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Pourquoi le coronavirus ne recule-t-il pas aux Etats-Unis comme en Europe ?

Avec 30.000 nouveaux cas détectés par jour en avril et plus de 20.000 depuis début mai, les États-Unis stagnent. [DAVID DEE DELGADO GETTY IMAGES NORTH AMERICA VIA AFP].

Une pandémie à deux vitesses de part et d'autre de l'Atlantique. Alors que la courbe du coronavirus retombe en Europe, les Etats-Unis sont bloqués depuis près de deux mois sur un plateau. Une différence qui s'explique par les formes que peut revêtir le SARS-CoV-2 en fonction des territoires, mais aussi, et surtout, par les différentes décisions politiques prises pour le combattre.

Avec 30.000 nouveaux cas détectés par jour en avril et plus de 20.000 depuis début mai, les États-Unis stagnent, car une partie du pays a d'abord pris le relais de l’autre.

«Nous n’avons pas agi assez vite et fort pour empêcher le virus de se propager au départ, et il s’est apparemment déplacé des foyers initiaux à d’autres zones urbaines et rurales», explique ainsi Tom Frieden, ancien directeur des Centres américains de prévention et de lutte contre les maladies (CDC).

Concrètement, il y a ainsi d’un côté cinq États du Nord-Est, du New Jersey au Massachusetts avec New York au milieu, où la moitié des morts américains du Covid-19 ont été enregistrées et qui, eux, ont largement engagé la descente après avoir été les plus prudents dans le déconfinement et, de l'autre, les régions moins urbanisées, comme le Midwest, le Sud et une partie de l’Ouest, qui ont ordonné le confinement plus tard et l’ont levé plus tôt et où aujourd’hui le virus circule le plus.

D'autre part, la politisation de la pandémie a renforcé le phénomène : «les gouverneurs des États républicains ont ainsi eu tendance à minimiser le risque comme le président Donald Trump alors que les Etats démocrates se sont montrés, eux, plus appliqués pour engager une réouverture en sécurité», observe Sten Vermund, doyen de l’école de santé publique de l’université Yale. Le spécialiste ajoutant, par ailleurs, qu’idéologiquement, la plupart des Américains n’aiment pas qu’on leur dise quoi faire.

Résultat : en Géorgie, en Floride, au Texas, on voit peu de gens masqués, y compris dans les restaurants et les magasins, même chez les employés. Au Texas et en Caroline du Nord, il y a actuellement plus de malades du Covid-19 hospitalisés qu’il y a un mois. «La Caroline du Sud est aussi au pire de son épidémie aujourd’hui», précise Melissa Nolan, professeure d’épidémiologie à l’université de Caroline du Sud, en notant des foyers d’infection dans les populations marginalisées comme les ouvriers hispaniques.

Les données des téléphones portables confirment en outre que la distanciation physique est diversement respectée : au plus fort du confinement, les déplacements des habitants de New York ou de Washington ont baissé de près de 90 % pendant plusieurs semaines, contre 50 % ou moins dans de nombreuses zones du Sud, selon la société Unacast. 

Des tests nombreux mais toujours insuffisants

Autre facteur : les tests. Avec un demi-million de tests réalisés par jour, les États-Unis sont devenus champions du monde du dépistage, par habitant. «Mais cela ne suffit pas encore pour endiguer le virus», ajoute Jennifer Nuzzo, de l’université Johns-Hopkins, car l’épidémie américaine était bien plus grande qu’ailleurs. «Nous ne détectons pas encore toutes les infections», insiste l’experte.

De plus, seuls 14 % des tests américains sont positifs, contre moins de 5 % en Europe : autrement dit, les États-Unis ratent encore beaucoup de cas asymptomatiques, qui continuent à contaminer amis et voisins. Le dépistage n’est pas une fin en soi, explique Jennifer Nuzzo : les tests doivent s’accompagner immédiatement d’un isolement et d’un traçage des contacts. Or le déconfinement a commencé avant que ces procédures ne soient prêtes.

Enfin, le virus en lui-même réserve aussi bien des surprises, parfois relativement bonnes. Ce faisant, le tableau n’est pas totalement sombre : dans plusieurs endroits, comme en Arizona, la plus grande disponibilité des tests a fait augmenter le nombre de cas détectés, mais ce sont apparemment surtout des cas bénins. La Géorgie a rouvert très tôt, fin avril, faisant craindre le pire… Mais la résurgence ne s’est pas produite pendant longtemps, le nombre de cas stagnant tout le mois de mai, avant une hausse ces derniers jours, illustrant à quel point la mécanique du coronavirus reste mystérieuse.

«Tous mes amis sont perplexes», confie William Schaffner, spécialiste des maladies infectieuses à l’université Vanderbilt.

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