Plus d'un an après l'entrée en vigueur du Brexit, l'accès des pêcheurs français aux eaux britanniques continue de susciter de vives tensions entre la France et le Royaume-Uni. Ce mercredi 27 octobre, le ton est à nouveau monté d'un cran alors que la France menace son partenaire commercial de représailles.
Que prévoyait l'accord du Brexit ?
L'accord post-Brexit conclu in extremis entre Bruxelles et Londres à la fin de l'année 2020 indique que les pêcheurs européens peuvent continuer à travailler dans certaines eaux britanniques, à condition qu'ils prouvent qu'ils y pêchaient déjà entre 2012 et 2016. S'ils remplissent les conditions, les navires français se voient remettre une licence de pêche délivrée par Londres.
Pourquoi la France est-elle en colère ?
Dans les zones de pêche les plus disputées, c'est-à-dire celles situées entre 6 et 12 milles des côtes britanniques, Londres n'a accordé que 210 licences définitives, alors que Paris en réclame encore 244. Une situation qui met les pêcheurs français en grande difficulté.
Les tensions sont encore plus fortes autour des îles anglo-normandes de Jersey et Guernesey qui ont interdit l'accès de leurs eaux à des dizaines de navires français. Ces territoires semi-autonomes délivrent au compte-gouttes leurs propres licences de pêche aux navires ayant justifié au moins 11 onze jours de pêche dans la zone entre 2017 et 2020. Les pêcheurs français dénoncent des exigences difficiles à satisfaire pour les petits navires ne disposant pas de système de géolocalisation.
Au total, il manque «quasiment 50% des licences auxquelles nous avons droit», a souligné ce mercredi le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.
Comment la France réagit-elle ?
Ce mercredi, la France a posé un ultimatum au Royaume-Uni. Si les Britanniques n'accordent pas davantage de licences, d'importantes mesures de rétorsion seront mises en place à compter du mardi 2 novembre prochain. Paris prévoit ainsi «des contrôles douaniers et sanitaires systématiques sur les produits débarqués (en France) et l'interdiction de débarquement de produits de la mer», «avec des contrôles sur les camions». Une deuxième série de mesures pourrait cibler la fourniture d'électricité des îles anglo-normandes, a prévenu le gouvernement.
Invité de Laurence Ferrari dans la Matinale de CNEWS, le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes Clément Beaune a assuré de la détermination française à n'avoir «aucune tolérance, aucune complaisance» avec les navires britanniques. «Il faut parler le langage de la force parce que je crains que malheureusement, ce gouvernement britannique là ne comprenne que cela», a-t-il ajouté.
«Les navires britanniques qui veulent débarquer leurs produits de la pêche dans nos ports, ce sera terminé, sauf exception [...] Nous n'aurons aucune tolérance, aucune complaisance» martèle le secrétaire d'État aux affaires européennes Clément Beaune dans #LaMatinale pic.twitter.com/5Oi5rqpkZE
— CNEWS (@CNEWS) October 28, 2021
La ministre de la mer Annick Girardin a déjà annoncé la verbalisation de deux navires anglais au large du Havre, l'un n'ayant pas obtempéré spontanément à la demande de contrôle et l'autre ne disposant pas de l'autorisation pour pêcher dans les eaux françaises.
Ce mercredi, 2 navires anglais ont été verbalisés lors de contrôles classiques au large du Havre.
Le premier n'a pas obtempéré spontanément : verbalisation.
Le second n'avait pas de licence pour pêcher dans nos eaux : dérouté à quai et remise à l'autorité judiciaire. pic.twitter.com/2YETmeITC1— Annick Girardin (@AnnickGirardin) October 27, 2021
Quelle est la réponse des britanniques ?
Les autorités britanniques présentent une version radicalement différente de la situation. Selon le porte-parole du gouvernement de Boris Johnson, «98% des licences de pêche ont été accordées». Un chiffre démenti par Annick Girardin. «Le chiffre de 98% de licences accordées par le Royaume-Uni aux Européens est faux. Seuls 90,3% l'ont été. Bien évidemment, les 10% manquants sont pour les Français», a-t-elle écrit sur Twitter ce jeudi matin.
Le gouvernement britannique a jugé «décevantes» et «disproportionnées» les annonces françaises, sans préciser s'il avait ou non l'intention de revenir à la table des négociations.