La médecin Caitlin Bernard a été sanctionnée ce jeudi 25 mai par l’ordre des médecins de l’Indiana (Etats-Unis) pour avoir médiatisé un avortement pratiqué par ses soins en 2022 sur une fillette de 10 ans.
Une affaire qui divise la classe politique aux Etats-Unis. La médecin Caitlin Bernard a été sanctionnée ce jeudi 25 mai par l’ordre des médecins de l’Indiana (Etats-Unis) pour avoir rompu le secret professionnel en médiatisant un avortement qu’elle a pratiqué en 2022 sur une fillette de 10 ans.
Dr. Caitlin Bernard is in front of the state medical board. This is in response to AG Rokita’s complaint that she violated patient privacy and reporting laws in the case of a 10 yr. old pregnant rape victim who traveled from Ohio for an abortion.
Follow this thread for updates. pic.twitter.com/TLrCDAMDOz— Kaitlyn Kendall (@KaitlynReports) May 25, 2023
A l’origine, la médecin a évoqué le cas auprès d’un journaliste de l’hebdomadaire local Indianapolis Star lors d’une manifestation en faveur du droit à l’avortement. Si la professionnelle de santé a pris la précaution de ne pas nommer sa patiente, le buzz créé autour de cette histoire l’a rattrapée. Cette affaire est survenue dans un contexte tendu, quelques semaines après la révocation de l’arrêt Roe vs Wade donnant aux Etats américains la liberté de restreindre l’avortement. Sa médiatisation avait attiré l’attention du président américain Joe Biden, tout comme les critiques des élus conservateurs.
Pour sa défense, la médecin a mis en avant la nécessité d’informer les Américains sur les restrictions au droit à l’avortement progressivement instaurées aux Etats-Unis. «Je pense qu'il est extrêmement important que les gens comprennent l'impact réel des lois de ce pays», a justifié Caitlin Bernard lors de son audience, suivie par le New York Times. Elle a ajouté que ses commentaires n’avaient divulgué aucune information de santé de sa patiente.
Un argumentaire qui n’a pas convaincu le conseil médical de l’Etat, qui l’a condamnée ce jeudi à une amende de 3.000 dollars, soit plus de 2.800 euros, assortie d’une lettre de réprimande. Le conseil a néanmoins renoncé à une suspension plus sévère, comme la suspension, estimant que la médecin incriminée était apte à reprendre son activité.
La docteure se dit victime d’un «coup politique»
Les avocats des deux parties ont fait appel à des experts en confidentialité médicale pour comprendre si la docteure avait violé les directives de la loi sur la protection de la vie privée des patients. Son employeur, Indiana University Health, a assuré qu'elle n'avait pas enfreint cette loi car la patiente n'était pas identifiable sur la base des informations partagées publiquement.
Un avis qui n’a pas été partagé par le conseil médical de l’Etat, composé de six médecins et d’un avocat, tous nommés par le gouverneur. Ces derniers ont affirmé que la divulgation de l’âge de la fillette, ainsi que son viol, son avortement et son Etat d’origine, étaient des informations suffisantes pour l’identifier.
NOW: Indy OB/GYN Dr. Caitlin Bernard appears before the Indiana Medical Licensing Board following a complaint from AG Todd Rokita. He alleges Bernard violated a patient’s privacy rights after she told the Indy Star she provided abortion care to a 10-year-old Ohio rape victim. pic.twitter.com/XIF2YJ21Nl
— Kristen Eskow (@KristenEskow) May 25, 2023
A l’origine de cette sanction, le procureur général de l'Etat Todd Rokita, un républicain opposé à l'avortement, a entamé des poursuites judiciaires contre la docteure depuis près d’un an. Il s’est félicité de la décision rendue ce jeudi. «Cette affaire concernait la vie privée du patient et la confiance entre le médecin et le patient qui a été rompue», a-t-il réagi dans un communiqué publié après le verdict.
De son côté, Caitlin Bernard a regretté à l’issue du jugement l’attitude du procureur général de l’Etat, qu’elle a accusé d’avoir transformé cette affaire en «coup politique».
Pour rappel, l'Indiana a adopté une loi interdisant la plupart des avortements avec d'étroites exceptions pour le viol et l'inceste, mais ce texte a été suspendu dans l'attente d'un recours en justice. L'avortement est donc toujours légal dans cet Etat jusqu'à 22 semaines.