C’est une formule que l’on entend de plus en plus, et qui fait débat. La stratégie «zéro Covid», employée dans plusieurs pays d’Asie et d’Océanie notamment, a pour objectif d’enrayer de manière extrêmement rapide la propagation du virus, avec des mesures sanitaires parfois radicales. Une méthode que certains aimeraient voir appliquée en Europe.
Plutôt apprendre à vivre avec le Covid-19, ou chercher à totalement éliminer la circulation du virus ? Ce sont deux stratégies différentes et qui n’impliquent pas les mêmes restrictions sanitaires. Alors qu’en France, et dans d’autres pays européens, on privilégie des restrictions moins contraignantes, permettant de continuer à travailler et à se déplacer, jusqu’à ce que l’épidémie devienne incontrôlable, d’autres pays font des choix beaucoup plus radicaux.
En Nouvelle-Zélande, la ville d’Auckland (et ses quelque 1,7 million d’habitants) a été entièrement reconfinée pour trois jours depuis dimanche, après la découverte de trois cas de coronavirus dans la ville. Cela permet aux autorités de procéder à un traçage efficace des cas contacts pour les isoler, et ensuite permettre au reste de la population de reprendre leurs activités. Une politique qui parait démesurée, mais qui a permis à la Nouvelle Zélande de garder ses bars, restaurants, cinémas et musées ouverts, et de vivre presque normalement la plupart du temps.
L’Australie a elle aussi mis en place depuis longtemps des mesures strictes face au Covid-19, comme des confinements rapides ou des restrictions fortes en matière d’entrée et sortie sur le territoire. Les voyageurs désirant se rendre en Australie sont soumis à une quarantaine de minimum 14 jours dans un lieu désigné par les autorités, avec tests PCR et prises de température régulières pour s’assurer qu’ils ne rentrent pas le sur territoire avec le virus. Des stratégies similaires, qui consistent à imposer des mesures très contraignantes pendant un court laps de temps sur une petite partie du territoire, ont été aussi appliquées en Chine ou encore en Corée du Sud.
Une stratégie souhaitable en Europe ?
Dans une tribune publiée dans le journal Le Monde lundi 15 février, plusieurs scientifiques européens ont plaidé pour la mise en place de stratégies similaires dans l’Union européenne. Ils proposent notamment des reconfinements localisés, et la mise en place de «zones vertes», dans lesquelles le virus ne circule pas, et où les bars, restaurants et autres établissements pourraient alors rouvrir. Ces zones seraient définies par les États, et dans le cas de la France, pourraient correspondre aux départements. Chaque personne souhaitant entrer dans une zone verte devra montrer patte blanche avec un test PCR négatif, et une quarantaine obligatoire. Cela permettrait, selon les chercheurs, de se concentrer sur les régions où le virus circule activement, et d’accroitre les dépistages.
Interrogé par l’AFP, le professeur Martin McKee, expert en santé publique à la London School of Hygiene and Tropical Medicine déclare : «"Vivre avec le virus", ça veut dire quoi ? La situation actuelle n'est pas acceptable, elle crée trop d'incertitudes sur le long terme. (…) Plus le virus circule, plus on s'expose à l'apparition de mutations. On ne peut pas continuer avec une troisième, quatrième, quinzième, vingtième vague.»
Dans Le Monde, le directeur médical de crise de l’AP-HP, Bruno Riou, se disait «intimement persuadé que seul un confinement», pouvait prévenir d’une accélération de l’épidémie, induite notamment par la propagation du variant anglais. «Il ne faut plus avoir peur d’un confinement total, à condition qu’il soit de courte durée : c'est la seule stratégie qui a démontré son efficacité dans de nombreux pays, y compris le nôtre, en attendant qu'une proportion suffisante de la population soit vaccinée, ce qui ne sera effectif que dans plusieurs mois», a-t-il ajouté.
Une proposition qui ne fait cependant pas consensus au sein de la communauté scientifique. Sur le plateau de CNEWS, l’épidémiologiste Martin Blachier s’est affiché contre cette thèse, affirmant qu’un confinement court aura comme unique effet de désengorger les services de réanimation, mais pas d’en finir avec la pandémie.
La france privilégie tests et vaccination
Cette stratégie ne semble cependant pas séduire le gouvernement français. Alors que le département de la Moselle fait face à une propagation inquiétante des variants du coronavirus, le ministre de la Santé Olivier Véran, qui s’est rendu sur place, n’a pas souhaité de reconfinement du département. Une telle mesure ne serait pas si simple à mettre en place, car nécessite une réflexion sur les déplacements entre les départements, voire même de la France vers d’autres pays européens dans le cas de la Moselle, proche de l’Allemagne et du Luxembourg.
Les indicateurs n’étant pas encore critiques sur l’ensemble du territoire, le gouvernement privilégie donc les campagnes de dépistage et la vaccination, qu’il a par ailleurs renforcé dans le département de la Moselle.