Les républicains ont pris le contrôle de la Chambre des Représentants des Etats-Unis depuis début janvier, et ont décidé de continuer le travail entamé par la Cour suprême en juin dernier en faisant adopter des lois mettant en péril l'avortement.
Aussitôt la majorité reprise à la Chambre des représentants, aussitôt le droit à l’avortement mis en danger. Ce mercredi, les républicains, désormais majoritaires à la chambre basse du Congrès américain, ont voté en faveur d’une proposition de loi prévoyant l’obligation pour les prestataires de santé de tenter de préserver la vie d'un enfant dans le cas rare où un bébé naîtrait vivant pendant ou après une tentative d'avortement.
Selon le texte voté à 220 voix contre 210, baptisé «loi sur la protection des survivants de l'avortement nés vivants», les prestataires qui ne respectent pas cette exigence risqueront une amende et jusqu’à cinq ans de prison. Il ne prévoit aucune sanction contre les femmes qui décident d’avorter. Toutefois, les opposants à ce projet estiment qu’il vise à restreindre le droit à l'avortement en menaçant directement les structures et prestataires de santé, et en dissuadant ainsi les femmes et les médecins d’avoir recours à une IVG.
Ce texte soutenu par les républicains vient s'ajouter à la décision de la Cour suprême du mois de juin qui a révoqué le droit fédéral à l’avortement. Il pourrait empêcher les médecins de déclencher un avortement en cas de grossesse non viable ou de mort du fœtus pendant la grossesse.
Malgré son adoption par la Chambre des Représentants, ce texte ne devrait pas passer au Sénat, où les démocrates, très largement pro-choix, sont majoritaires.
Condamner les violences envers les pro-vie
Une autre résolution a également été adoptée ce mercredi par la Chambre des Représentants, qui condamne les attaques contre les structures, groupes et églises «pro-vie». Le texte fait notamment référence à des actes de violence contre certaines structures anti-avortement en mai dernier, lorsque des documents de la Cour suprême avaient fuité et révélaient que la plus haute instance juridique du pays envisageait de revenir sur le droit à l'IVG. Cette résolution accuse entre autres «l'administration Biden de ne pas avoir pris de mesures pour répondre à ces attaques radicales».
Les démocrates ont pointé du doigt le fait que cette proposition soit «unilatérale» et qu’elle «attise les flammes du sentiment anti-avortement et anti-liberté», puisqu’elle ne condamne pas à l’inverse les violences commises à l’encontre des cliniques pratiquant les IVG. Pourtant, le groupe de défense du droit à l'avortement NARAL Pro-Choice America a recensé 7.200 actes de violence à l'encontre de prestataires de services d'avortement depuis 1975, dont 42 attentats à la bombe, 185 incendies criminels et des «milliers de menaces de mort», selon The Independent.
un sujet clé aussi bien pour les démocrates que les républicains
Hakeem Jeffries, leader des démocrates à la chambre basse, a fustigé cette proposition de loi des républicains, et affirmé qu’ils n’avaient «rien fait sur l'inflation, rien sur les questions de qualité de vie pour le peuple américain, rien même sur la sécurité publique» dans leurs premiers jours au pouvoir. «Vous venez à la tribune dans le cadre de votre marche pour criminaliser les soins d'avortement. Pour imposer une interdiction à l'échelle nationale. Pour mettre en place des grossesses imposées par le gouvernement», a-t-il déploré.
Le droit à l’avortement a été l’un des principaux arguments de campagnes lors des élections de mi-mandat aux Etats-Unis en novembre dernier, notamment pour le camp de Joe Biden qui s'est positionné en défenseur de ce droit. Certains observateurs imputent la faible majorité républicaine, alors qu’une «vague rouge» était envisagée, à leur conservatisme sur cette question, et donc à leur échec à convaincre un électorat plus modéré.
Nancy Mace, élue républicaine de la Caroline du Sud, a critiqué ces textes présentés par son parti, l’invitant à trouver une meilleure balance entre «droit des femmes» et «droit à la vie». «Si vous regardez les midterms, il y a une raison pour laquelle nous avons une très faible majorité, a-t-elle déclaré en conférence de presse. Je pense que les questions relatives aux femmes sont un problème que nous devons aborder. Nous devons être plus ouverts, plus transparents et plus compatissants envers les femmes», a-t-elle ajouté, bien qu'ayant voté pour les deux lois présentées par son parti.