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Israël-Hamas : qu'implique un mandat d'arrêt de la CPI et pourrait-il avoir une influence sur le conflit ?

La Cour pénale internationale est située à La Haye aux Pays-Bas. [@REUTERS/Piroschka van de Wouw]

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a réclamé des mandats d’arrêt contre Benjamin Netanyahou, son ministre de la Défense, Yoav Gallant, mais aussi trois dirigeants du Hamas. Mais qu’implique cette décision et aura-t-elle un impact sur le conflit à Gaza ?

La sentence est tombée. Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a réclamé ce lundi un mandat d’arrêt pour «crimes de guerre» et «crimes contre l’humanité» à Gaza, visant le Premier ministre israélien et son ministre de la Défense, mais aussi trois dirigeants du Hamas, Yahya Sinouar, Ismaïl Haniyeh et Mohammed Deif. Si cette décision vise à engager la responsabilité pénale des prévenus en vue d’un procès, plusieurs pays n’ont pas ratifié le «Statut de Rome» et ne reconnaissent donc pas l’autorité de la CPI. 

Selon le préambule du Statut de Rome, qui régit la CPI, la Cour est compétente pour juger les personnes dont la responsabilité pénale est engagée à raison des crimes les plus graves qui touchent la communauté internationale, à savoir les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, le crime de génocide et, depuis le 17 juillet 2018, le crime d’agression. Sur la base de ses enquêtes, le procureur peut demander à la chambre préliminaire saisie de la situation à l’examen d’émettre un mandat d’arrêt. 

Mandat d'arrêt délivré par une chambre préliminaire

Pour demander un mandat, le procureur doit être convaincu qu’il y a des motifs raisonnables de croire que le suspect a commis un crime relevant de la compétence de la CPI. Un tel mandat d’arrêt est délivré afin de garantir que la personne visée comparaîtra, qu’elle ne fera pas obstacle à l’enquête ou à la procédure devant la Cour, ni n’en compromettra le déroulement, ou qu’elle ne poursuivra pas l’exécution du crime dont elle est accusée ou d’un crime connexe (article 58-1-b du Statut).

Pour décider de la mise en œuvre du mandat d’arrêt, la chambre préliminaire de la CPI va examiner les éléments qui poussent le procureur à effectuer cette demande. Cette dernière est composée de trois juges, qui seront chargés d’analyser chacun des chefs d’accusations du procureur et de se pencher sur les preuves disponibles. La confirmation d’un seul des crimes de guerre ou contre l’humanité mentionnés par le procureur peut suffire pour accéder à sa demande de mise en place d’un mandat d’arrêt. 

Un mandat d’arrêt reste en vigueur tant que la chambre n’en a pas décidé autrement (article 58-4 du Statut). Alternativement, les juges peuvent délivrer une citation à comparaître s’ils sont convaincus que cela suffit à garantir la comparution de la personne visée. 124 pays reconnaissent l'autorité de la Cour pénale internationale. Ils sont tous signataires du Statut de Rome. 31 États ont signé le Statut de Rome mais ne l'ont pas encore ratifié, dont Israël ou encore les États-Unis. 

Un impact limité pour Gaza 

Pour autant, si une telle décision représente un véritable tournant symbolique dans l’appréciation internationale des événements à Gaza, elle pourrait avoir un effet limité, puisqu’elle ne s’avère pas contraignante pour les ministres israéliens, qui ne reconnaissent pas l’autorité de la CPI. Dès lors, si l’image de Benjamin Netanyahou et Yoav Gallant serait fragilisée, rien ne permet d’affirmer qu’un mandat d’arrêt aurait un quelconque effet sur l’action d’Israël à Gaza, et notamment sur l’offensive à Rafah, décriée par la communauté internationale en raison de la situation humanitaire locale.

En revanche, en cas de mandat d’arrêt, les deux ministres ne pourraient plus se rendre dans les pays parties de la CPI, puisque ces derniers auront l’obligation de les arrêter sur leur territoire. Parmi eux : la France et l’ensemble de l’Union européenne, mais aussi l’Australie, le Canada, la totalité des pays d’Amérique du Sud et une majorité des pays africains. Une fois les mandats d'arrêt délivrés, la responsabilité de les faire exécuter incombe aux États car la CPI ne dispose pas de sa propre police. Elle compte donc sur leur coopération pour arrêter les suspects visés et les lui remettre.

Si Israël, qui n’a pas ratifié le Statut de Rome, a d’ores et déjà annoncé qu’il ne se pliera pas a l’autorité de la CPI, la Palestine, qui figure bien parmi les États parties, devrait, en théorie, coopérer pour livrer les responsables du Hamas. Au vu des réactions du Hamas et de Benjamin Netanyahou, qui ont tous les deux fustigé les réclamations du procureur de la CPI, cette hypothèse parait plus qu’improbable et le temps de l’apaisement semble encore très loin.

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