Le président vénézuélien Nicolas Maduro a suspendu mercredi le dialogue qu'il a engagé avec l'opposition en vue d'une sortie de crise au Venezuela, en réponse aux nouvelles sanctions économiques prises par les Etats-Unis contre Caracas.
«Bien que la délégation de l'opposition désignée par le député Juan Guaido se trouve déjà à La Barbade pour la session de discussions prévue pour cette semaine, le président Nicolas Maduro a décidé de ne pas envoyer la délégation vénézuélienne à cette occasion, en raison de la grave et brutale agression perpétrée de manière continuelle et retorse par l'administration Trump contre le Venezuela», selon un communiqué officiel.
Le gouvernement affirme néanmoins qu'il ne quitte pas la table des négociations : «Le Venezuela se prépare à revoir les mécanismes de ce processus afin qu'ils s'accordent avec les intérêts de notre peuple».
Après des contacts exploratoires et une première rencontre à la mi-mai à Oslo, les discussions entre les deux camps avaient repris à La Barbade le 8 juillet. Les délégations devaient se retrouver sur l'île caribéenne pour de nouveaux pourparlers jeudi et vendredi, toujours sous l'égide de la Norvège.
Dans un communiqué publié vendredi, le gouvernement norvégien avait indiqué que les délégués du gouvernement et de l'opposition s'étaient engagés à trouver une solution «constitutionnelle» à la crise vénézuélienne.
La décision du dirigeant socialiste intervient au surlendemain de l'annonce par la Maison Blanche que le président Donald Trump avait ordonné un gel total des biens aux Etats-Unis du gouvernement vénézuélien de Nicolas Maduro, que Washington souhaite voir quitter le pouvoir.
«Stratégie»
Dans un entretien téléphonique mercredi avec la chaîne de télévision publique VTV, le président vénézuélien, soulignant que l'opposition avait applaudi les nouvelles sanctions américaines, a conclu qu'on ne pouvait pas négocier dans ces conditions.
Le chef de l'opposition Juan Guaido, qui s'est déclaré président par intérim du Venezuela en janvier et a été reconnu par plus d'une cinquantaine de pays, dont les Etats-Unis, s'est félicité mardi du gel décidé par les Etats-Unis à l'encontre des biens du gouvernement.
Il a estimé sur Twitter que la mesure prise par les Etats-Unis visait à «protéger les Vénézuéliens» et a une nouvelle fois accusé M. Maduro d'usurper le pouvoir parce que son mandat actuel est issu d'une élection présidentielle que l'opposition considère comme entachée de fraude.
Mercredi, il a assuré que les sanctions allaient frapper les dirigeants chavistes et non pas les citoyens. «Elles sont dirigées contre le régime, contre Maduro», a-t-il déclaré au cours d'une petite cérémonie dans un quartier huppé de l'est de Caracas pour demander la libération du député Juan Requesens.
Ce dernier est en prison depuis un an pour son lien supposé avec une attaque aux drones contre le chef de l'Etat socialiste. «Il y a une stratégie nationale et internationale, dirigée par le Venezuela, pour mettre fin à la souffrance de notre peuple», a ajouté le social-démocrate Guaido.
Au lendemain de l'annonce du gel de ses biens aux Etats-Unis, dernière en date d'une série de sanctions économiques américaines contre le pouvoir de M. Maduro, qui incluent un embargo pétrolier, Caracas avait accusé Washington de «terrorisme économique» et de chercher à provoquer une rupture du dialogue avec l'opposition.
Mercredi, au moment où des milliers du partisans de Nicolas Maduro défilaient à Caracas pour dénoncer les sanctions américaines, le ministre vénézuélien de la Défense, le général Vladimir Padrino, demandait, lui, que la justice punisse ceux qui au Venezuela se déclarent favorables aux mesures prises par l'administration Trump.
«L'impunité, ça suffit !», a écrit le ministre sur Twitter. «Ceux qui ont commencé le 'jeu' de demander des sanctions contre la nation (...) avec des buts politiques minables doivent être punis par la loi».
Le général Padrino n'a pas précisé nommément qui il visait. Mais le communiqué officiel du gouvernement annonçant la suspension des pourparlers a attaqué directement Juan Guaido pour son approbation des sanctions américaines.
«Nous avons noté avec une profonde indignation que le chef de la délégation de l'opposition, Juan Guaido, célèbre, promeut et appuie ces actions qui nuisent à la souveraineté de notre pays et aux droits humains les plus élémentaires de ses habitants», déclare le communiqué.
Depuis La Barbade, où elle est arrivée, la délégation de l'opposition a répété qu'elle souhaitait la tenue d'élections libres et «la fin de la corruption, de la pauvreté et des violations des droits humains» au Venezuela.
Sous la présidence de M. Maduro, héritier du président Hugo Chavez (1999-2013), le Venezuela s'est enfoncé dans la plus grave crise économique, sociale et politique de son histoire moderne. Quelque 3,3 millions de Vénézuéliens se sont exilés depuis 2015, selon l'ONU.