Après avoir tenté de mener une rébellion armée via le groupe Wagner en Russie, Evguéni Prigojine a finalement renoncé à son projet. D’après le général Bruno Clermont, consultant en défense, le paramilitaire a été le grand gagnant du bras de fer lancé avec Vladimir Poutine.
Une tentative de coup d’Etat avortée mais un gain de popularité annoncé. Après avoir tenté de mener une rébellion armée via le groupe Wagner en Russie, Evguéni Prigojine a finalement renoncé à son projet avant de prendre la direction du Bélarus. Mais d’après le général Bruno Clermont, consultant en défense, il reste le grand gagnant du bras de fer lancé avec Vladimir Poutine.
«Je pense que la comparaison avec une pièce de théâtre est un peu risquée car qui dit pièce de théâtre dit scénario écrit à l’avance et là, ce n’était probablement pas le cas. Il y a peut-être des connivences à certains niveaux, avec des éléments qui ont fuité avant cette action de Prigojine. Les Américains et le service de renseignement britannique l’ont confirmé», a estimé l’expert.
Sur le plan tactique, ce dernier a préféré évoquer «un coup de bluff» tenté par l’ancien cuisinier du chef d’Etat russe. «Cela ressemble malgré tout, dans la complexité qui a été décrite de la société russe et de l’histoire russe, à un bon coup de bluff de Prigojine pour sauver à la fois sa tête et son armée Wagner. Personne ne savait jusqu’où il irait», a analysé le général Clermont.
«Le tournant, c’était le discours de Poutine»
D’un point de vue stratégique, le général Bruno Clermont a assuré que le dernier discours de Vladimir Poutine était un tournant en termes de communication.
«Le tournant pour moi, c’était le discours de Poutine. Quand on le remet dans le contexte de ce qui se passe aujourd’hui, maintenant qu’on sait que Prigojine a fait demi-tour, il est lunaire ce discours. Il place la barre très haut, on a l’impression d’une Russie au bord de la guerre civile. Donc comment savoir si Poutine joue à un jeu ou s’il était totalement sincère ?», a jugé le consultant en défense.
A l’inverse, Evguéni Prigojine est ressorti grand gagnant de cette guerre de communication lancée à l’encontre du chef d’Etat russe.
«Ce qui est certain, c’est que c’est que le vainqueur de cette affaire-là, c’est Prigojine. Non seulement il a sauvé sa tête mais en plus, je pense qu’il va devenir populaire dans une partie de la population russe. Il a sauvé son armée Wagner qui lui permet d’exister. On ne sait pas ce qu’elle va devenir mais en tout cas, elle ne va pas disparaître au sein de l’armée russe», a analysé Bruno Clermont.
Vladimir Poutine fragilisé par cette affaire
Sur le plan international, ce conflit interne en Russie a alimenté les inquiétudes et les réunions au sommet au sein des pays occidentaux.
«Le dernier élément qui m’a impressionné, c’est l’emballement médiatique et l’inquiétude des diplomaties. Même s’il n’y a pas eu de réunions du conseil de défense en France, il y a quand même eu des échanges entre les principaux responsables politiques et diplomatiques en Europe pour savoir de quoi il s’agissait et jusqu’où ça allait», a expliqué le général.
Fragilisé par cette affaire, Vladimir Poutine pourrait être contraint de se séparer de son ministre de la Défense, Sergueï Choïgou.
«C’est une journée folle comme cette guerre nous en réserve. Celle-ci est particulière et elle fragilise le président Poutine, qui se retrouve dans une situation qu’il ne semble pas maîtriser et qui a fragilisé en particulier son ministre de la Défense. Il sera étonnant de savoir s’il va rester en poste ou s’il sera remplacé, comme le demandait Prigojine de façon pressente», a conclu le général Clermont.