opérateurs installés hors des pays régulés, opérant sur des marchés très ciblés. A l'étranger, les cotes peuvent être plus attractives et les espérances de gains plus élevées. Notre cadre légal ne nous le permet pas mais en contre-partie le marché est ultra-sécurisé et parfaitement sain".
Propos recueillis par Colin DRONIOU