La Chine a demandé au Conseil de sécurité de l'ONU d'imposer à Haïti un embargo sur les armes légères et des sanctions individuelles contre les chefs de gangs, mais aussi d'appuyer l'envoi d'une force de police régionale dans ce pays gangrené par la violence.
La Chine tape du poing sur la table. Après de nombreux affrontements qui se sont déroulé en Haïti, dressant pour l’heure un bilan de 89 morts, la Chine a demandé au Conseil de sécurité de l’ONU des sanctions contre les chefs de gangs et un embargo sur les armes utilisées lors des rixes.
Ces mesures, selon Pékin, peuvent s'inscrire dans le cadre du renouvellement de la mission politique de l'ONU (Binuh) expirant vendredi soir, qui doit faire l'objet d'un vote vendredi à une heure indéterminée.
Les deux pays responsables du dossier haïtien au Conseil de sécurité, les Etats-Unis et le Mexique, n'avaient pas prévu d'aller aussi loin dans leur projet initial de résolution, et des négociations ardues se poursuivent sur le sujet, selon des diplomates.
«La situation en Haïti ne pourrait être pire» avec «la violence des gangs qui s'intensifie à Port-au-Prince», a indiqué une porte-parole de la mission diplomatique chinoise auprès de l'ONU. «Un embargo sur les armes contre les gangs criminels est le minimum que le Conseil doive faire en réponse à une situation épouvantable», a-t-elle ajouté.
Selon un projet de texte obtenu par l'AFP incluant les propositions d'amendements de la Chine, les sanctions individuelles incluraient des interdictions de voyager et des gels d'avoirs. Selon un diplomate anonyme, Washington n'est pas contre des sanctions mais elles doivent être les bonnes. Décréter un embargo sur les armes sans création d'un comité de sanctions ni de groupe d'experts de l'ONU pour vérifier son application n'a guère de sens, ajoute cette source, en jugeant qu'un régime de sanctions implique une résolution séparée.
Volonté de représailles
Sur le dossier haïtien, Pékin est devenu à l'ONU un acteur clé ces dernières années. La raison ? Une volonté chinoise de représailles, assurent des diplomates, après la reconnaissance de Taïwan par Port-au-Prince. Pékin dément établir un lien entre les deux sujets.
En effet, lors de réunions de l'ONU, la Chine se montre régulièrement très virulente pour dénoncer un pays qui s'enfonce dans la crise politique et économique, en dépit de multiples aides internationales et de différentes missions de Casques bleus jusqu'en octobre 2019.
«Il faut lutter contre le trafic des armes en Haïti, pousser les autorités politiques à sortir de leur léthargie et menacer de sanctions judiciaires les responsables des violences», insiste auprès de l'AFP une source diplomatique chinoise, toujours sous couvert d'anonymat.
Le projet de texte, qui devrait encore évoluer d'ici une mise au vote, prévoit une reconduction jusqu'au 15 octobre 2023 de la Binuh.
Il exige des parties haïtiennes un accord urgent, dans les six mois ou avant, pour définir un nouveau processus politique menant à des élections présidentielles et législatives.
L'embargo sur les armes légères concernerait aussi les munitions, et viserait à mettre un coup d'arrêt aux trafics et aux enlèvements contre rançon, devenus monnaie courante en Haïti.
La résolution exigerait également un arrêt immédiat des violences et des activités criminelles, ainsi que la fin des blocages des routes.