Déposé le 27 septembre dernier à l’Assemblée, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024 porté par le gouvernement a été définitivement adopté ce lundi 4 décembre à l'Assemblée nationale. Voici les principales mesures qu’il contient.
Porté par la Première ministre Elisabeth Borne, avec l’aval des ministres de l’Économie, Bruno Le Maire, et de la Santé, Aurélien Rousseau, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024 a été définitivement adopté ce lundi 4 décembre après le rejet des différentes motions de censure deposées par les oppositions. L'objectif : permettre à l’Assurance maladie de réaliser des économies à hauteur de 3,5 milliards d’euros.
Pour l'adopter, Élisabeth Borne a utilisé pas moins de cinq fois l'article 49.3 de la Constitution. Limitation des arrêts de travail, lutte contre la pénurie des médicaments et la fraude sociale… Voici les nouvelles mesures qu'il contient.
3,5 milliards d’euros d’économies liées à la santé
Ce texte s’appuie sur un constat simple : l’État entend réaliser des économies à hauteur de 3,5 milliards d’euros sur les dépenses de l’Assurance maladie. En effet, le déficit de la sécu s'élèvera, selon les estimations du gouvernement, à 10,7 milliards d’euros en 2024 et pourrait même monter jusqu’à 17,5 milliards en 2027.
Dans le détail, le gouvernement vise une économie de 600 millions d'euros sur les dépenses hospitalières, en axant notamment sa politique sur le développement de l'ambulatoire, la régulation de l'intérim médical et l’«optimisation» des achats. Il entend aussi récupérer 1,3 milliard d’euros sur les produits de santé, en baissant largement le prix des médicaments.
L’État ambitionne enfin de récupérer 1,25 milliard d’euros grâce à la «responsabilisation» des patients et des professionnels, ainsi que 300 millions d’euros sur les soins en ville, avec un effort particulier sur les laboratoires d’analyses.
Renforcer la lutte contre la fraude sociale
Le gouvernement prévoit de s’attaquer à la «sous-déclaration» de chiffre d'affaires des micro-entrepreneurs employés par les plateformes numériques. Selon les estimations de l’État, cette problématique a représenté 800 millions d’euros de manque à gagner pour les comptes publics en 2021. Le projet de loi prévoit de mettre en place un prélèvement automatique de ces cotisations par les plate-formes numériques d’ici à 2027.
Parmi les autres mesures adoptées pour renforcer la lutte contre la fraude sociale, le PLFSS ambitionne de supprimer les aides financières octroyées par l’assurance maladie à tout professionnel de santé coupable d’une fraude avérée.
Par amendement, le gouvernement va aussi créer un délit d'incitation à la fraude sociale «par quelque moyen que ce soit», avec une peine de 2 ans de prison et 30.000 euros d'amende à la clé. Cette mesure fait suite à la diffusion d'une vidéo d’un influenceur prétendant percevoir 1.800 euros net de revenus mensuels «sans rien foutre» grâce au cumul de diverses allocations.
MaÎtriser les dépenses d'arrêts maladie
Le gouvernement souhaite également renforcer les pouvoirs de contrôle de l’assurance maladie et des entreprises afin de mieux maitriser les dépenses liées aux arrêts maladie. Pour cela, le médecin agrée mandaté par l’employeur pourra désormais suspendre le versement des indemnités aux patients lorsqu'il estime l'arrêt injustifié, avec une possibilité de recours de l'assuré.
Autre nouveauté : le texte limite à trois jours la durée des arrêts prescrits par téléconsultation (sauf exceptions, notamment pour le médecin traitant).
Inciter à utiliser plus souvent les transports partagés
La majorité désire aussi inciter les patients à utiliser plus de transports partagés. Pour ceux d’entre eux qui refuseront sans raison valable une offre de véhicule sanitaire léger ou de taxi conventionné partagé avec un autre patient, ces derniers devront avancer leurs frais. Ils ne seront dorénavant remboursés que sur la base du prix d'un transport partagé.
Des médicaments délivrés à l’unité pour lutter contre la pénurie
Face à la pénurie de médicaments qui touche la France depuis de longs mois, l’État a pris des dispositions. En cas de nouvelles ruptures de stock, les professionnels de santé devront délivrer le médicament à l’unité (à cause d’une obligation définie par arrêté). Les pharmaciens devront aussi s’adapter et délivrer «la quantité adaptée» plutôt qu’une boite entière.
Le PLFSS prévoit aussi de rendre obligatoire la réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique afin de délivrer certains antibiotiques.
Un nouveau «pacte» avec l'industrie pharmaceutique
La «clause de sauvegarde», à savoir la contribution financière versée par les entreprises pharmaceutiques à l'Assurance maladie en cas de chiffre d’affaires exponentiel, va être recalculée. Elle va être réduite à 1,6 milliard d’euros pour 2023 et 2024 (contre 1,7 puis 2 milliards initialement prévus).
En contrepartie, il «sera demandé aux entreprises des efforts de baisse des prix d’un milliard d'euros, dont 850 millions d’euros sur les médicaments». Il sera également requis de «participer de façon très active» à la maîtrise des volumes.
La gratuité de certains produits de santé pour les moins de 26 ans
Les protections périodiques réutilisables, à savoir les culottes et les coupes menstruelles, seront désormais remboursées pour les femmes âgées de moins de 26 ans et pour toutes les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire.
Le texte inscrit aussi dans la loi la gratuité des préservatifs masculins et féminins pour tous les assurés de moins de 26 ans.
Un «statut temporaire» pour le cannabis thérapeutique
Le gouvernement prévoit également la création d'un «statut temporaire» pour le cannabis thérapeutique afin de donner suite à «l'expérimentation» qui doit s’achever en mars prochain.
Réduire la tarification à l’acte des hôpitaux
Emmanuel Macron ambitionne de réduire la tarification à l'acte dans les hôpitaux. Cette mesure introduite en 2003 est accusée d'avoir poussé les établissements à une course aux actes lucratifs et aux rendements.
Le projet de loi propose d'introduire deux autres modes de financement, l'un basé sur des «objectifs de santé publique» et l'autre sur «des missions spécifiques». Cette réforme importante ne devrait pas être mise en application avant le 1er janvier 2025.
Des amendements en sursis
La commission des Affaires sociales a adopté des amendements, mais ces derniers pourraient ne pas être retenus en cas d’utilisation annoncée de l’article 49.3 par le gouvernement.
La commission s'est ainsi prononcée pour la suppression des exonérations de cotisations familiales pour les salaires entre 2,5 et 3,5 fois le Smic.