La police de Hong Kong a tiré samedi des gaz lacrymogènes sur les participants à une manifestation interdite qui protestaient contre l'agression de militants pro-démocratie par des hommes soupçonnés d'appartenir à des triades, des gangs violents.
La manifestation, qui n'avait pas été autorisée mais rassemblait plusieurs milliers de personnes, se déroulait à Yen Long, ville proche de la frontière avec la Chine, sur le site des attaques de dimanche dernier. Les gangs et les comités ruraux pro-Pékin sont très influents dans cette ville des Nouveaux territoires.
Hong Kong est plongé depuis sept semaines dans la pire crise de son histoire récente, avec de gigantesques manifestations pacifiques opposées au gouvernement local pro-Pékin mais aussi des affrontements sporadiques entre contestataires radicaux et policiers.
La police anti-émeutes a tiré à une dizaine de reprises des gaz lacrymogènes sur la foule après des tensions avec certains manifestants. Vers 12H00 GMT, la plupart des manifestants s'étaient dispersés mais la tension persistait avec des groupes de quelques centaines de manifestants souvent casqués et munis de boucliers.
Des hommes vêtus de t-shirts blancs, armés de battes et de bâtons, avaient passé à tabac le dimanche précédent des manifestants antigouvernementaux qui rentraient chez eux, dans une station et une rame de métro à Yuen Long. D'après les autorités hospitalières, 45 personnes ont été blessées.
«Nous n'avons pas peur»
De nombreuses voix s'étaient élevées pour critiquer la lenteur à intervenir de la police du territoire revenu en 1997 dans le giron chinois. La police a fait état de l'arrestation de 12 personnes en lien avec ces violences, dont neuf liées aux triades.
Les manifestants de samedi ont afflué de manière pacifique vers la gare principale de Yuen Long. A la différence de marches antérieures, peu brandissaient des pancartes ou des banderoles.
La police était présente en nombre et beaucoup de magasins étaient fermés.
«Chacun de nous est venu ici de son propre chef», a déclaré à l'AFP une employée dans le secteur de la santé âgée de 25 ans. «Donc je ne crois pas que ce soit un rassemblement illégal, je suis juste venue en tant qu'individu pour exprimer ce que je pense». Une autre manifestante a dit vouloir montrer que «nous n'avons pas peur».
Aux alentours du rassemblement, de petits groupes de manifestants, portant pour beaucoup des casques et des boucliers, ont fait face aux policiers en les accusant de protéger les triades. Ils ont lancé des projectiles sur les policiers et entouré un car de police qu'ils ont recouvert de graffitis. La police a riposté avec des tirs de gaz lacrymogène.
Dans le cortège, les manifestants se protégeaient avec des parapluies et s'éparpillaient dès qu'une salve de gaz lacrymogène était tirée dans leur direction.
Oeufs et graffitis
Hong Kong, haut lieu de la finance internationale, connaît depuis le 9 juin d'énormes rassemblements pacifiques antigouvernementaux, avec parallèlement de violents affrontements entre les plus radicaux et la police.
Dimanche dernier, des manifestants ont attaqué le Bureau de liaison du gouvernement chinois à Kong Kong, jetant des oeufs et inscrivant des graffitis sur la façade. Il s'agissait d'un nouveau défi à l'autorité de Pékin après le saccage début juillet du Parlement hongkongais.
Le mouvement est parti du rejet d'un projet de loi désormais suspendu visant à autoriser les extraditions vers la Chine puis s'est élargi à des revendications plus larges de réformes démocratiques, sur fond d'inquiétude générée par l'ingérence jugée grandissante de Pékin dans les affaires intérieures du territoire.
Pékin a condamné les violences «absolument intolérables» mais laisse les autorités locales régler seules la crise.
Dimanche est prévue une autre manifestation dans le quartier de Hong Kong où la police anti-émeutes avait tiré la semaine dernière du gaz lacrymogène et des balles en caoutchouc sur les manifestants qui s'en étaient pris au Bureau de liaison chinois. La police a autorisé un rassemblement mais pas une marche.