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«Je souhaite faire un don de foie et de reins, passez en message privé» : les Birmans les plus pauvres vendent leurs organes sur les réseaux sociaux

Les Birmans sont contraints de vendre leurs organes pour subvenir à leur besoin. [gpointstudio/AdobeStock]

La Birmanie connaît un contexte politique sans précédent et le pays est plongé dans la pauvreté. Pour s’en sortir, les locaux décident de vendre leurs organes afin de pouvoir nourrir leur famille, allant même jusqu'à poster des annonces sur les réseaux sociaux.

«Je souhaite faire un don de foie et de reins», de nombreux messages de ce type fleurissent sur les réseaux sociaux birmans, notamment dans les groupes dédiés à la situation du pays. Depuis le coup d'État de 2021, le Myanmar est plongé dans une crise socio-économique sans précédent.

En 2021, les Nations Unies estimaient que 18,6 millions de personnes auraient besoin d'une aide humanitaire. CNN a révélé que plus de 27 millions d'habitants vivaient sous le seuil de pauvreté. Dans un long reportage, le média américain a enquêté sur ces populations contraintes de vendre leurs organes pour survivre.

Un choix désespéré

Nombreux sont les Birmans sans solution. Sans travail, sans nourriture, beaucoup de citoyen du Myanmar proposent un organe, souvent foie ou rein en échange de quelques millions de kyats birmans correspondant à une poignée de milliers d’euros. Sur Facebook, des groupes ont été créés spécialement pour l’achat et la vente d’organes.

Des groupes ont été créés sur les réseaux sociaux pour faciliter ces transactions illégales. April, 26 ans (nom d'emprunt), rêvait d'être infirmière mais a dû renoncer pour aider sa famille malade. Elle a publié un message sur les réseaux sociaux : «Je veux faire don de mon rein. Mon groupe sanguin est O. J'ai besoin d'argent pour ma tante qui a un cancer et doit être opérée. J'ai 26 ans, je ne bois pas. Envoyez-moi un message privé».

Ces offres attirent des personnes fortunées en quête d'organes, prêtes à contourner les longues procédures légales. Des «agents» organisent des transplantations en Inde, où près de 10.000 transplantations rénales entre personnes vivantes ont été réalisées en 2022, selon l'Organisation nationale de transplantation d'organes et de tissus.

Une pratique illégale et répandue

En Birmanie, depuis le coup d'État et la pandémie de Covid-19, les transplantations ne peuvent se faire que dans les hôpitaux militaires. La pénurie de médecins, due aux manifestations et aux arrestations, a aggravé la situation.

À côté, l'Inde, bien qu'interdisant la vente d'organes, tolère les dons entre membres de la famille. Les «agents» créent de faux documents pour contourner cette réglementation. Thiri Khine (nom d'emprunt) a raconté à CNN comment elle a dû simuler un mariage avec son donneur pour obtenir la validation d'une transplantation. Atteinte d'une maladie rénale, la veuve n'a pas pû attendre les délais de la voie légale. Elle a donc dû préparer méticuleusement à répondre aux questions du comité d'autorisation pour ne pas éveiller les soupçons quant à son faux mariage.

Un contexte politique instable

Après les élections législatives de novembre 2020, la Ligue nationale pour la démocratie (LND) a remporté, une nouvelle fois, la majorité des sièges aux différentes chambres, devançant le Parti de l'union, de la solidarité et du développement (PUSD), contrôlé par l'armée.

Fin janvier 2021, le général Min Aung Hlaing, chef des forces armées, a contesté les résultats du scrutin et exigé une vérification des listes électorales, tout en proférant des menaces.

Le parti victorieux envisageait alors de réduire le rôle de l'armée dans le pays. Par ailleurs, la loi birmane fixe une limite d'âge de 65 ans pour le chef des forces armées, limite que Min Aung Hlaing avait dépassée en juillet 2021. Le successeur devant être choisi par le président du pays.

Le 1er février 2021, le président Win Myint et la conseillère d'État Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix en 1991, ont été arrêtés par les forces armées. Le vice-président Myint Swe, membre du PUSD, a alors été porté à la présidence par intérim et a octroyé les pleins pouvoirs au chef de l'armée, qui a déclaré l'état d'urgence du pays.

S'en est suivie une guerre civile et de nombreuses manifestations à travers le pays. En 2022, plus de 14.000 personnes avaient été arrêtées et plus de 2.000 tuées. Ces tensions et ces manifestations perdurent encore aujourd'hui au Myanmar. Le pays est ainsi retombé sous un régime autoritaire dirigé par les forces armées, contre lequel la LND lutte depuis des décennies

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