Manuel Valls a annoncé ou confirmé lundi des mesures contre les discriminations et pour la mixité sociale, dix ans après les émeutes urbaines.
Aux Mureaux, une commune populaire en grande périphérie de Paris, le Premier ministre, flanqué de pas moins de 17 membres du gouvernement, est venu "amplifier" une première série d'annonces faites en mars pour combattre l'"apartheid social, territorial et ethnique" dénoncé par le Premier ministre. "Il y a dix ans, notre pays a été secoué par plusieurs semaines de troubles qui n’ont laissé personne indemne. La douleur, les images, les cicatrices sont encore là", a estimé le Premier ministre. "Laisser faire, c’est prendre le risque d’une explosion permanente de notre société", a-t-il averti.
Attaqué à droite sur ce thème, le Premier ministre, qui s'est promené avec des ministres dans des quartiers largement déserts de la cité des Yvelines, s'est défendu de viser avec François Hollande une "reconquête" électorale des "quartiers", qui avaient massivement contribué à l'élection du président en 2012. "Tous ceux qui ne voient les choses qu'à travers cet angle se trompent lourdement, sur les défis que notre pays traverse", a-t-il affirmé.
36 communes récalcitrantes aux logements sociaux
Entre la visite d'une mission locale, du chantier de construction d'un commissariat et d'un nouveau quartier, le Premier ministre et les ministres ont déambulé dans des rues des Mureaux en ne croisant que quelques rares habitants. Mardi, il participera à une émission spéciale du Bondy Blog pour le dixième anniversaire des émeutes de 2005.
Comme en mars, le logement social a occupé une large part du discours de l'exécutif. Le Premier ministre a rendu publique une liste de 36 communes récalcitrantes à leurs obligations en matière de construction de logement social, 15 ans après l'adoption de la loi SRU imposant des quotas minimaux. Dont des communes emblématiques: l'ancien fief de Nicolas Sarkozy, la très fortunée Neuilly-sur-Seine, ou Fréjus, une mairie passée au FN l'an dernier.
Provence-Alpes-Côte d'Azur est la région la plus représentée, avec 17 communes, devant l'Ile-de-France (8), le Languedoc-Roussillon et Rhône-Alpes (5 chacune) et l'Aquitaine (1). Une deuxième liste doit suivre au 1er semestre 2016. Ces communes seront particulièrement ciblées pour appliquer les mesures coercitives annoncées en mars, notamment la délivrance de permis de construire par le préfet à la place du maire ou l'achat de logements anciens par préemption pour en faire des logements sociaux, a précisé Matignon à l'AFP.
Lever les incompréhensions entre les forces de l'ordre et la jeunesse
Manuel Valls a également annoncé une mesure qui vient s'ajouter à celles décidées début mars: les préfets pourront se substituer aux maires récalcitrants pour désigner des candidats quotas de logements sociaux. Une façon aussi de combattre d'éventuels cas de "copinage" discriminatoires. Evoquant "le besoin de lever les incompréhensions qui existent encore trop souvent entre nos forces de l'ordre et une partie de notre jeunesse", Manuel Valls a également confirmé une généralisation des "caméras piétons" fixées sur le torse des policiers, et qui filment leurs interventions.
Le Premier ministre a également confirmé pour la fin de l'année la campagne de "testing" promise par le gouvernement dans le marché du travail, pour combattre les discriminations à l'embauche. Un programme de renouvellement des origines sociales des élèves des écoles administratives sera en outre mis en oeuvre progressivement à partir de la rentrée 2016. Enfin, dix délégués du gouvernement vont être nommés dans dix villes ayant des quartiers difficiles, dont Trappes (Yvelines) et Avignon (Vaucluse).
Accusé de faire de la 'retape'
Les Républicains, par la voix de la porte-parole du parti Lydia Guirous, ont accusé le gouvernement de faire de la "retape" en banlieue. "C'est une tentative un peu vaine de faire oublier le pitoyable déplacement de François Hollande, reçu par des huées à La Courneuve" mardi dernier, a-t-elle estimé.
Quant au candidat FN en Ile-de-France Walleyrand de Saint-Just, il a dénoncé "l’indécence" d’aller promouvoir la "politique de l’échec" du gouvernement aux Mureaux, en évoquant "l’ensauvagement ininterrompu" des banlieues françaises.