L'UMP s'est emparée lundi de la relation Paris-Berlin et des flottements dans la majorité sur l'attitude à l'égard d'Angela Merkel pour s'en prendre frontalement au président François Hollande et à sa politique "catastrophique", dans un communiqué cosigné par Jean-François Copé et François Fillon.
Dans ce qui est la première initiative conjointe des deux rivaux du premier parti d'opposition, depuis la crise interne de fin 2012, le président de l'UMP et l'ancien Premier ministre ont dénoncé "la responsabilité personnelle" de M. Hollande "dans la dégradation continue et consternante de la relation franco-allemande et dans le climat germanophobe qui gagne le PS et son allié d'extrême gauche", une allusion à Jean-Luc Mélenchon.
Dès ses débuts européens au sommet de Bruxelles de juin 2012, le nouveau chef de l'Etat "a manoeuvré pour tenter d'isoler la chancelière allemande". Le résultat de ce "comportement indigne" est "catastrophique : la France est isolée en Europe, sa voix est inaudible", ont-ils affirmé.
Depuis la crise qui a failli scinder l'UMP en deux à l'automne dernier, c'est donc la première fois que MM. Copé et Fillon s'expriment d'une même voix. "C'est une manière de montrer notre volonté d'exprimer ensemble une position forte de l'UMP sur un sujet majeur pour la France", a expliqué M. Copé à l'AFP. Selon lui, "la ligne rouge a été franchie" par les socialistes sur cette question.
"François Fillon est extrêmement clair quand les circonstances l'exigent. L'inconstance et l'inconsistance de François Hollande exigeaient une position forte de l'UMP", explique de son côté Jérôme Chartier, porte-parole de François Fillon.
L'ancien Premier ministre UMP Alain Juppé a ajouté sa voix aux critiques de MM Copé et Fillon en exhortant "ceux qui ont vocation à exercer le pouvoir dans notre pays à garder leur sang-froid".
Merkozy
L'UMP rejette d'autant plus les critiques socialistes à l'encontre de Berlin qu'elles heurtent à ses yeux de plein fouet la politique mise en place par l'ancien président Nicolas Sarkozy, qui avait fait, avec Angela Merkel, du couple franco-allemand le moteur de l'Union européenne. Le président français et la chancelière allemande y avaient gagné le surnom de "Merkozy".
Au surlendemain des tweets en français et en allemand du Premier ministre Jean-Marc Ayrault, qualifiant d'"indispensable" pour l'Union européenne "l'amitié franco-allemande", la direction du PS s'est à nouveau efforcée de dépassionner le climat et de ressouder les rangs derrière la ligne défendue par l'exécutif.
De son côté, l'UMP a saisi cette crise pour critiquer l'ensemble de la politique économique de François Hollande. Non que ce soit la première fois. Le 25 avril, lors d'une convention de son parti sur l'emploi, M. Copé demandait de nouveau au président de rompre avec "une politique suicidaire" et proposait pour sa part de "libérer le travail" pour revenir au plein emploi. François Fillon a lui aussi dénoncé à plusieurs reprises la politique "désastreuse" de Hollande, l'accusant d'"aggraver la crise" plutôt que de la combattre.
Cette décision d'unir leur critiques signifie-t-elle la fin des hostilités? Plus de cinq mois après la victoire contestée de Jean-François Copé à la tête de l'UMP (le 18 novembre), suivie après un mois de crise par un armistice avec le camp rival, un modus vivendi s'est installé entre fillonistes et copéistes.
Selon l'accord de décembre, une nouvelle élection doit avoir lieu en septembre. Peut-être par crainte de voir les flammes se raviver, ou parce que les circonstances ne s'y prêtent pas alors que l'UMP est déjà en campagne pour les municipales de 2014, plusieurs ténors du parti ont appelé à son report ou à demander leur avis aux militants, ce qui reviendrait probablement au même, vu le peu d'empressement des adhérents à revoter rapidement. Pourtant, "cet accord est toujours en vigueur, le calendrier toujours le même. Il n'y a aucune discussion entre Fillon et Copé pour y mettre fin", martèle M. Chartier.
Après la question allemande, M. Copé aura une nouvelle occasion d'adresser "un non global" à la politique du gouvernement en défilant le 26 mai contre le mariage homosexuel. Bien qu'opposé lui aussi à cette réforme M. Fillon, lui, ne battra pas le pavé, pas plus qu'il ne l'avait fait lors des dernières manifestations nationales des 13 janvier et 24 mars.