Grande consultation citoyenne lancée il y a un an, la Conférence sur l'avenir de l'Europe a officiellement remis ses propositions ce dimanche, au Parlement de Strasbourg.
Qu'est-ce que la Conférence sur l'avenir de l'Europe ?
Lancée l'an dernier à l'initiative d'Emmanuel Macron, la Conférence sur l'avenir de l'Europe a réuni 800 citoyens européens, sélectionnés de manière aléatoire et regroupés en quatre panels thématiques de 200 citoyens.
Invités à débattre de l'avenir de l'Union européenne lors de trois sessions délibératives, ils ont pu formuler des propositions pour améliorer les politiques de l'UE ou ses instances. Une plateforme collaborative permettait également à n'importe quel citoyen d'apporter ses idées.
Après un an de débats, un document final a été remis aux différentes institutions de l'Union européenne ce dimanche, à Strasbourg. Il contient 49 recommandations, détaillées en plus de 300 mesures, sur des thèmes comme les institutions européennes, l'environnement, les migrations ou encore la santé.
«Le format combine la démocratie citoyenne et représentative. Outre les citoyens européens, des parlementaires européens et nationaux, des représentants de la Commission et des gouvernements ont aussi participé au processus. C'est une garantie pour que les conclusions de la Conférence ne tombent pas aux oubliettes», analyse pour CNEWS Christine Verger, vice-présidente de l'Institut Jacques Delors.
Quelles propositions ont été faites ?
Plusieurs propositions visent à rendre les institutions européennes plus efficaces et plus démocratiques.
Sur la table depuis plusieurs années, la fin du vote à l'unanimité au Conseil de l'UE (réunion des ministres) en fait partie. Les citoyens de la Conférence proposent que, sur des sujets comme le budget ou la fiscalité, les décisions soient prises à la majorité qualifiée, soit 55% des Etats membres (15 sur 27).
«Il y a trop de sujets sur lesquels on traîne des pieds car on ne peut pas avancer sans l'unanimité. Il suffit de voir les difficultés qu'a eu l'UE pour faire adopter la directive sur les travailleurs détachés», souligne Christine Verger.
Les 800 citoyens proposent également de mettre en place des listes transnationales aux élections européennes, de donner l'initiative législative au Parlement européen (actuellement réservée à la Commission) ou encore d'instaurer l’élection directe du président de la Commission.
Aujourd'hui, le président de la Commission européenne est élu par le Parlement européen, sur proposition du Conseil européen. Une procédure jugée peu démocratique. «En 2019, la désignation d'Ursula von der Leyen n'avait pas fait l'unanimité car elle n'avait pas pris part aux élections européennes, contrairement à son prédécesseur Jean-Claude Juncker», rappelle la spécialiste.
D'autres propositions concernent un élargissement des compétences de l'UE, en matière de santé par exemple. «La pandémie a montré qu'un partage des compétences entre UE et Etats membres permettrait d'aller plus vite quand on fait face à ce type de crise.»
Faudra-t-il une réforme des traités ?
Certaines mesures, notamment celles modifiant le fonctionnement démocratique de l'UE, requièrent de réformer les traités européens.
C'est une procédure complexe, qui nécessite d'obtenir l'unanimité des 27 Etats membres et le vote de la réforme dans tous les parlements nationaux (en comptant les chambres hautes et basses, ils sont au nombre de 39 dans l'UE).
Ce dimanche, 13 Etats membres ont déjà fait savoir qu'ils rejetaient une réforme des traités. Dans un communiqué diffusé par la Suède, la Pologne, la Roumanie, la Finlande, la Suède, le Danemark ou encore la République tchèque estiment que la révision des traités «n’a jamais été un objectif» de la Conférence.
«En réalité, seulement 10% des propositions de la Conférence nécéssitent une réforme des traités, tempère Christine Verger. Dans bien des domaines, des accords politiques pourraient suffire».
Que vont devenir ces propositions ?
Ce dimanche, Emmanuel Macron s'est dit favorable à «la convocation d'une convention de révision des traités».
La majorité simple au Conseil permet de convoquer une telle convention. Constituée de parlementaires européens et nationaux, elle sera chargée d'assurer le suivi de la Conférence sur l'avenir de l'Europe en travaillant plus précisement sur les mesures.
Lors du Conseil européen de juin prochain, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE rendront un premier avis. La Commission devrait faire de même en septembre. «Il faut que ce rapport de 300 propositions soit digéré, il est normal que le processus prenne du temps», indique Christine Verger.
La vice-présidente de l'Institut Jacques Delors veut croire que la Conférence sur l'avenir de l'Europe aboutira à des mesures concrètes car «la pression est forte, notamment en raison du contexte international».