Nicolas Sarkozy s'est déclaré opposé à l'extension de la déchéance de nationalité à tous les Français, pour ne pas créer des apatrides, selon des participants au bureau politique du parti mercredi. Le bureau politique s'est au final prononcé en faveur de la révision constitutionnelle mais sous certaines conditions.
Sur 51 présents, cinq membres du BP ont voté contre : Nathalie Kosciusko-Morizet, Patrick Devedjian, Hervé Mariton, Benoist Apparu et Edouard Philippe. Il y a eu deux abstentions : Gérard Longuet, Rachida Dati.
Le texte soumis au vote par Nicolas Sarkozy pose certaines conditions, notamment l'extension de la déchéance de nationalité aux «délits de terrorisme» et non aux seuls crimes. En fait, l'article 25 du code civil sur la déchéance de nationalité concerne les crimes et les délits mais le projet gouvernemental, après des réserves du Conseil d'Etat, n'a pas retenu les délits pour la déchéance des binationaux nés français.
Les Républicains veulent aussi connaître le calendrier d'application et ses conditions (présenter la loi d'application en même temps que la révision constitutionnelle), élargir les possibilités de pose de bracelet électronique par décision administrative.
Demande d'une commission d'enquête parlementaire sur les attentats
Nicolas Sarkozy veut également faire une «demande solennelle» de commission d'enquête parlementaire sur les attentats de 2015. «Cela permet de ne pas tomber dans le piège, de ne pas voter en se bouchant le nez mais au contraire en faisant des propositions pour aller plus loin», a expliqué, selon des participants, Nicolas Sarkozy, qui demande également que «la déchéance prenne effet dès le prononcé de la peine, et pas à l'issue de la peine» et qu'elle soit «couplée avec l'expulsion».
De plus, selon un communiqué publié à l'issue du BP, «Les Républicains exigent le changement complet de la politique pénale du gouvernement qui doit se traduire par la fin de toute remise automatique ou réduction de peine en lien avec les activités terroristes, par la pénalisation de la consultation régulière des sites djihadistes, par la mise en oeuvre de la rétention de sûreté pour les terroristes condamnés à leur sortie de prison, par l'ouverture de centres de déradicalisation».
Désaccords au sein du parti
Alain Juppé a rappelé sa position sur l'inefficacité de la déchéance. «Mais il a dit qu'il était néanmoins d'accord sur tout avec M. Sarkozy, sauf sur l'extension aux délits», avant de finalement voter pour. Jean-François Copé est également en désaccord avec l'extension de la déchéance de nationalité aux délits de terrorisme. «Il craint qu'on ait l'air de mettre des conditions pour ne pas voter» la révision constitutionnelle.
«Pourquoi veux-tu donner une victoire à Hollande ?», a lancé Patrick Devedjian à Nicolas Sarkozy. Qui a répondu : «C'est une victoire idéologique de la droite qui l'avait demandée (la déchéance). Plus vous serez pour, plus vous obligerez la gauche à sortir de l'ambiguïté».
Mais «c'est un coup politique» du gouvernement, «on n'a pas besoin de la Constitution pour prendre ces mesures», a argué Nathalie Kosciusko-Morizet. Pour NKM, c'est «soit l'indignité nationale, soit la déchéance de nationalité. Mais pour tous. C'est un très mauvais symbole que de prendre une mesure discriminatoire pour les binationaux».
Puisque «tout le monde dit que c'est inutile, peut-être pourrions-nous éviter des voter des mesures qui ne servent à rien», a lancé Hervé Mariton. «La déchéance de nationalité est le problème de la gauche, pas de la droite. Nous la votons», a plaidé Bruno Le Maire.