En un an, la guerre en Ukraine aura engendré son lot de désinformation et de propagande, aussi bien du côté de Kiev que du Kremlin.
La guerre numérique au cœur du conflit russo-ukrainien. Un an après le début de la guerre, entamée par l'invasion des troupes de Vladimir Poutine en Ukraine via la Crimée le 24 février 2022, la bataille de l'information s'est révélée déterminante.
Et avec le flot d'informations, plusieurs Fake news ont été largement relayées, notamment par les comptes officiels de Kiev et de Moscou. A commencer par cette une du magazine Time sur laquelle le président russe Vladimir Poutine apparaissait grimé avec la moustache d'Adolf Hitler.
Une autre fausse Une du magazine Time, montrant une photo de Vladimir Poutine mêlée à une photographie de Hitler, se propage à la vitesse grand V. Cette Une n'a jamais été publiée. La plus récente (et vraie) Une du Time est beaucoup plus sobre (voir photo ci-dessous). #Ukraine pic.twitter.com/3V3JO6AVgw
— Hadi Hassin (@hassinhadi) February 28, 2022
Cette une était en fait un montage photo réalisé par le graphiste gallois Patrick Mulder. En février 2022, il avait confié à nos confrères de France Inter avoir réalisé une «série de trois images le jour où la Russie a envahi l'Ukraine», après avoir trouvé que la couverture officielle du Time «manquait d'inspiration et de conviction».
Le président Ukrainien Volodymyr Zelensky a lui-aussi a été victime d'un photomontage plus que douteux, rendu populaire sur les réseaux sociaux. En juin 2021, le chef de l'Etat avait posté une photo depuis son compte Instagram, maillot de la sélection ukrainienne de football floqué à son nom dans les mains.
Ce cliché avait alors été détourné au début du conflit, laissant volontairement apparaître une croix gamée sur le maillot, alors que Vladimir Poutine a justifié son «opération militaire spéciale» en raison de la nécessaire «dénazification de l'Ukraine».
be careful people of this fake picture of zelensky . the original one is during euro 2020 one pic.twitter.com/PxPgoHrGD1
— Nyr Zenovka (@NyrZenovka) March 1, 2022
De son côté Kiev, n'a pas non plus hésité à utiliser de fausses informations pour galvaniser ses troupes et élever au rang de héros certains soldats. Du 24 février au 30 juin, les forces russes avaient multiplié les assauts vers l'Ile des Serpents, un petit bout de terre ukrainienne situé à une cinquantaine de kilomètres de l'embouchure du Danube et à une centaine de kilomètres d'Odessa.
Un enregistrement sur lequel les soldats ukrainiens invitaient les Russes à «aller se faire foutre» (sic) avant de se faire bombarder avait alors été massivement repris par les médias occidentaux, puis accueilli par Volodymyr Zelensky comme un acte de bravoure, faisant de ces soldats des martyrs et des héros de guerre. «Que la mémoire de ceux qui ont donné leur vie pour l'Ukraine vive à jamais», avait même déclaré le chef de l'Etat, indiquant sa volonté de leur remettre des médailles à titre posthume.
« Allez vous faire foutre. »
Cet échange audio glaçant provient de la petite île des Serpents, située en mer Noire. Treize soldats ukrainiens sont morts après avoir refusé de se rendre aux militaires russes. https://t.co/llKGXqCDzy #UkraineInvasion #UkraineRussia pic.twitter.com/QTPREGuSHT— Le Point (@LePoint) February 25, 2022
Pourtant, selon les autorités russes, ces soldats n'avaient pas été tués lors de cet assaut. Moscou avait précisé dans une déclaration officielle que les quatre-vingt deux militaires avaient choisi de se rendre avant d'être «renvoyés chez eux». Une version confirmée ensuite par Kiev.
La propagande du Kremlin censurée par les Occidentaux
Pour combattre au mieux cette désinformation, les pays occidentaux ont pris des mesures. Quelques jours après l'invasion russe en Ukraine, le Conseil de l’UE a adopté, dès le 2 mars 2022, un règlement visant à lutter contre les «actions de propagande» mises en œuvre par le Kremlin pour «justifier et soutenir son agression de l’Ukraine».
En France les chaînes RT France et le média intégralement financé par l'Etat russe Sputnik ne peuvent plus émettre. En conséquence, une chute vertigineuse des activités des deux médias accusés de désinformation en faveur du Kremlin a été constatée en Europe. Sputnik en français est passé de 12 millions à 350.000 visites mensuelles totales entre janvier 2022 et janvier 2023, selon SimilarWeb, qui compare et recense le trafic des sites internet.
Cependant, malgré leur interdiction de poursuivre la diffusion dans l'Union européenne, RT France et Sputnik utilisent des sites miroirs pour continuer d'être accessibles. Selon les recherches de Maxime Audinet, publiées sur l'Ina, une dizaine de copies de ces médias continuent de permettre l'accès aux sites, sans avoir recours à un VPN. En décembre 2022, plus de 650.000 visites ont été enregistrées sur fra.mobileapiru.com, qui renvoie vers RT France.
Et Moscou n'est pas en reste dans cette guerre de l'information. Le 4 mars 2022, la Russie avait instauré une loi verrouillant l'accès à plusieurs chaînes occidentales d'informations telles que CNN, la RAI ou encore la chaîne espagnole RTVE, mais aussi aux réseaux sociaux américains Twitter, Facebook, ou encore Instagram.
La maison-mère de ces deux derniers, Meta, avait même été classée parmi les organisations «terroristes et extrémistes» par Moscou, en octobre dernier.