Alors que les Etats-Unis approchent du seuil des 100.000 décès dus au coronavirus, le New York Times a décidé de rendre hommage à ces victimes ce dimanche 24 mai, en couvrant entièrement sa Une des noms de 1.000 morts américains du Covid-19.
«Ils n'étaient pas simplement des noms sur une liste. Ils étaient nous», écrit le grand quotidien américain en introduction de sa liste macabre. Et celui-ci de justifier sa démarche : «Les chiffres ne peuvent à eux seuls montrer l'impact du coronavirus sur l'Amérique.»
the front page of sunday’s @nytimes. pic.twitter.com/L2xF8fPg4u
— Josh Crutchmer (@jcrutchmer) May 23, 2020
Comme elle l'explique dans un article publié sur le site web du New York Times l'instigatrice de cette Une, la rédactrice en chef adjointe du pôle graphique, Simone Landon, voulait représenter le chiffre de 100.000 morts d'une manière qui traduisait à la fois l'immensité et la variété des vies perdues.
Mettre 100.000 points ou bonshommes sur une page «ne vous dit pas grand-chose sur qui étaient ces gens, sur la vie qu’ils menaient, sur ce que cela signifie pour nous en tant que pays», déclare-t-elle. Elle a donc eu l'idée de fouiller dans les nécrologies et avis de décès des quatre coins du pays, et d'en extraire 1.000 noms de victimes du coronavirus (soit 1 % du bilan humain total, qui s'élève à 97.000 décès), accompagnés à chaque fois d'une petite phrase «qui dépeint le caractère unique de chaque vie perdue», explique le New York Times.
Ce qui donne par exemple «Alan Lund, 81 ans, Washington, chef d'orchestre avec 'l'oreille la plus extraordinaire'», «Lila A. Fenwick, 87 ans, New York, première femme noire diplômée de la Faculté de droite de Harvard», ou encore «Bassey Offiong, 25 ans, Michigan, voyait ses amis dans leurs pires moments mais en faisait ressortir le meilleur».
Une Une sans image, «une première dans l'époque moderne»
Résultat, une Une impressionnante, et sans doute historique. En effet, Tom Bodkin, directeur de la création du New York Times, ne se souvient pas d'avoir déjà vu auparavant, en quarante ans de maison, une Une sans image. «C'est certainement une première dans l'époque moderne.»
L'accueil du grand public a été très enthousiaste, puisque l'image de la Une, partagée sur Twitter par le quotidien samedi après-midi, a été retweetée plus de 60.000 fois et aimée par plus de 115.000 personnes. Un tweet depuis supprimé à cause d'une erreur dans un nom, et remplacé par une photo de la Une avec la correction.
Le prestigieux journal américain, fondé en 1851, avait déjà fait parler de lui pour une Une percutante début mai. Pour représenter l'explosion du chômage causée par la crise du coronavirus, le quotidien avait imprimé sur le haut de sa Une un graphique montrant l'évolution mensuelle du nombre d'emplois aux Etats-Unis. Pour le mois d'avril 2020, avec 20,5 millions d'emplois perdus, le point se situait carrément en dehors du graphique, tout en bas de la page.
The number of jobs lost in the U.S. last month alone far exceeds the 8.7 million lost in the Great Recession. https://t.co/OoY4RtrW5R pic.twitter.com/4UE4yRGRCP
— The New York Times (@nytimes) May 8, 2020