François Hollande reçoit mercredi après-midi le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone et son homologue du Sénat Gérard Larcher, avant les responsables de partis vendredi, dont Nicolas Sarkozy, dans une tentative pour sortir la tête haute du guêpier de la déchéance de nationalité.
Le porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll a réfuté le terme de "chienlit", préférant parler beaucoup plus sobrement de "débat". Il n'empêche que cette disposition, qui avait à peine retenu l'attention lors de son annonce trois jours après les attentats du 13 novembre, a depuis créé la cacophonie, divisant en profondeur la majorité jusqu'au sein même du gouvernement.
Il y ceux qui approuvent l’extension de déchéance de nationalité pour les binationaux nés en France condamnés pour terrorisme, mais ne voient pas l'intérêt de l'inscrire dans la Constitution, ceux qui dénoncent une inégalité de traitement entre Français, ceux qui s'insurgent au contraire contre le risque de créer des apatrides si elle s'appliquait à tous... Chaque embryon de solution semble faire naître de nouvelles oppositions et resserrer encore l'imbroglio.
Depuis son annonce devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, le chef de l'Etat écoute, "mais il est comptable d'engagements pris envers les Français et surtout de la situation qu'a à affronter notre pays", a rappelé mercredi matin Bruno Le Roux, patron des députés socialistes à l'Assemblée sur LCP.
"Le président de la République reçoit les responsables de partis et de groupes politiques vendredi à l'Elysée, donc il y aura Nicolas Sarkozy, il y aura Christian Jacob, mon homologue, Bruno Retailleau (le président des Républicains au Sénat), Didier Guillaume (patron des sénateurs socialistes) et bien entendu Jean-Christophe Cambadélis", le premier secrétaire du PS. La présence de l'ancien chef d'Etat a été confirmée par son entourage.
Ce mercredi, Claude Bartolone (PS) et Gérard Larcher (LR) ouvriront le bal pour des entretiens qui rappellent les consultations tenues par le président au lendemain des attentats, dans une toute autre atmosphère cependant. Il s'agit, a-t-on précisé dans l'entourage du président, de recueillir "visions et propositions" afin que le texte de révision constitutionnelle "soit adopté le plus largement possible".
Urvoas comparé à Harry Potter ou Houdini
Au PS, c'est le président de la commission des Lois de l'Assemblée, Jean-Jacques Urvoas, qui est en charge de trouver la formule magique qui résoudrait l'équation posée par les socialistes: l'exigence d'union nationale, pas d'apatridie et pas de discrimination entre citoyens. "Je pense que l’exercice est possible", a jugé M. Le Roux, même si certains au PS n'hésitent pas à comparer M. Urvoas à Harry Potter ou au prestidigitateur Houdini. M. Le Roux espère que la nouvelle rédaction pourra être présentée "en fin de semaine" ou "début de semaine prochaine".
Selon des sources parlementaires, l'hypothèse sur laquelle travaille M. Urvoas serait de ne pas préciser la condition de nationalité dans la loi fondamentale, mais de la renvoyer à une loi d'application, qui sera présentée en même temps. "Je peux vous confirmer que la solution que nous travaillons est une solution (...) qui ne doit pas introduire dans notre Constitution de discrimination suivant le critère de la nationalité", a indiqué M. Le Roux.
La nouvelle écriture proposée devra en tout cas, pour ménager la droite, éviter l'écueil d'être une coquille vide. Pour le patron des députés socialistes, "il ne peut pas y avoir de solution qui irait bien à la gauche, mais qui n'irait pas à la droite". "On prendra une position de groupe officiellement à la fin du débat parlementaire, mais nous y allons avec un a priori plutôt favorable, dans la mesure où il y aurait la loi d'application votée en même temps", a prévenu mercredi Christian Jacob sur LCI.
A gauche, André Chassaigne, chef de file du Front de gauche à l'Assemblée, a dit craindre de se faire "embabouiner" par François Hollande. Le calendrier, lui se précise: le projet de révision constitutionnelle sera débattu à l'Assemblée nationale à partir du 5 février, un vendredi, un choix qui contrarie plusieurs responsables LR et UDI.