Le respect des droits des travailleurs se détériore en Europe, selon la Confédération syndicale internationale. Dans un rapport publié ce mercredi 12 juin, elle affirme que le Vieux Continent connaît en la matière le pire «déclin» au monde depuis dix ans.
L'Europe ne mérite plus sa réputation de porte-drapeau mondial pour les droits des travailleurs, d'après la Confédération syndicale internationale (CSI). Dans son rapport annuel, publié ce mercredi 12 juin, l'organisation affirme que le Vieux Continent est la région du monde où le respect des droits des travailleurs s'est le plus détérioré en dix ans.
Ce déclin européen est «le plus prononcé» depuis la création de l'Indice CSI, en 2014. Ce dernier est évalué à l'aide d'une échelle allant de 1 à 5, des «violations sporadiques des droits» des travailleurs jusqu'à «aucune garantie des droits».
Or, l'Europe a vu sa note passer de 2,56 à 2,73 entre 2023 et 2024. Ce, alors que le Vieux Continent affichait encore une note moyenne de 1,84 dix ans auparavant, en 2014. A noter que la CSI, qui fédère 340 syndicats implantés dans 169 pays et territoires, englobe dans le terme «Europe» des pays non membres de l'Union euopéenne tels que le Royaume-Uni, la Suisse et l'Albanie.
La CSI pointe la responsabilité des «groupes autoritaires de droite» qui s'emploient selon elle «à imposer leur propre programme hostile aux travailleurs».
«Cette dégradation continue indique que le modèle social européen (...) est activement démantelé par les gouvernements et les entreprises, à un rythme qui s'accélère, ce qui entraîne de lourdes conséquences dans la région et risque de déclencher un nivellement par le bas à l'échelle mondiale pour les droits des travailleurs», poursuit la Confédération.
En Europe, celle-ci a notamment dégradé la note de la Finlande, accusée de «violations réitérées» des droits des travailleurs en 2024. Cette sanction fait «suite à la proposition, par la coalition de droite du Premier ministre Petteri Orpo de réformes constituant une attaque sans précédent contre le modèle social nordique», écrit la CSI.
«Les réformes en question entendent limiter les grèves politiques à une journée, compromettent les négociations salariales et proposent de réduire les prestations de maladie et les allocations chômage.»
Le droit de grève souvent violé
La Suisse est elle aussi montée d'un cran dans l'échelle de notation de la CSI, passant de «violations réitérées» en 2023 à des atteintes «régulières» aux droits des travailleurs cette année.
Luc Triangle, secrétaire général de la Confédération, affirme qu'«une crise démocratique s'opère dans la région, du fait que les syndicats, les droits des travailleurs et la démocratie sont étroitement liés». D'après le rapport publié ce mercredi, 73% des Etats européens ont «violé le droit de grève» et «des travailleurs ont été victimes de violences dans 9% des pays» du Vieux Continent.
Dans ce contexte la Roumanie fait figure d'exception puisqu'elle prend le chemin inverse : jusqu'ici accusée de violations «systématiques» des droits des travailleurs, elle est désormais responsable d'atteintes «régulières» aux yeux de la CSI. Dans ce pays, le droit de grève a notamment «été étendu et la négociation collective est désormais obligatoire dans les entreprises de plus de dix employés».
Si le cas européen inquiète, la situation des travailleurs est encore pire ailleurs. Ainsi, la région «Moyen-Orient et Afrique du Nord» enregistre une note moyenne de 4,74 sur 5 en 2024, contre 4,25 en 2014.
Avec 16 assassinats de syndicalistes recensés, sur un total de 22 depuis la parution du dernier indice, les Ameriques restent toutefois «la région la plus meurtrière» de la planète pour les travailleurs et leurs représentants. En dix ans, la note moyenne de cette région a évolué en conséquence, passant de 3,16 à 3,56.