Un Premier ministre qui marche sur des oeufs. Depuis plusieurs jours, les traitements infligés aux populations autochtones pendant des décennies sont de nouveau l'un des principaux sujets de conversation au Canada. Justin Trudeau, qui avait promis une «véritable réconciliation», ne semble pas parvenir à son objectif.
Pour rappel, c'est la découverte de tombes anonymes près de pensionnats pour autochtones à la fin du mois de juin qui a relancé la question. En tout, plus d'un millier de ces sépultures ont été retrouvées dans le pays. Les pensionnats en question étaient des établissements dans lesquels les enfants amérindiens étaient emmenés de force pour être «intégrés». On leur apprenait la religion chrétienne, une nouvelle langue, et ils recevaient un nouveau nom. Un procédé qualifié de «génocide culturel» par une commission nationale d'enquête lancée en 2015.
De plus, les recherches ont montré que les établissements, dirigés par l'Eglise catholique, étaient des lieux où les sévices étaient courants. Punitions brutales, tortures, viols étaient ainsi répandus. Les maltraitances étaient telles qu'au moins 4.100 enfants sont morts, dont une grande partie à cause de la tuberculose. Marc Miller, ministre des Services aux autochtones, a ainsi qualifié ces établissements de «camps de travail».
Au fur et à mesure des découvertes, qui ne font qu'amplifier la stupeur et la colère des autochtones et des Canadiens, la tension est montée d'un cran. Le 1er juillet, fête nationale du Canada, s'est transformée dans plusieurs villes en manifestations de soutien aux familles touchées par cette situation. De plus, plusieurs églises ont été incendiées ces derniers jours, malgré un appel au calme de certains membres des communautés autochtones.
La mémoire n'est pas le seul blocage
«Le Canada doit reconnaître la vérité», a ainsi déclaré Justin Trudeau ce mardi 6 juillet. Le Premier ministre a qualifié de «honteux» le passé de son pays à la vue des récentes révélations.
Le chef du gouvernement a pris, le même jour, une décision symbolique en nommant Mary Simon au poste de gouverneure générale du Canada. Elle est ainsi devenue la première femme autochtone à occuper la fonction de «représentante officielle de la reine Elizabeth II». «Aujourd'hui, après 154 ans, notre pays franchit une étape importante. Je ne vois pas de meilleure personne pour le moment», a assuré Justin Trudeau.
Cependant, si la mémoire est aujourd'hui le principal point de blocage entre le gouvernement central et les peuples autochtones, ce n'est pas le seul qui devra être résolu pour atteindre cette «réconciliation» tant espérée. En effet, Justin Trudeau a été la cible d'une forte contestation pour avoir soutenu la construction d'un oléoduc sur les terres ancestrales de la nation Wet'suwet'en.
En février dernier, Radio Canada expliquait qu'une vingtaine de protestataires ont été arrêtés pour avoir tenté de bloquer l'accès au chantier, entraînant une vague de colère. Une situation qui montre que la relation conflictuelle entre les deux parties ne s'arrête pas uniquement à l'histoire du Canada, et reste plus que jamais actuelle.