Au Brésil a commencé, ce mercredi 13 septembre, le procès historique des émeutes du 8 janvier 2023. Des centaines de partisans de Jair Bolsonaro avaient envahi et saccagé les lieux de pouvoir dans la capitale brésilienne et réclamé un coup d'État.
Les accusés risquent gros. Avec plus de 200 prévenus appelés à la barre, le Brésil a ouvert, ce mercredi 13 septembre, le premier procès des émeutes du 8 janvier 2023, lors desquelles des centaines de manifestants pro-Bolsonaro avaient attaqué les institutions brésiliennes pour protester contre la défaite de leur leader à la dernière élection présidentielle.
Ce procès se veut historique, car des poursuites sont engagées contre 232 personnes, qui ont tenté de renverser les institutions quelques jours après l’arrivée au pouvoir du candidat de gauche Luiz Inácio Lula da Silva, dit Lula. Des images qui avaient fait le tour du monde, non sans rappeler l’invasion du Capitole aux États-Unis par des partisans de Donald Trump, qui s’était produite deux ans plus tôt.
Ouverts par la Cour suprême brésilienne, ces procès sont d’autant plus importants que le Brésil reste marqué par vingt ans de dictature militaire (1964-1985), dont de nombreux électeurs d’extrême droite sont nostalgiques, et dont Jair Bolsonaro a plusieurs fois vanté les mérites.
Rappel des faits : une tentative de coup d'État
Lors du second tour de l’élection présidentielle brésilienne de 2022, l’ancien président de gauche Lula, a dépassé de peu son adversaire d’extrême droite, le président sortant Jair Bolsonaro, avec 50,9% des voix. Il a ainsi été élu président pour la troisième fois de sa carrière politique, au grand dam des électeurs de droite et d’extrême droite. Comme le veut la Constitution brésilienne, Lula a été officiellement investi le 1er janvier 2023, quelques semaines après son élection.
Une semaine après son arrivée au pouvoir, le 8 janvier, une centaine de bus venant de tout le Brésil a pris la direction de la capitale pour une grande manifestation. Environ 4.000 personnes ont participé au rassemblement, exigeant l’intervention des militaires pour déloger Lula et reprendre le pouvoir. Les manifestants ont pénétré illégalement dans le palais présidentiel, la Cour suprême et le Congrès national et ont saccagé les lieux, détruisant notamment du mobilier et des oeuvres d'art appartenant au patrimoine national. Au moment de l'invasion, le président Lula ne se trouvait pas au palais présidentiel.
Les forces de l’ordre avaient paru complètement dépassées. Au total, 1.800 personnes avaient été arrêtées.
Que risquent les accusés ?
Ce mercredi, le procès de quatre participants à ces émeutes a débuté. Âgé de 24 à 52 ans, ils sont accusés d’avoir participé à l'invasion et la destruction des différents bâtiments abritant les institutions brésiliennes. La justice a notamment effectué un travail minutieux d’enquête sur les réseaux sociaux, et a identifié les accusés à travers des vidéos qu’ils ont parfois eux-mêmes postées, se montrant à l’intérieur des lieux de pouvoir.
Selon la Globo, ils sont notamment poursuivis pour «association criminelle armée», «tentative d’abolition de l’État de droit démocratique», «tentative de coup d’État», et «détérioration du patrimoine classé».
Au total, les accusés risquent jusqu’à 30 ans de prison. Les onze juges de la Cour suprême vont devoir chacun leur tour se prononcer pour chacun des accusés. Le président de la Cour, Alexandre de Moraes, a déjà voté pour une peine de 17 ans de réclusion pour le premier accusé.
Responsabilité de la police et de certains fonctionnaires
Après les émeutes, la responsabilité de la police, de l’armée, et de quelques hauts-fonctionnaires a été pointée du doigt. Plusieurs personnes ont été arrêtées en août dernier. Selon le parquet général, des preuves collectées lors de l’enquête ont montré que des agents de la direction de la police ont reçu «divers rapports du renseignement indiquant des intentions de coup d'État du mouvement (bolsonariste) et le risque imminent d'une invasion des sièges des trois branches du pouvoir», et n’ont donc pris aucune décision pour empêcher les émeutes.
Par ailleurs, l’ex-président brésilien, Jair Bolsonaro, fait lui aussi l’objet d’une enquête de la Cour suprême, qui s’interroge sur son rôle dans les émeutes du 8 janvier, alors même qu’il se trouvait aux États-Unis au non au Brésil ce jour-là. Il a déjà été auditionné plusieurs fois par la Police fédérale, et a nié toute conspiration contre son adversaire Lula et toute implication dans les émeutes. Fin juin, il a toutefois été condamné par le Tribunal suprême électoral à huit ans d’inéligibilité, pour avoir diffusé de fausses informations sur le système électoral brésilien et sur la présidentielle.