Une longévité quasi inégalée. Ce dimanche 22 novembre, Angela Merkel célèbre ses 15 ans à la tête de l'Allemagne. Accueil des migrants, sauvetage de la Grèce, abandon du nucléaire... Retour sur le «règne» de la chancelière, qui s'achèvera en septembre prochain, en 10 dates marquantes.
Novembre 2005 : elle devient chancelière pour la première fois
Après avoir accédé à la présidence de son parti, la CDU (Union chrétienne-démocrate, centre-droit), en 2000, Angela Merkel devient cinq ans plus tard la première femme à prendre la tête de l'Allemagne, à l'issue des élections fédérales de 2005. Sa formation devance in extremis le SPD (Parti social-démocrate, centre-gauche) du chancelier sortant Gerhard Schröder (35,2 % des voix contre 34,2 %), parti avec lequel Angela Merkel s'allie pour former son gouvernement. Elle est également la première personnalité venant de l'ex-Allemagne de l'Est (RDA) à diriger le pays.
Septembre 2006 : elle est désignée «femme la plus puissante du monde» par Forbes
Moins d'un an après son arrivée au pouvoir, Angela Merkel est honorée par le célèbre magazine économique américain Forbes en septembre 2006, qui la désigne «femme la plus puissante du monde». La chancelière allemande détrône Condoleezza Rice, la secrétaire d'Etat américaine, un poste correspondant à celui de chef de la diplomatie aux Etats-Unis.
Une place de numéro un à laquelle elle est depuis abonnée. De 2006 à 2019, la chimiste de formation a été nommée par Forbes «femme la plus puissante du monde» treize années sur quatorze. Il n'y a qu'en 2010 qu'elle a laissé sa couronne à Michelle Obama. Hommes et femmes confondus, sa meilleure performance dans le classement des personnalités les plus puissantes de la planète est une deuxième place, en 2012 et 2015, derrière respectivement Barack Obama et Vladimir Poutine.
Mai 2010 : intransigeante lors du sauvetage de la grèce
En 2009, le Premier ministre grec nouvellement élu Georges Papandréou dévoile que le déficit public et la dette publique de la Grèce ont été largement sous-estimés par le gouvernement précédent. C'est le début de la crise de la dette grecque, qui va par la suite se propager à d'autres pays de la zone euro (Italie, Espagne, Portugal...). Athènes demande de l'aide à l'Union européenne en 2010. Partisane de la rigueur budgétaire, Angela Merkel dit d'abord non à un sauvetage rapide de la Grèce, avant de donner son accord à un plan d'aide européen, signé en mai 2010, mais au prix d'importantes mesures d'austérité.
Rebelote en 2012 et en 2015, avec un second puis un troisième plan d'aide international, exigeant de nouveau de la Grèce des réformes budgétaires drastiques. Si ces plans successifs ont permis de sauver Athènes du défaut de paiement et même plus largement l'euro, l'intransigeance d'Angela Merkel, vue comme la nouvelle «Dame de fer» - le surnom de l'ex-Première ministre britannique Margaret Thatcher -, a dégradé son image en Europe.
Mars 2011 : elle décide de sortir du nucléaire après Fukushima
Quelques jours après la catastrophe nucléaire de Fukushima, au Japon, en mars 2011, Angela Merkel annonce son intention de sortir son pays du nucléaire le plus rapidement possible. La chancelière était jusque-là une tenante de cette énergie. En septembre 2010, elle avait décidé de prolonger de douze ans en moyenne la durée de vie des 17 centrales allemandes.
La volonté de la dirigeante allemande est entérinée par la coalition gouvernementale en mai 2011. Le gouvernement décide que la plupart des centrales seront mises hors service d'ici fin 2021, trois d'entre elles étant autorisées à fonctionner jusqu'à fin 2022. L'Allemagne devient ainsi la première grande puissance industrielle à renoncer à l'énergie nucléaire.
Février 2015 : architecte du cessez-le-feu en Ukraine
Impliquée dans les dossiers internationaux, Angela Merkel a joué un rôle actif en février 2015 dans la signature de l'accord de «Minsk II», censé résoudre le conflit armé opposant le gouvernement ukrainien à des séparatistes pro-russes dans la région du Donbass, dans l'est de l'Ukraine.
La chancelière a notamment participé - aux côtés des dirigeants français François Hollande, russe Vladimir Poutine et ukrainien Petro Porochenko - à la dernière séance de négociations, longue de 17 heures, ayant abouti à un accord de cessez-le-feu. Malgré cette avancée diplomatique, la guerre en Ukraine n'est toujours pas terminée aujourd'hui.
Août 2015 : elle ouvre les portes de l'allemagne aux migrants
«Wir schaffen das !» («Nous y arriverons !») Le 31 août 2015, alors que l'Europe fait face à un afflux de réfugiés fuyant notamment la guerre en Syrie, Angela Merkel prononce cette phrase désormais entrée dans l'histoire. Elle annonce ouvrir grand les portes de l'Allemagne à ces dizaines de milliers de migrants. Rien qu'en 2015, 1,1 million de demandeurs d'asile ont été accueillis dans le pays. Peut-être la décision la plus marquante des quatre mandats de la native d'Hambourg.
Septembre 2017 : entrée historique de l'extrême droite au Parlement
Angela Merkel restera également dans l'histoire pour avoir été la chancelière sous laquelle une formation d'extrême droite, l'AfD (Alternative pour l'Allemagne), est entrée au Bundestag, le Parlement allemand, en septembre 2017. Une première depuis la Seconde Guerre mondiale, ravivant pour certains le douloureux passé nazi du pays.
Islamophobe et anti-immigration, l'AfD s'est même positionnée en 2017 comme la troisième force politique du pays, avec 92 députés (sur 709). Fondé en 2013, le parti a surfé sur la peur des migrants, provoquée par l'afflux de réfugiés entrés dans le pays en 2015 à l'initiative d'Angela Merkel, et en particulier par les incidents lors du réveillon 2015 à Cologne. Des centaines de femmes y ont été agressées sexuellement durant cette nuit du Nouvel an, en majorité par des migrants.
Octobre 2018 : elle Annonce son prochain retrait de la vie politique
Fragilisée par les revers électoraux successifs de son parti et la montée de l'extrême droite, Angela Merkel provoque un séisme politique en Allemagne le 29 octobre 2018, en annonçant qu'elle quittera la présidence de la CDU en décembre, et que son mandat actuel de chancelière sera le dernier. Elle indique qu'elle se retirera de la vie politique en septembre 2021, lors d'élections fédérales pour lesquelles elle ne se représentera pas.
Celui qui portera les couleurs de la CDU pour ce scrutin n'est pas encore connu. La «dauphine» d'Angela Merkel, Annegret Kramp-Karrenbauer, dit «AKK», élue en décembre 2018 à la tête de la CDU, a renoncé en février dernier, et l'élection du nouveau patron de la formation a été reportée à l'année prochaine en raison de la crise du coronavirus.
Juin-juillet 2019 : des tremblements qui inquiètent
En 2019, de mystérieuses crises de tremblements d'Angela Merkel ont provoqué l'inquiétude en Allemagne. En moins d'un mois, entre juin et juillet, la chancelière est victime à trois reprises de spasmes incontrôlables lors de cérémonies officielles. Après sa troisième crise, elle explique en conférence de presse qu'il s'agit de séquelles de sa première crise. «Je vais bien. (...) Il n'y a pas lieu de s'inquiéter», déclare-t-elle. Depuis, la dirigeante allemande n'a pas été prise de nouveaux tremblements en public.
German Chancellor Angela Merkel says she is "very well" again after drinking three glasses of water.
Earlier Merkel was visibly shaking as she greeted Ukrainian President Volodymyr Zelenskiy at temperatures of around 30 degrees celsius in Berlin. pic.twitter.com/uWhnW0scD7— DW Politics (@dw_politics) June 18, 2019
Mai 2020 : elle défend un accord historique sur un plan de relance européen post-coronavirus
A l'opposé de la politique de rigueur budgétaire qu'elle avait promue tout au long de ses mandats successifs, Angela Merkel accepte en mai 2020 l'idée d'une solidarité financière à l'échelle européenne. Face à la crise économique provoquée par la pandémie de coronavirus, la chancelière de 66 ans trouve un accord avec Emmanuel Macron sur un plan de relance européen de 500 milliards d'euros, financé pour la première fois par une dette commune au niveau de l'UE.
Deux mois plus tard, au bout de longues tractations entre tous les Etats membres, les dirigeants des Vingt-Sept trouvent un accord sur un plan de relance de 750 milliards d'euros. Sur ce total, 390 milliards d'euros seront distribués sous forme de subventions aux Etats les plus touchés par la pandémie. C'est ce montant - inférieur aux 500 milliards proposés par le couple franco-allemand - qui devra être remboursé en commun, les 360 milliards restants correspondant à des prêts classiques. L'application de ce plan de relance européen est aujourd'hui bloquée par la Hongrie et la Pologne, qui s'opposent à la clause conditionnant le versement des fonds au respect de l'Etat de droit.