Une bonne nouvelle pour la planète. Selon l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), après une première baisse enregistrée l'an passé, la consommation mondiale de viande par habitant devrait cette année être à nouveau en repli de 3 %, marquant la plus forte baisse enregistrée depuis l'an 2000 et la deuxième consécutive depuis 1961.
Relayés par l'agence de presse financière Bloomberg, ces chiffres, explique-t-elle, pourraient marquer un tournant décisif et s'expliquent notamment par la crise du coronavirus qui a bouleversé les lignes de production et la demande mondiale.
Si la tendance venait à se confirmer, elle marquerait un changement radical et inédit pour une industrie alimentaire jusqu'ici basée sur une croissance constante et quasiment ininterrompue.
les dépenses alimentaires en baisse
Fait notable, et non des moindres, cette inflexion se constate sur tous les principaux marchés, y compris aux États-Unis, pays où la consommation de viande par habitant ne devrait pas revenir aux niveaux prépandémiques avant au moins l'année 2025, voire 2026.
Alors que le pays vient, jeudi 30 juillet, tout juste de rentrer officiellement en récession, les consommateurs américains, dont beaucoup ont perdu leur emploi et ne bénéficient pas d'assurance-chômage, ont dû drastiquement faire des économies en commençant par réduire leurs dépenses alimentaires, achats de viande en tête.
Par ailleurs, les multiples fermetures de restaurants ont affecté la demande, la population n'ayant plus la possibilité de se rendre dans ces établissements pour goûter grillades, brochettes et autres burgers.
Meat consumption is about to fall for the second year in a row https://t.co/KKc4iMqIlp
— Bloomberg (@business) July 31, 2020
Du côté de la Chine, qui représente environ un quart de la consommation mondiale de viande, la baisse s'explique en revanche par une méfiance accrue à l'égard des produits d'origine animale après que le gouvernement a suggéré un lien entre les protéines importées et une épidémie de coronavirus réapparaissant à Pékin.
De même, et cela s'est vérifié sur la plupart des marchés, les usines, pandémie oblige, ont dû profondément réorienter leurs lignes de production ce qui mécaniquement a engendré des problèmes d'approvisionnement et, in fine, là aussi une baisse de la consommation de viande.
Du côté des défenseurs du climat et autres organisations écologiques et végans, cette baisse est bien sûr accueillie comme une bonne nouvelle. Ces organisations plaident en effet depuis des années pour une consommation plus réduite de la viande et ont pour cela des arguments à faire valoir.
Un changement de modèle à confirmer
Il est désormais établi que l'agriculture génère plus d'émissions mondiales de gaz à effet de serre que les transports, et que ces émissions de gaz provenant du secteur agricole sont dues en grande partie aux seules industries liées à la production animale, et notamment à l'élevage.
La viande et les produits laitiers sont ainsi à eux seuls responsables de 18 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'origine humaine.
Que ce soit du côté des organisations écologiques ou des industriels, la grande question est maintenant de savoir si - et jusqu'à quand - ce changement de consommation va se confirmer dans le temps.
Car si les consommateurs s'habituent à consommer moins de viande avec la pandémie, vont-ils modifier durablement leur régime alimentaire lorsque la situation reviendra à la normale ? Ou, au contraire, vont-ils diversifier leur alimentation et manger moins de viande, ouvrant du même coup une nouvelle ère dans les sociétés de consommation occidentales et plus largement mondiales ?
Alors que des millions de personnes pourraient se tourner davantage vers des produits à base de protéines végétales en raison de préoccupations environnementales, les opinions publiques suivent avec intérêt ce qui se passe dans les abattoirs.
Elles sont notamment préocupées par l'explosion des infections à coronavirus dans ces établissements (France, États-Unis, Brésil, Allemagne) lesquelles ont braqué les projecteurs sur le sort des salariés du secteur occupant des emplois dangereux et très globalement sous-payés.
Les tendances à venir seront particulièrement scrutées par les analystes. Mais s'il est toujours possible que la consommation de viande connaisse un rebond, cela pourrait surtout s'expliquer par le fait que la population mondiale croît plus rapidement que la production de viande en elle-même.
Seules des analyses plus affinées, se concentrant sur les consommations par tête, pourront continuer à indiquer si, et dans quelles mesures, des baisses per capita sont certaines, marquant un tournant industriel.